La Bundesliga s'apprête à vivre une longue crise financière après le dépôt de bilan du géant des médias, Kirch. L'avenir immédiat du football professionnel allemand semble sauvé, mais le futur est de plus en plus incertain. C'est désormais chose connue, Kirch Media a déposé les armes lundi devant une dette totale estimée à au moins 5,7 milliards de dollars. Ce que l'on ne connaît pas, c'est que le géant des médias détenait les droits de retransmission des matches du championnat allemand de première division jusqu'en 2004. Une source de revenus vitale pour la Bundesliga vient de s'assécher. Le président de la Ligue allemande de football (DFL) Werner Hackmann a assuré que l'organisme dirigeant du football professionnel avait assez d'argent pour soutenir les 36 clubs des deux premières divisions jusqu'à la fin de la saison en cours, ajoutant que la DFL pouvait compter sur 40 millions d'euros de versements effectués par les clubs les années précédentes. Les 18 clubs de première division espéraient se partager 286,32 millions d'euros issus des droits de retransmission des matches cette saison, soit 60% de leurs revenus. Si les gros clubs, comme le Borussia Dortmund ou le Bayern Munich, peuvent compter sur l'argent des sponsors, du merchandisage et de la billetterie, les moins bien nantis dépendent largement des droits TV qui représentent, par exemple, 69% du chiffre d'affaires du FC Sankt-Pauli, actuellement avant-dernier de la première division. Les experts prédisent déjà la mort des plus petits clubs en cas de défaut de paiement. A moins de six mois des législatives, l'affaire est devenue une véritable carte électorale. Le chancelier Gerhard Schröder a déjà proposé des garanties d'Etat pour des prêts en faveur de clubs menacés par la crise. Les garanties, selon lui, ne sont pas destinées à protéger les salaires des joueurs les mieux payés, mais à aider les petits clubs. Schröder a également souligné lundi que cette aide de l'Etat ne serait pas nécessaire si Kirch parvenait à honorer ses paiements ou qu'il réussissait à revendre ses droits à "une ou deux" télévisions. Au centre du problème se trouvent les dettes qui pèsent sur une chaîne à péage contrôlée par le groupe de Leo Kirch, Premiere. Kirch espérait connaître le même succès que Rupert Murdoch avec BskyB en Angleterre, mais Premiere, qui propose un accès payant à tous les matches de Bundesliga, n'a jamais décollé. Kirch détient également les droits TV des Coupes du monde de football 2002 et 2006, obtenus auprès de la Fifa pour 2,8 milliards de francs suisses. La FIFA a annoncé lundi que les droits avaient été protégés par Kirch avant son dépôt de bilan. L'avenir des droits du football allemand est moins clair. Le directeur général du Bayern Munich, Uli Höness, s'est fait l'écho du sentiment général qui veut que les chaînes publiques ARD et ZDF "sauvent la Bundesliga" en rachetant les droits. Avec l'argent des droits de retransmission coulant à flots dans les caisses des clubs, les salaires et les coûts se sont envolés. Désormais, ces mêmes droits vont probablement rétrécir comme peau de chagrin, sonnant la fin d'une ère dorée. Il est à craindre que la chute de Kirch n'affecte le niveau des clubs allemands dont les meilleurs joueurs chercheraient à partir à l'étranger à la recherche de salaires plus attrayants.