Khadija et Fettah étaient encore à bord du petit taxi. Certes, elle ignorait qu'il était recherché par la police depuis 1990 pour séquestration, vol qualifié, coups et blessures, menace à l'arme blanche et débauche. Elle ignorait même que sa femme, Fatima, était recherchée pour non-assistance à une personne en danger et non-dénonciation. S'adressait-elle à lui si elle savait qu'il était recherché par la police ? L'accompagnait-elle chez sa mère et allait-elle partager avec lui le même lit ? Tout était possible. Il était dix-sept heures passées d'une vingtaine de minutes quand elle a demandé au chauffeur de taxi de s'arrêter un peu plus loin de chez elle au quartier Moulay Larbi Alaoui, Hay Mabrouka. Il est descendu au moment où le petit taxi a fait un demi-tour empruntant le chemin allant au quartier Jamila I où demeurait Fettah. Plein de joie, Khadija marchait lentement. Elle se souvenait des bons moments qu'elle avait passée en compagnie de Fettah. Seulement, tout a été gâché quand elle a remarqué, à une cinquantaine de mètres de chez elle, son mari, Ismaël, qui se plantait à l'entrée de la ruelle. Il semblait qu'il était hors de lui, irrité, très en colère. Quand il l'a vue de loin, il est rentré chez lui. À l'intérieur, il y avait son père, sa belle-mère et quelques proches. C'était Ismaël qui a fait appel à eux. «Vous devez voir ce qu'elle a commencé à faire… Elle passe la majorité de son temps en dehors de chez elle en abandonnant nos deux enfants chez les voisins», leur a-t-il affirmé sur un ton nerveux. Khadija est rentrée. Elle n'a dit bonjour à personne. Comme si elle défiait tout le monde. Son père s'est tenu debout, lui a demandé : «Tu étais où ?» Elle ne lui a pas répondu. Elle l'examinait. Son mari s'est révolté contre elle. Devant tout le monde, il l'a insulté. Il a même essayé de la violenter. Heureusement, sa mère est intervenue pour l'empêcher. « Il faut savoir une chose, je ne veux plus de toi. Libères-moi. Je ne veux plus être ta femme. D'abord, je n'étais jamais ta femme que sur les papiers», lui a-t-elle dit devant son père et sa belle-mère. C'était la première fois qu'elle n'a plus honte de dire ces mots devant son père qui est resté bouché bée. Il n'a pas cru ses oreilles. Est-elle sa fille, Khadija, qui prononçait, sans vergogne, ses mots ? Et elle s'est adressée à lui: «C'est toi, père, et ta femme qui ont gâché ma vie en m'épousant à Ismaël que je n'ai jamais aimé. Il le savait très bien». Ismaël a été choqué en l'écoutant. Elle n'a jamais parlé ainsi. Agité, il s'est jeté sur elle. Son père et quelques proches sont intervenus pour l'empêcher de la frapper. Elle sanglotait. Ses deux enfants sont restés entre les bras de leur grand-mère. Ils regardaient la scène sans savoir ce qui se passait au juste entre leur mère et leur père. Leur maman suppliait leur père de la répudier. «Je ne te répudie jamais. Tu restes ma femme jusqu'à la fin de ma vie», lui a-t-il répondu. Pourquoi s'était-il abstenu de la répudier lorsqu'elle lui en a demandé ? L'aimait-il ? Voulait-il la garder par vengeance ou pour le bien de leurs deux enfants ? Enfin, quelques heures de dispute étaient suffisantes pour qu'ils se calment ensuite. Leurs parents et leurs proches sont partis. Ils sont restés seuls en compagnie de leurs deux enfants. Chacun n'adressait plus la parole à l'autre. Deux jours plus tard, Khadija est sortie de chez elle, avec ses deux enfants, à la main. Il s'est adressée directement à un publiphone. Au téléphone, elle a composé le numéro de Fettah. N'avait-elle pas l'intention de rompre sa relation avec lui ? Où voulait-elle détruire son foyer conjugal ?