C'est à coup sûr l'un des acteurs majeurs de sa génération qui s'en va. Mohamed Bastaoui incarnait à la fois la bonhomie, le bagout, l'humour, la joie de vivre et la passion du jeu. Acteur-né, il a forgé sa carrière comme un orfèvre, sans fioritures. Toujours au plus près de ses personnages, il a toujours été dans les bons coups, avec ce flair qui l'a caractérisé. Il faut dire que Mohamed Bastaoui savait choisir ses rôles. On dit d'ailleurs qu'un bon comédien compte au nombre des rôles qu'il a refusé de jouer. Et Bastaoui, pour ceux qui le connaissent de très près, n'était pas homme à incarner n'importe quoi. Mohamed Bastaoui a interprété un nombre incalculable de rôles, toujours avec la même exigence, sans se laisser avoir par les effets de mode ou les scénarii au rabais que produit souvent le cinéma marocain. Une carrière couronnée par plusieurs prix dont cet hommage inoubliable au Festival international du film de Marrakech en 2011. Un hommage mérité pour un homme de cœur, un acteur généreux, un type bien, qui avait un grand sens de l'amitié et du partage. Que du chemin parcouru depuis «Masrah Al Youm», créé dans les années 80. Puis, cette union sacrée avec son ami Mohamed Khouyi dans la troupe «Masrah Achams», qui a connu un franc succès durant plusieurs années. Viennent ensuite les grands rôles pour le cinéma où il a laissé voir toute l'étendue de son savoir faire. On l'a vu magnifique dans «Adieu Forain» de Daoud Aoulad Syad, «Les mains rudes » de Mohamed Asli, «Mille mois» de Faouzi Bensaïdi, «Taza» de Daniel Gervais et cette année dans «L'orchestre des aveugles» de Mohamed Mouftakir, projeté en compétition officielle au festival de Marrakech. Mohamed Bastaoui a laissé son empteinte dans d'autres productions comme chez Saad Chraïbi dans «Soif» et «Jawhara», Kamal Kamal dans «Tayf Nizar», Mohammed Ismaïl dans «Et après». Il a aussi joué dans «What a Wonderful World». Il a aussi inscrit son nom dans deux films intéressants de Daoud Aoulad Syad «Tarfaya» et «En attendant Pasolini», sans oublier son rôle chez Mohammed El Asli dans «À Casablanca les anges ne volent pas», puis avec Farida Bourquia dans «Deux femmes sur la route» et Jillali Ferhati dans «Dès l'aube». En 2013, il était à l'affiche dans «Sotto Voce» de Kamal Kamal, le film sacré Grand prix du Festival national de Tanger. C'est dire qu'avec une telle filmographie, c'est un monstre qui laisse un grand vide dans le paysage cinématographique marocain.