Le Brésil, "LE" pays du football, donne jeudi le coup d'envoi de "son" Mondial, face à la Croatie, sur fond de grèves et de manifestations qui pourraient perturber le plus grand événement sportif de la planète avec les JO. Plus d'un milliard de téléspectateurs, éclatés dans 200 pays, suivront la cérémonie d'ouverture, prévue à 15h14 locales (18h14 GMT), pour environ 25 minutes, juste avant le match inaugural à Sao Paulo à 20H00 GMT. Le défi est immense pour le Brésil. Et pas seulement sur le plan sportif. D'abord ce pays émergeant de 200 millions d'habitants, grand comme 14 fois la France, devra démontrer qu'il est capable d'organiser un événement sportif majeur, quatre ans après le succès du Mondial en Afrique du sud, autre émergeant invité à la table des grands. Les organisateurs devront lever les premiers doutes dès l'arrivée des spectateurs dans l'Arena Corinthians de Sao Paulo. Construit dans le quartier populaire d'Itaquera, ce stade symbolise les soubresauts traversés depuis la désignation en 2007. Test à pleine capacité L'arène, dont la livraison à la Fifa était initialement prévue en décembre 2013, est à peine terminée. La construction a été interrompue à de multiples reprises et le chantier interminable a provoqué la mort de trois personnes. Et c'est le match d'ouverture du mondial, attribué au Brésil en 2007, qui servira de "test" à pleine capacité, dans des domaines aussi cruciaux que la circulation et l'orientation des flux de spectateurs (61.600), l'accès des équipes dans un environnement saturé ou la sécurité... Et encore, les organisateurs ne devraient pas être confrontés à des problèmes d'acheminement des spectateurs, puisque les employés du métro, qui menaçaient de reprendre leur grève interrompue lundi soir, ont finalement levé le mouvement à vingt-quatre heures du match. Le premier mouvement, qui avait duré cinq jours, avait semé le chaos dans la mégapole de 20 millions d'habitants, saturée de gaz d'échappement en temps normal. Pas de répit... La tension sociale s'est reportée sur Rio, confrontée à une grève partielle de 24 heures dans les aéroports, alors que la plupart des supporteurs attendus pour la grande fête du foot doivent atterrir ou transiter par la ville. D'autres mouvements sociaux se lèvent ça et là, comme la grève des bus à Natal (nord-est), laissant planer la menace d'une réédition des manifestations historiques qui avaient enflammé le Brésil en juin 2013 en pleine Coupe des Confédérations, la répétition grandeur nature du Mondial. Un peu partout, les appels à manifester dès jeudi contre le coût du Mondial (11 milliards de dollars) se répendent dans neuf des 12 villes hôtes par le biais des réseaux sociaux. Bref, le feu couve sous le Mondial Deux manifestations sont convoquées à Sao Paulo dont une à 10H00 (13H00 GMT) à la station de métro Carrao, sur la ligne qui mène au stade. Deux autres manifestations sont prévues à Rio de Janeiro, l'une dans le centre le matin, l'autre sur la plage de Copacabana dans l'après-midi, non loin du fan-fest de la Fifa. Oublier le Qatargate Qu'est-ce qui pourrait éteindre les braises? De belles victoires de la "Seleçao" locale, dirigée par le débonnaire Luiz Felipe Scolari, qui avait largement contribué à coudre une 5e étoile sur le maillot auriverde en 2002, avec la génération Ronaldo. Douze ans plus tard, après un passage par le Portugal, Scolari va endosser les attentes de 200 millions de sélectionneurs, dans un pays où le football est considéré comme une véritable religion. D'ailleurs, celui que l'on surnomme "Felipao", soutenu par 68% des Brésiliens, a enfilé les habits de prêcheur. "A tous les Brésiliens, je veux dire que l'heure est arrivée. Nous sommes tous ensemble. C'est notre Coupe du monde", a-t-il lancé sur un ton churchilien, lors de la conférence de presse d'avant-match mercredi soir. Une victoire face à la Croatie permettrait à la Seleçao d'entamer de manière idéale son mondial, et surtout d'éviter le spectre d'un match "à la vie, à la mort" face à l'Espagne ou aux Pays-Bas, dès les huitièmes de finale. Surtout, une victoire permettrait de donner un élan au Mondial, de lever une vague d'enthousiasme de Natal-Fortaleza-Recife au Nord, à Porto Allegre, au Sud, en passant par Manaus, capitale de l'Amazonie baignée par la touffeur équatoriale. D'oublier les polémiques sur l'attribution du Mondial-2022 au Qatar et les histoires de gros sous qui ont pollué le Congrès de la Fifa au cours des dernières 48 heures à Sao Paulo. Bref, de donner des couleurs à la fête. Quel beau défi !