Face à une pétition, signée par de nombreux intellectuels, journalistes et artistes marocains, qui dénoncent tous la mainmise du PJD sur l'espace audiovisuel marocain et l'attitude moralisatrice du ministre pjdiste de la communication, Mustapha El Khalfi, ce dernier sort de son silence et répond à ses détracteurs. Pour comprendre cet imbroglio, il faut se poser une question simple. D'abord de quoi s'agit-il dans ce bras de fer entre El Khalfi et une certaine intelligentsia marocaine ? Il faut remonter au 14 mai dernier, lors de la séance des questions orales devant le Parlement, le ministre de la communication s'en est pris à certains médias et à la HACA (Haute autorité de la communication audiovisuelle). Certains médias diffusent des programmes qui choquent l'opinion publique. Et la HACA est accusée de laxisme et de ne pas remplir son rôle de régulateur du paysage audiovisuel marocain. Autrement dit, Mustapha El Khalfi veut quadriller certains programmes télévisuels, avoir un regard bien ciblé sur ce qui doit être diffusé ou non, alors que la HACA devrait, normalement et logiquement, avoir toute latitude pour observer ce rôle que les lois marocaines lui donnent. El Khalfi répond dans sa sortie du 27 mai 2014 qu'il est visé par certains et que ses propos ont été déviés de leur sens et que cela montre à quel point certaines parties «ne veulent pas que les réformes entreprises par le gouvernement aboutissent». À lire attentivement la réponse de M. El Khalfi, on se rend vite compte que cette littérature est devenue monnaie courante au Maroc. On règle des comptes, par presse interposée, on utilise les médias à des fins politiques, de part et d'autre et on oublie le fin mot de l'histoire. Il est vrai que la nouvelle Constitution donne un droit de regard au gouvernement sur le paysage médiatique national. Mais ce dernier a besoin de liberté, de visibilité pour que la créativité trouve sa place, loin de tous les clivages et les interdictions au nom d'une quelconque idéologie. C'est ce que l'on lit chez de nombreux «accusateurs» de M. El Khalfi. Les intellectuels marocains, artistes et journalistes confondus, ont peur d'un retour de manivelle de la part des islamistes pour museler leur liberté et leur besoin de s'exprimer en toute responsabilité et respect des lois de ce pays. Toute la gageure pour le Maroc est de réussir cette équation à deux inconnues. D'un côté, garantir les libertés fondamentales. De l'autre respecter l'Etat de droit. Toute idéologie rétrograde n'a pas droit de cité dans cette configuration.