C'est dans le secret le plus total que le secrétariat général du PJD (Parti de la justice et du développement) a tenu une réunion extraordinaire. En effet, la dernière rencontre a duré pratiquement trois jours au cours de laquelle le secrétaire général du parti et chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, a dû s'expliquer sur ses choix au sein de la majorité et surtout sa gestion des concertations avec le RNI (Rassemblement national des indépendants) ayant débouché sur la formation du cabinet Benkirane II. Officiellement, la réunion a été organisée pour préparer la prochaine session du conseil national du parti prévue les 27, 28 et 29 décembre. Mais cette tentative de cacher les vraies raisons de la réunion a été ratée pour la simple raison que les Pjdistes n'ont pas besoin d'une réunion de trois jours pour préparer un conseil national. Annoncée depuis plusieurs semaines déjà, la réunion marathonienne du chef de gouvernement avec les membres du secrétariat général de son parti était plutôt un face-à-face sans détours et un long moment de vérité entre les dirigeants d'un parti aux commandes de la majorité gouvernementale depuis déjà deux ans. Un communiqué du parti explique que le secrétaire général a ouvert les travaux de la réunion avec un mot consacré aux principes fondateurs du parti ainsi que le contexte actuel dans le monde arabe ainsi que les défis de la société marocaine. Bref, le discours typique d'un responsable cherchant à anticiper les critiques de certains membres du secrétariat général sur sa manière de gérer le parti et la majorité. D'ailleurs, le secrétaire général du parti de la lampe avait perdu son sang-froid face aux remarques de certains responsables de son parti au cours de la première réunion du secrétariat général qui a suivi le large remaniement du gouvernement. «A travers un dialogue démocratique, libre et responsable, les analyses des différents membres du secrétariat général convergeaient vers une appréciation positive de la gestion de la précédente période, et de considérer la formation d'une nouvelle majorité comme étant une grande réalisation politique», ajoute le communiqué. Si les mots du communiqué, soigneusement choisis, cachent les circonstances du débat, aucune phrase ou tournure ne pouvait cependant cacher les concessions faites par Benkirane qui a géré les affaires de son parti quasi exclusivement en compagnie de son homme de confiance et adjoint Abdellah Baha. Ainsi, le communiqué du parti précise que les orientations politiques générales de la prochaine étape ont été fixées d'une manière collégiale. «Après un long débat, la liste des grands chantiers pour la prochaine étape a été fixée», poursuit la même source. Autre point marqué par les opposants de Benkirane au sein du parti, la hausse de la fréquence des réunions du secrétariat général qui deviendront hebdomadaires après avoir été pendant un long moment, bimensuelles. L'aile dure du PJD s'est assurée ainsi d'avoir un droit de regard sur les décisions et les choix du chef de gouvernement plus fréquemment. Les faucons du parti ne vont probablement pas s'arrêter à ce niveau et vont essayer d'obtenir plus de concessions de la part de Abdelilah Benkirane. Ce dernier doit s'attendre à des moments difficiles au cours du prochain conseil national dont le président n'est autre que Saâd-Eddine El Othmani. Les sympathisants de l'ancien ministre des affaires étrangères n'ont pas encore digéré sa sortie par la petite porte du gouvernement au cours du dernier remaniement. Le conseil national du PJD sera sans nul doute sous haute voltige...