La stratégie de développement du secteur minier à l'horizon 2025 a pour objectifs de tripler le chiffre d'affaires en le portant à plus de 15 milliards de dirhams, de décupler l'investissement dans l'exploration et la recherche et surtout de doubler le nombre des emplois générés en le situant à 30.000. En énonçant cette feuille de route pour l'activité extractive vendredi dernier au cours d'une conférence de presse à Rabat, alors même qu'il est démissionnaire ainsi que ses collègues istiqlaliens, le ministre de l'énergie, des mines, de l'eau et de l'environnement a également livré un certain nombre de messages politiques. Le premier est que son état de partant n'influe en rien sur son sens du devoir. Le second est que la stratégie qui a été mise en route est le résultat d'une approche participative qui a fait la part belle à l'avis des opérateurs. De fait, il y avait aux côtés du ministre, prenant la parole à l'occasion pour préciser les idées - et de ce fait apportant la preuve de leur totale adhésion au nouveau projet-, les 2 plus grands opérateurs du secteur et Lhou Marbouh, le président de la Fédération des industries minérales (FDIM). Le message est on ne peut plus clair : la stratégie qui a été présentée vendredi à la presse, 2 jours seulement après l'avoir été en Conseil de gouvernement, procède de la volonté affirmée de tous les intervenants. Elle part donc créditée des meilleures chances de s'inscrire dans la durée. Et c'est si bien le sentiment de Fouad Douiri qu'il a mis en place «un Project management office (PMO) avec des instances de gouvernance associées et les personnes responsabilisées pour le pilotage des différents chantiers». Et parce que la conjoncture est versatile et qu'il faut battre le fer pendant qu'il est chaud, le ministre a déjà tracé un nouveau cadre légal pour sa feuille de route : un nouveau code minier, plus incitatif et plus moderne que celui qui a été édicté voici un demi-siècle. «Le projet est au Secrétariat général du gouvernement et il sera probablement débattu au Parlement au cours de la prochaine rentrée parlementaire», assure-t-il. Pour Lhou Marbouh, il est en effet inconcevable qu'un code élaboré en 1951 soit toujours en vigueur aujourd'hui, «Plus, dira-t-il avec émotion, c'est dans ce ministère qu'a été élaboré le code minier d'un pays ami ; alors, est-il concevable qu'on ne fasse pas pour nous-mêmes ce que nous avons fait pour les autres ?». Deuxième donne : l'assainissement du patrimoine. Le ministère n'est pas peu fier d'avoir annulé 632 titres miniers depuis le 3ème trimestre de l'année dernière, cela limite grandement les pratiques malsaines telles que la spéculation. Puis vient la formation dont on espère l'amélioration grâce à la coopération avec les grandes écoles, la mise en place d'un plan de développement pluriannuel visant la redynamisation du plan national de cartographie géologique et… la fiscalité. Et, sur ce point, force est de constater que le président de la FDIM a été convaincant. Si entreprendre inclut la notion de risque, a-t-il dit, dans le domaine minier le seul fait de chercher à entreprendre, le seul acte d'explorer est un risque. Très coûteuse en temps et en argent – on parle de millions de dirhams et d'une moyenne de 7 ans-, l'exploration n'aboutit souvent qu'une fois sur dix. Cela ne l'empêche pas de payer dès le départ son écot fiscal plein tarif. «Pourquoi est-ce nous et nous seulement qui acquittons des pleins droits alors que l'entreprise est encore tout à fait aléatoire?» s'interroge la FDIM qui met en avant le principe de l'équité sociale. Mais Lhou Marbouh va plus loin et pose carrément la question de l'allongement de la vie du filon par le biais de la recherche-développement qui crée des opportunités marginales d'extraction. La provision pour reconstitution du gisement ne devrait pas supporter d'impôt, selon la fédération qui, en définitive, en assimile l'objet à celui d'un provisionnement pour risques naturels. Mais au fait, pourquoi se mettre en quatre pour rafraîchir les mines ? D'abord parce qu'elles constituent un élément d'équilibre du commerce extérieur au moment où la balance pèse lourd sur les finances publiques. Et surtout, parce que la mine est parfois la seule source de revenus dans les montagnes où l'élevage et l'agriculture peinent à prendre pied. Le ministre comme le président de la FDIM le diront sans ambages : la mine est un facteur d'équilibre entre les régions. A l'heure où la régionalisation avancée séduit de plus en plus, l'argument porte. Comme porte celui que véhicule la perspective d'exploiter les schistes bitumineux de Timahdit et de Tarfaya. Répondant à une question d'ALM, Fouad Douiri a estimé ce pactole à 50 milliards de barils, «c'est le 6ème au monde». Et le ministre, qui espère que l'exploitation des roches à huile pétrolifère sera de mise un jour proche, rassure: l'environnement sera sauf de toute atteinte. D'une part parce que les roches à huile ne sont pas les roches à gaz dont la récupération du pétrole nécessite la fameuse fracturation hydraulique qui empoisonne les nappes phréatiques et pollue l'environnement. Ensuite, parce que le ministère de l'environnement veille. Des paroles qui ont des résonnances prémonitoires au moment où on laisse entendre que des gisements de roches à gaz ont été découverts dans certaines zones comme l'Oriental.