Ça bouillonne dans les rues. Le Ramadan est là avec son lot de remue-ménage. Les horaires de travail changent, les modes alimentaires sont bousculés et c'est tout le rythme de vie et le quotidien des Marocains qui en prend un coup. Forcément les habitudes d'achat se transforment pour laisser place à une fièvre acheteuse axée principalement sur l'alimentaire. C'est ainsi que les prix fluctuent et atteignent des pics. «Il y a trois mois que les prix de la plupart des produits alimentaires ont commencé à grimper, notamment ceux des condiments. Mais, c'est le poisson qui a atteint son pic en ce début de Ramadan», explique à ALM Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC). Un constat qui, selon lui, est le fruit d'un sérieux problème de distribution. «L'offre en poisson est plus que suffisante, mais le problème reste dans la distribution. La multitude d'intermédiaires entre le pêcheur et le consommateur final fait en sorte que le prix de vente flambe en chemin. De plus, la loi 06-99 pour la protection du consommateur n'intervient que pour l'affichage des prix et non pour leur régulation. Ainsi, les commerçants peuvent afficher le prix qui leur chante du moment que le prix est affiché et aucune autorité n'a le droit de contester sa valeur», souligne M. Kherrati. Pour leur part, les consommateurs ne sont pas exempts de responsabilité dans cet état des lieux. Leur fièvre acheteuse laisse libre cours aux commerçants de mauvaise foi de jongler avec les prix de leur choix. «Les consommateurs ne comptent plus lorsqu'il s'agit de manger au cours du mois de Ramadan, alors que le principe est tout le contraire. L'esprit de ce mois sacré veut que les gens régulent et modèrent leur consommation. Cela a une incidence directe sur la promotion de l'informel. Aussi, 60% des produits du marché sont vendus dans les circuits informels et échappent aux contrôles de qualité et c'est le consommateur qui en pâtit. C'est donc un cercle vicieux que seul le consommateur peut rompre», précise M. Kherrati. S'agissant de l'offre, les indicateurs sont au vert et le marché ne manque de rien. «Nous avons eu droit cette année à une très bonne campagne agricole, de plus le Plan Maroc Vert commence à donner d'excellents résultats, doublé d'une bonne gestion des ressources maritimes et de l'import. Le seul problème qui demeure est celui de la distribution et de l'emballement soudain pour les produits alimentaires», souligne M. Kherrati. Ainsi, non seulement les commerçants sont en tort, mais les consommateurs également. Dans ce sens, M. Kherrati appelle les consommateurs à «ne pas s'affoler. L'offre du marché est largement suffisante pour éviter toute pénurie». Pour lui, le Marocain est un grand «gaspilleur». «Les Marocains achètent généralement bien plus que ce dont ils ont besoin. Résultat: 30% des denrées alimentaires encore promptes à la consommation sont jetées. Cela donne de la farine subventionnée dans les poubelles avec tout le pain jeté et du sucre subventionné dans les leviers de vaisselle avec le thé vidé, pour ne citer que ceux-là. Aussi, avec une meilleure gestion de nos achats nous pourrions gagner de quoi nourrir un autre peuple», conclut M. Kherrati.