L'eau de javel figure parmi les produits ménagers les plus utilisés au Maroc. Ce produit d'entretien obéit à des normes de commercialisation bien codifiées et a subi depuis plusieurs années certaines transformations (élimination du bichromate de potassium) dans l'intention de réduire ses risques sur la santé. En dépit de ces mesures, un important circuit informel s'est développé avec la commercialisation de l'eau de javel ambulatoire. Le Centre antipoison et de pharmacovigilance du Maroc (CAPM) alerte les consommateurs sur les risques élevés de ce produit toxique. Au cours de l'année 2012, le Centre a recensé 293 cas d'intoxications par l'eau de javel dont 45 cas étaient dus à l'eau de javel ambulatoire. L'intoxication à l'eau de javel se produit le plus souvent de façon accidentelle et concerne particulièrement l'enfant de moins de 5 ans, ce qui dénote une négligence de la part des parents. Son ingestion entraîne des lésions légères ou graves, à type de stomatite, oedème labial et pharyngé, hypersialorhée, dysphagie, douleurs rétrosternales et abdominales avec possibilité de troubles de conscience puis un état de choc qui peut mettre en jeu le pronostic vital. Des complications plus graves peuvent être observées telles que la perforation digestive. Des séquelles handicapantes peuvent être engendrées comme des sténoses oesogastriques, ce qui a pour conséquence une prise en charge lourde et coûteuse. Ainsi, l'ingestion d'eau de javel provoque un état d'urgence médicale qui nécessite une prise en charge multidisciplinaire. A noter que ce produit dangereux est extrêmement accessible. Il est vendu par terre ou par des vendeurs ambulants qui utilisent souvent des haut- parleurs pour écouler le produit sur le marché. Dans son alerte, le CAPM souligne qu'il s'agit d'une «eau de javel bricolée de façon artisanale et vendue au litre dans des bidons ou des contenants alimentaires à petit prix. Elle a une composition variable, mais il s'agit en général d'un mélange d'hypochlorite de sodium et de soude ou de potasse, classées comme caustiques forts». Face au danger que présente l'eau de javel vendue en ambulatoire, le CAPM recommande aux consommateurs d'éviter formellement son usage et incite les autorités compétentes à lutter contre le marché informel de ce produit. Rappelons que dans la revue de «Toxicologie Maroc» du CAPM du 3ème trimestre 2011 consacrée aux intoxications par les produits ménagers, l'eau de javel a été placée en tête des produits incriminés avec 65,1% des cas, suivie des déboucheurs de canalisation (23,2% des cas). Dans 76,1% des cas, l'exposition était accidentelle et volontaire dans 23,9% des cas. Ces produits peuvent entraîner des cas d'intoxication mortelle. L'étude précise à ce sujet que l'eau de javel concentrée a été à l'origine de 5 décès. Les intoxications par ces produits sont de provenance urbaine dans 91,5 % des cas et sont survenues à domicile dans 96,8% des cas.