La réforme de la loi 10-94 relative à l'exercice de la médecine est de nouveau au devant de la scène, c'est un dossier épineux, un véritable casse tête dont le département de Yasmina Badou ne mesure peut être pas encore à sa juste valeur tous les problèmes, inconvénients et retombées négatives qui le caractérise. Tous les médecins sont unanimes pour dire que la réforme de la loi 10/94 est une véritable bombe à retardement, c'est en grande partie ce qui justifie tous les remous perceptibles aujourd'hui au sein de la profession médicale. De quoi s'agit –il ? Pourquoi tant de craintes ? Que faut-il en déduire ? Les explications Le projet de reforme de la loi 10/94 relative à l'exercice de la profession médicale au Maroc, que le département de Yasmina Badou entend mener à terme vise entre autre à ouvrir le capital santé aux non médecins, ce qui veut dire permettre aux multinationales et aux capitaux étrangers d'investir dans le secteur de la santé, en d'autres termes c'est permettre à des non médecins de pouvoir devenir propriétaires de cliniques. Ce projet apporte aussi une nouveauté inédite, celle de faire du médecin un salarié médical, et cerise sur le gâteau le projet de réforme de la loi 10/94 permettra l'exercice de la médecine au Maroc pour les médecins étrangers. Le projet de réforme de la loi relative à l'exercice de la médecine au Maroc, qui s'articule autour de l'ouverture éventuelle des capitaux privés dans l'investissement santé, peut à première vue et en toute bonne logique séduire, tant il est vrai que celui-ci peut être synonyme de confort, d'établissements haut standing, d'accueil, d'hôtellerie haut de gamme, de services personnalisés. Mais qu'en est-il des prestations médicales ? Ouvrir le capital santé à des multinationales, à des investisseurs privés, c'est à l'évidence ouvrir la porte à une médecine à plusieurs vitesses, c'est permettre à ceux qui ont des moyens de pouvoir très bien être soignés et a ceux qui sont pauvres de se contenter d'une médecine au rabais . C'est se mettre en total contradiction avec le droit à la santé. C'est ce que nous dénonçons, c'est ce que nous ne pouvons accepter, c'est contraire aux principes fondamentaux des droits de l'Homme. Pour le ministère de la santé, la refonte du cadre législatif s'impose en raison de l'évolution de la pratique médicale , la médecine évolue à très grande vitesse , nous devons nous adapter ou nous serons aculés à régresser, c'est pourquoi cette reforme est indispensable. Celle-ci ne pouvait être envisagée sans une refonte de la législation relative à l'exercice de la profession, justifie Mme Baddou. Une commission de réflexion constituée pour plancher sur cette question a donc élaboré un projet de réforme dont les grandes lignes ont été remises, courant mars 2009, aux praticiens du secteur libéral qui disposaient d'un mois pour donner leurs avis. A cet effet un Forum National de réflexion s'est tenu le 25 Avril 2009 à Casablanca avec comme thème : «La médecine libérale face à la globalisation.» Cette rencontre organisée par le collège syndical national des Médecins Spécialistes Privés, a connu la participation de Yasmina Badou ministre de la santé, du président du CNOM, du président de la S.M.S.M , l'ANCP, l'ANAM, l'AMIP, le ministère des finances…, avait connu des interventions très remarquées de médecins qui n'ont pas manqué de critiquer cette reforme . La réforme proposée par le ministère est basée sur trois éléments fondamentaux: adapter la loi 10-94 aux mutations du système de santé, tenir compte de l'évolution de l'environnement international et rendre le système plus attractif pour l'investissement privé, qu'il soit national ou étranger. Partant, le projet prévoit, entre autres, deux grandes mesures : la libéralisation de l'investissement dans le domaine médical et l'ouverture des frontières aux praticiens étrangers . le projet de réforme stipule que la clinique privée peut appartenir soit à une personne physique à condition qu'elle soit médecin , c'est ce qui existe de nos jours puisque les propriétaires des établissements hospitaliers privés sont tous des médecins . Avec le projet de réforme de la loi 10/94, le propriétaire peut aussi être soit, une société de droit marocain, quel que soit son type, ou toute autre personne morale de droit privé poursuivant un but non lucratif. Il est évident qu'un tel changement que l'on peut assimiler à un cyclone, une déferlante à de quoi inquiéter, de quoi laisser perplexe. Que craignent les médecins ? On comprend amplement les craintes des médecins, car si demain ce projet de réforme aboutit, l'investissement dans le secteur médical sera donc accessible à des groupements financiers (banques et assurances) et tout autre investisseur privé habilité, de par cette loi, à en assurer la gestion et en y employant des médecins comme de simples salariés. Qui saura gérer une telle mutation, et comment ? Un établissement hospitalier, qu'il soit public ou privé est tout d'abord un lieu de vie, un espace ou évoluent des femmes et des hommes qui sont mobilisés 24/24 heures, 7 jours sur 7, les week-end et les jours fériés, au chevet des malades pour maintenir la dimension humaine, pour soulager, soutenir, soigner des personnes diminuées psychologiquement et physiquement. Dans ces structures cohabitent les grandes questions éthiques, déontologiques, la souffrance et parfois la mort. Cet aspect profondément humain, un investisseur ne peut le comprendre, ne peut se l'approprier, car son approche, ses objectifs obéissent à d'autres considérations. Vouloir donc appliquer aux cliniques ou aux hôpitaux les mêmes principes et les mêmes critères de gestion que ceux des entreprises grâce à une refonte de la loi 10/94 , remettrait inévitablement en cause l'égalité dans l'accès aux soins , donc un des droits fondamentaux dans notre société. Pour plus de détails nous reproduisons ci-dessous le communiqué du Collège Syndical National des Médecins Spécialistes Privés