La cascade des indices négatifs ne cesse de fouetter les bourses des ménages espagnols. Le dernier en date est apporté par l'Institut espagnol de la statistique (INE) qui fait état de la hausse de l'Indice des Prix à la Consommation (IPC) de 0,7% en mars dernier pour porter le taux interannuel de l'inflation à 3,6%. Ce chiffre est largement supérieur aux prévisions du gouvernement de croissance du Produit Intérieur Brut de prés de 1,3% en 2011. Les augmentations des salaires, conformément aux conventions collectives, seront beaucoup inférieures à l'IPC. L'IPC est le seul baromètre que tous les consommateurs savent lire et interpréter parfaitement puisque les chiffres et données qu'il apporte sont traduites en euros. Il est aussi synonyme du coût de la vie avec ses différentes variables relatives aux factures de consommation du gaz, de l'électricité, de l'eau, du carburant et du panier de consommation sur lequel est basé le calcul des prix des produits de base. Le renchérissement de plusieurs produits est la cause de la flambée des prix en mars des principaux produits de consommation. A titre d'exemple, les carburants ont augmenté par rapport au mois de février de 20,3%, les produits alimentaires non manufacturés de 12,8%, l'alcool et tabac de 14,7%, le transport de 9,8%. Ce sont des produits qui interviennent de manière décisive dans la gestion du budget des ménages. D'autant plus, la décision annoncée la semaine dernière par la Banque Centrale Européenne (BCE) de porter l'indice de référence pour les prêts hypothécaires, l'Euribor, à 1,25% a été accueillie comme un coup de massue par les millions de ménages endettés. Ceci intervient en une année où le patronat et les syndicats sont convenus, après de dures négociations, à des augmentations de salaires des travailleurs de 1,66%, soit deux points inférieur à l'IPC (3.6% jusqu'à mars) et au moment où plus de 4,3 millions de chômeurs sont en quête d'un nouvel emploi. D'autant plus, le salaire moyen en Espagne, qui s'élève à 23.000 euros bruts/an sont inférieurs à la moyenne européenne qui est de 35.000 euros bruts/an, une différence qui se traduit en fin de compte en termes de qualité de vie. Dans son rapport de conjoncture, rendu public mardi, l'Organisation pour la Coopération et le développement économique (OCDE) observe que les Espagnols consacrent 19% de leur temps au travail dans des activités rémunérées (contre 16% pour les Allemands) pour pouvoir subvenir à leurs besoins. De même, les dépenses fixes représentent 80% de leurs gains, ce qui les oblige à recourir à l'emprunt, à des taux souvent exorbitants, pour joindre les deux bouts du mois ou faire face à des dépenses imprévisibles. En dehors des banques, il existe en Espagne des cabinets privés de crédit express dont les taux peuvent aller au-delà de 20%. Face à ce panorama d'incertitude et d'anxiété, José Luis Rodriguez Zapatero, président du gouvernement espagnol, a lancé, mercredi à partir de Pékin où il a rencontré des investisseurs chinois, un message d'apaisement assurant qu'il n'y aura pas dans l'immédiat de nouvelles mesures de restructuration économique. L'Espagne a fait « ses devoirs » en appliquant des mesures d'ordre fiscal en vue de réduire le déficit public et renforcer le fonds de confiance auprès des opérateurs étrangers. Néanmoins, il a mis en garde que l'Espagne est appelée à la mise en pratique de toutes les réformes approuvées dans le cadre de l'Union Européenne en vue de « gagner de la compétitivité ». Il a également annoncé l'approbation par le conseil des ministres, vendredi prochain, du plan de lutte contre l'économie souterraine. L'Espagne doit, toutefois, appliquer à tout prix son plan d'austérité, renforcer les exportations et attirer les investissements extérieurs, a-t-il ajouté. D'ailleurs, l'objectif de son voyage à Pékin est d'inviter les entrepreneurs chinois à investir en Espagne dans les secteurs d'infrastructures, des travaux publics, la gestion des aéroports et dans le secteur bancaire espagnol récemment privatisés. Appuyant l'optimisme manifesté par Zapatero en présence des opérateurs chinois, le premier vice-président du gouvernement et ministre de l'intérieur, Alfredo Pérez Rubalcaba, a fait de même durant la séance hebdomadaire du contrôle du gouvernement au Congrès des Députés, en assurant mercredi que l'Espagne est en mesure de « sortir cette année de la crise ». Face aux prédications du gouvernement, le consommateur continue avec une patience stoïcienne la lecture des chiffres contenus dans les dernières factures du gaz, de l'électricité et de l'eau, que viennent de déposer le facteur dans sa boîte postale.