Le trésorier général du royaume, Noureddine Bensouda a été l'invité du forum des adhérents de la Chambre Française de Commerce et d'Industrie du Maroc pour animer une conférence sous le thème «La stratégie de l'investissement public et l'efficience des marchés publics» à Casablanca, le 24 mars 2011. Cette conférence intervient dans un contexte de nouvelles réformes du décret relatif aux marchés publics. Devant un parterre de personnalités étrangères et marocaines, M. Bensouda, a fait un rappel de l'évolution historique de la réglementation des marchés publics (d'avant le protectorat jusqu'à 2011) en mettant en exergue les principales réformes (transparence, concurrence et accès à la commande publique). Présentant l'évolution des investissements publics notamment ceux prévus par le budget de l'Etat, M. Bensouda a souligné les cinq grandes périodes qui ont marqué la stratégie de l'investissement au Maroc, à savoir : l'augmentation substantielle (1973 à 1977) ; la forte réduction (1978 à 1982); l'évolution en dents de scie (1983 à 1992) ; la stabilisation au même niveau (1993 à 1998) et la politique budgétaire volontariste (1999 à 2010) Après avoir loué la démarche participative et la concertation des différents acteurs (société civile, fédérations, acheteurs publics, commission des marchés,…), il a souligné les principales innovations du projet de décret relatif aux marchés publics. Ce dernier, précisait le Trésorier du royaume, constitue une réforme complète assurant au citoyen, un service public de qualité, à l'opérateur économique une égalité de traitement des concurrents; à l'acheteur public, une meilleure programmation et exécution des dépenses publiques et, aux organisations internationales une convergence avec les normes internationales. Ci-après un extrait de l'intervention de M. Bensouda. Abrogation du Dahir du 9 juin 1917 Sous le protectorat, les premières règles consacrées aux marchés publics faisaient partie intégrante du règlement de la comptabilité publique institué par le Dahir du 9 juin 1917. Ce Dahir a introduit pour la première fois, les principes de concurrence et de publicité dans la conclusion des marchés de travaux, de fournitures et de transport pour le compte de l'Etat. Il a également précisé les modes de passation des marchés publics et les modalités de leur règlement. Après l'indépendance, l'ensemble du dispositif juridique régissant l'organisation financière du Maroc va être adapté progressivement à la réalité nationale à travers notamment, l'adoption des textes relatifs à la comptabilité publique (Dahir du 6 août 1958); à la Banque du Maroc (Dahir du 30 juin 1959); à la Caisse de Dépôts et de Gestion (Dahir du 10 février 1959) ; au contrôle financier de l'Etat (Dahir du 14 avril 1960); à la commission Nationale des Comptes, actuelle Cour des Comptes (Dahir du 14 avril 1960); à la constitution (14 décembre 1962) et la loi organique des finances (9 novembre 1963). Ainsi, sera abrogé le Dahir du 19 juin 1917 portant règlement sur la comptabilité publique et remplacé par le Dahir du 6 août 1958 portant règlement sur la comptabilité publique du Royaume, consacrant de la sorte, la première réforme des règles régissant les marchés publics du Maroc indépendant. La réforme de 1965 et 1976 Après une dizaine d'années d'indépendance, les règles de gestion des marchés publics ont connu une double rupture, dans la mesure où elles seront : - individualisées dans un texte spécifique par rapport à celles régissant la comptabilité publique, contrairement à ce qui prévalait auparavant ; - édictées au même titre que le règlement général de comptabilité publique, par un texte d'ordre réglementaire et non législatif. - Politiquement, le Maroc vivait sous l'égide de la première constitution de 1962 et de l'état d'exception déclaré suite aux mouvements sociaux ayant marqué cette époque ; - Economiquement, l'Etat avait mis en place des plans de stabilisation : le plan triennal 1965-1967 et le plan quinquennal 1968-1972. Durant la décennie 1970, l'augmentation des prix des matières premières, notamment les phosphates, a généré des recettes additionnelles substantielles pour le budget de l'Etat, amenant ainsi les pouvoirs publics à augmenter d'autant le trend de réalisation des investissements publics, Les réformes de 1998 et de 2007 Les deux réformes des marchés publics ont été adoptées respectivement par le décret du 30 décembre 1998 et par le décret du 5 février 2007, avec une forte implication du secteur privé. Elles ont été inspirées des normes et standards internationaux notamment ceux de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC); de la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International (CNUDCI); de l'Organisation pour le Commerce et le Développement Economique (OCDE). Elles ont également pris en considération les engagements internationaux du Maroc, pris dans le cadre de l'accord d'association avec l'union européenne de 1996 et de l'accord de libre échange conclu en 2005 avec les Etats-Unis d'Amérique. Il y a lieu de rappeler que la réforme de 1998 s'inscrivait dans un contexte marqué par la consécration et le renforcement de l'Etat de droit notamment, suite à l'alternance politique, avec la formation du Gouvernement de Abderrahmane El Youssoufi. Elle vient également, consolider la refonte du dispositif juridique régissant les finances publiques notamment, la loi organique des finances adoptée durant la même année. Les principaux apports de ces deux réformes consistent en : la consécration des principes de concurrence, de transparence et d'efficacité de la commande publique ; de la moralisation de la gestion des marchés publics; du développement des garanties accordées aux entreprises concurrentes; du renforcement des recours en matière de litiges; et de l'enclenchement d'un processus irréversible de dématérialisation de la commande publique. La réforme de 2007 procède quant à elle, de la volonté d'adaptation du domaine des marchés publics aux mutations que le rôle de l'Etat a connues, avec le désengagement progressif d'un certain nombre de secteurs et l'accélération du processus de privatisation et d'externalisation de certaines prestations. Elle vient enfin, compléter les réformes ayant affecté l'environnement des affaires notamment, le droit des sociétés, la réforme bancaire, la réforme fiscale et le code de commerce. Projet en cours de finalisation Le projet de décret, en cours de finalisation au niveau de la commission des marchés2 relevant du Secrétariat Général du Gouvernement, marque un saut qualitatif en matière de réglementation des marchés publics. Il s'articule en outre, avec les chantiers de modernisation engagés par le gouvernement en matière de: consolidation de la bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques; clarification et de simplification des procédures; transparence dans la passation et l'exécution des marchés publics. Le portail des marchés de l'Etat, géré par la Trésorerie Générale du Royaume, a été consacré comme portail unique, national et fédérateur de l'ensemble de la commande publique, en vue d'unifier les canaux d'information des concurrents en recherche d'opportunités d'affaires dans le domaine des marchés publics, indépendamment de l'organisme acheteur.