Pour faire parler de soi, rien de tel qu'une bonne polémique. David Damour, qui se présente comme un chef d'entreprise, l'a bien compris pour promouvoir un logiciel espion. Nom du site : surveillermonsalarie.com. "Je m'attends à avoir des problèmes", reconnaît David Damour au Post.fr. "Les organismes de syndicats ou des salariés pourraient nous attaquer." Le principe du logiciel est simple : grâce à un mouchard installé sur votre ordinateur, votre patron est au courant de toute votre activité informatique et numérique. "Une capture d'écran est effectuée toutes les secondes", promet le site internet du produit. Et chaque jour, l'employeur reçoit un mail détaillant votre activité. Objectif : limiter les activités perso pour augmenter la productivité. Le logiciel est vendu 790 euros hors taxe. Soit 944,84 euros TTC comme le montre notre bon de commande (reste à payer pour recevoir le logiciel, ce que nous ne ferons pas) : On ne vous cache pas qu'on a trouvé ça tellement énorme qu'on a cru à une opération de marketing viral... "Ce n'est pas une blague", assure David Damour au Post. Pour autant, est-ce légal ? 1. Une avocate en droit du travail sceptique Contactée par Le Post, Me Alvarez de Selding explique que la surveillance d'un salarié est légale mais sous conditions : "Le salarié doit être prévenu que son ordinateur est sous surveillance". Et la société doit le déclarer à la Cnil. "En général, les salariés ont le droit à des moments de conversations téléphoniques ou des emails privés, tant que ça ne les empêche pas d'accomplir leurs tâches", répond l'avocate spécialisée dans le droit du travail, qui se montre sceptique face au logiciel espion... "Le Code du Travail dit que toutes les atteintes aux libertés individuelles et collectives doivent être proportionnées au but recherché. Il y a toutes les chances que ce soit disproportionné." Les poursuites judiciaires, David Damour s'y attend. "On se défendra !", lance-t-il au Post.fr. "La polémique, c'était le but recherché. Nous avons préparé notre ligne de défense." Et l'entrepreneur de claironner que la Cnil, la Commission de l'informatique et des libertés aurait jugé le logiciel "légal". 2. La Cnil pose des limites Contactée par Le Post, la Cnil n'est pourtant pas en mesure de confirmer la légalité du logiciel [Ajout le 5/10 : La Cnil a répondu à nos questions ici]. Tout juste peut-on lire sur le site de la Cnil des informations relatives à notre sujet. - votre boss peut consulter les mails reçus ou envoyés depuis votre poste de travail car ils ont, selon la Cnil, "un caractère professionnel". - votre boss peut consulter "tout fichier créé, envoyé ou reçu depuis le poste de travail mis à disposition par l'employeur", explique la Cnil, puisque ces fichiers ont eux aussi " un caractère professionnel". Exception : la mention "personnel" sur un mail ou un dossier équivaut à un sens interdit pour votre employeur. 3. Et d'un point de vue éthique, tout va bien ? Contacté par Le Post, David Damour assure n'avoir "aucun problème" quand il se regarde dans la glace. Son concept est quand même une porte ouverte à la curiosité mal placée puisque l'employeur recevra les captures d'écran de l'activité des salariés - y compris des correspondances privées autorisées pendant les pauses. "L'employeur et le salarié peuvent convenir de temps de pause. Sur les captures d'écran, il y aura indiqué la date et l'heure, donc l'employeur ne doit pas les regarder si cela correspond à une pause", rétorque David Damour. Reste à savoir si en pratique, l'employeur prendra vraiment ces précautions.