Le climat social est tendu. C'est sous cet auspice que semble s'inscrire la rentrée sociale et les partenaires sociaux ont tenu à le faire savoir en annonçant une série de grèves en signe de protestation à ce qu'ils considèrent comme l'absence de réaction positive à l'égard de leurs revendications légitimes. Premier secteur et non des moindres : la justice. Les fonctionnaires de la justice et les greffiers sont en colère. Leurs mouvements de débrayage sont programmés de manière à rendre évident leur mouvement de protestation. Le caractère recurrent de ces débrayages aura pour effet direct une sorte de paralysie de la machine judiciaire au niveau des différents tribunaux du Royaume. Ils devraient provoquer d'innombrables désagréments pour les justiciables. Dans le secteur de l'enseignement, des grèves ont ponctué la rentrée scolaire dans certaines régions à cause des problèmes soulevés à propos des affectations aux zones éloignées ainsi que les problèmes soulevés par la gestion de certaines délégations et académies du ministère. Cet état de fait aura certainement des répercussions négatives sur le bon démarrage de la rentrée scolaire, lancée cette année sous le slogan «nouveau contrat avec l'école». Dans les autres domaines, la situation n'est pas reluisante, affirme Hamid Chabat, secrétaire général de l'Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM). Elle est pratiquement catastrophique, a-t-il tenu à souligner. Le gouvernement est appelé à mettre en place une méthodologie opérationnelle pour entamer le dialogue social et aborder les dossiers en suspens, a-t-il ajouté. «Nous attendons la réaction et l'initiative du gouvernement», a-t-il conclu. Le son de cloche est le même du côté de l'Union marocaine du travail (UMT). Miloudi Moukharik, responsable national à l'UMT, affirme, selon les statistiques du ministère de l'Emploi, que 63 % des débrayages dans différents secteurs sont provoqués par les violations des lois en vigueur, le déficit en matière de dialogue et le refus catégorique d'améliorer la situation des salariés. C'est ce qui est à l'origine de ce «climat tendu» dans plusieurs secteurs d'activité. Du côté du syndicat national de la justice, relevant de la Confédération démocratique du travail (CDT), ayant appelé à une grève nationale dans le secteur de la justice les 15, 16, 21, 22 et 23 septembre, les résultats du dialogue social sont loin de répondre aux revendications du personnel du secteur. «Après avoir examiné les résultats du dialogue social qui s'est avéré être une voie sans issue», le syndicat, précise un communiqué rendu public à l'occasion, «estime que le projet de réforme de la justice stagne toujours depuis plus d'une année après le Discours royal du 20 août». Le syndicat appelle, notamment, à la promulgation d'un statut de la magistrature immunisé et incitatif et l'adoption de la promotion exceptionnelle pour l'ensemble des fonctionnaires qui remplissent les conditions requises, ajoute le communiqué. Un accord-cadre a été signé en 2006 entre les représentants syndicaux de cette catégorie de fonctionnaires de l'appareil judiciaire et le ministère de tutelle. La mise en œuvre des clauses de l'accord en question devrait se faire la même année. Mais en vain. Aujourd'hui, ces chevilles ouvrières de l'appareil, garantes des procédures judiciaires, se réfèrent au discours du Roi pour faire entendre leur cahier revendicatif. Les réactions enregistrées au niveau des autres centrales syndicales abondent dans le même sens. Mais ce qui reste posé est la question de savoir pourquoi le mécanisme du dialogue social ne fonctionne pas. Les variables de cette équation ne semblent pas être forgées dans la logique du dialogue et de la concertation, chacun lève la barre le plus haut possible et le citoyen et ses intérêts se retrouvent au milieu d'un concert de monologue sans cohérence apparente. C'est en définitive une panne endémique du dialogue social qui met en difficulté un gouvernement qui arbore le social comme un terrain de prédilection à son action.