Nabil El Bousaadi L'Inde et la Chine qui se disputent encore aujourd'hui près de 3.500 kilomètres de frontières dans l'Himalaya, sur le toit du monde, ont vu leurs soldats s'opposer, ce 9 décembre, à coups de bâtons, dans l'Arunachal Pradesh, dans le secteur Tawang près du Bouthan, une région revendiquée par Pékin au motif qu'elle ferait partie intégrante du Tibet. Ainsi, des soldats chinois de l'Armée populaire de libération seraient entrés, de nuit, en territoire indien, après avoir franchi la « ligne de contrôle effectif », un tracé de frontière assez flou que les deux voisins sont tenus de respecter. Pour rappel, la guerre qui, en 1962, avait opposé les deux pays, s'était soldée par l'annexion, par la Chine, de près de la moitié de la province indienne du Ladakh ; ce qui lui avait permis de disposer d'une voie terrestre entre le Tibet et la région chinoise du Xinjiang. Mais, le fait que cette « Ligne de contrôle effectif », (Line of actual Control – L.A.C.), une ligne de démarcation, longue de 872 kilomètres et se trouvant à plus de 4.000 mètres d'altitude, n'ait « jamais fait l'objet d'un accord » et qu'elle n'ait « jamais été tracée clairement sur une carte, ni délimitée sur le terrain » donne naissance, de temps à autre, à des « accrochages » plus ou moins violents. Ainsi, quand en Avril 2020, l'armée populaire de libération chinoise, avait décidé d'installer de nouveaux campements dans la zone tampon théoriquement interdite d'accès aux deux pays et ce, en réaction, dira-t-elle, aux chantiers d'infrastructures qu'entreprenait New Delhi, dans cette région pour l'édification d'une route, d'un pont et d'un aérodrome, les soldats des deux bords avaient fini par se livrer, le 5 mai suivant, à un combat, à mains nues, avec lancer de pierres, au bord du lac Pangong. Quelques semaines plus tard, le 15 juin, une nouvelle escarmouche eût lieu, un peu plus au nord, dans la rivière Galwan. Or, bien que cette fois-ci, il n'y eût aucun tir d'arme à feu, les combats au corps-à-corps engagés entre les soldats des deux camps s'étaient achevés par la mort de 20 soldats indiens alors que les autorités chinoises n'avaient jamais communiqué leurs pertes. Il s'agissait, ce jour-là, pour le journal indien « The Wire », de « la première effusion de sang dans la région en quarante-cinq ans ». Si donc, cette fois-ci, ce sont une vingtaine d'hommes qui auraient été blessés du côté indien, on ignore encore ce qu'il en est du côté chinois car les soldats chinois se seraient immédiatement retirés de la zone. Mais bien que, pour ne point jeter de l'huile sur le feu, le porte-parole de la diplomatie chinoise Wang Wenbin, ait déclaré que « la situation à la frontière entre la Chine et l'Inde est stable dans l'ensemble » et que les deux parties « maintiennent un dialogue sans entrave sur la question frontalière par les voies diplomatiques et militaires », le ministre indien de la Défense, Rajinath Singh, est d'un autre avis puisqu'il a dénoncé une nouvelle provocation chinoise visant à modifier le rapport de force dans cette partie du monde du moment que, ce jour-là, les troupes chinoises avaient « tenté de modifier unilatéralement le statu quo en empiétant sur la Ligne de contrôle effectif ». Mais en étant le premier incident sérieux connu depuis l'affrontement mortel de juin 2020, cette nouvelle tentative des soldats chinois de pénétrer en territoire indien, constituerait-elle le signe avant-coureur d'une nouvelle poussée des tensions entre Pékin et New Delhi ?