Bourita : « le Sahara, l'unité du Maroc et son intégrité territoriale n'ont jamais été objets d'ententes et de compromis »    La République de l'Equateur décide de suspendre sa reconnaissance de la pseudo « rasd »    Visite d'Emmanuel Macron au Maroc : un programme dense à la hauteur des relations entre Rabat et Paris    Maroc : les établissements publics comptent investir près de 138 MMDH en 2025    L'ONHYM et l'ONEE signent un contrat pour le transport de gaz naturel via le Gazoduc Maghreb Europe    Maroc: Le FMI dévoile ses prévisions de croissance pour 2024 et 2025    La CGEM va à la rencontre des opérateurs marocains installés au Canada    BANK OF AFRICA lance le programme « Capacity Impact » pour promouvoir la durabilité et l'innovation    Transport et logistique. L'Afrique s'unit pour une connectivité accrue    Conférence mondiale sur l'IA et l'application de la CIAC: Inspiré par la vision Royale, le Maroc engagé pour la gouvernance des nouvelles technologies émergentes dans le cadre multilatéral (M. Bourita)    Une touriste suisse «égorgée» dans le sud de l'Algérie, confirment des médias français    Qatar Airways, première compagnie à fournir la connexion Starlink à ses passagers    La FIFA souligne le rôle du Maroc en tant qu'hôte des Coupes du Monde Féminines U-17    Plus d'un million d'étudiant inscrits aux universités marocaines    Nador : arrestation de trois individus impliqués dans des dégradations    « Yenna...The bread crust » : Résilience des femmes marocaines au FNF de Tanger    Le Poète bahreïni Qassim Haddad remporte le Prix international Argana 2024    «"Hôtel de la paix" est un défi parce que c'est un genre exigeant ! »    Industrialisation militaire : un enjeu de souveraineté pour le Maroc    Parlement: le gouvernement a interagi avec 71,13% des questions écrites    CAN de Beach soccer: le Maroc finit 2è du groupe A après la défaite face à l'Egypte    Open Féminin des Clubs : Royal Golf Dar Es Salam s'adjuge la deuxième édition    CAF. Candidature à la présidence: Abrogation de l'article limitant l'âge du postulant (70ans)    Botola D1. J7/Le Clasico de ce soir : ''Changement de l'arbitre. Absence de Hrimat !''    Dakhla : la Marine Royale porte assistance à 38 subsahariens candidats à la migration irrégulière    Luis Enrique : « Hakimi est une référence pour ses coéquipiers »    Compensation : l'équation non résolue    Toufiq : "Le budget annuel alloué aux primes des préposés religieux a atteint 2,48 MMDH en 2024"    L'oreille, lorsqu'elle devient audible à elle-même, c'est que quelque chose ne va pas    Rapport : l'impact climatique sur le volet socio-économique au Maroc    Secteur des EEP : les résultats nets attendus en hausse de 52% d'ici la fin de 2024    Maroc-UE : la Commission en quête de solutions pour préserver l'accord de pêche    Migration : Le Maroc est un « partenaire prioritaire » pour l'Espagne    Le FMI et la Banque mondiale entament leurs assemblées annuelles à Washington    Grand Prix national de la presse : Prolongation du délai de candidature jusqu'au 31 octobre    Marrakech Folklore Days : M Avenue célèbre avec éclat la 6ème édition du plus grand festival de danse folklorique d'Afrique !    Saïd Taghmaoui à l'affiche dans « The Killer » de John Woo    Le parc national du Serengeti en Tanzanie élu meilleur parc d'Afrique    Coopération. L'Ouganda et la Somalie signent un important accord    51 000 extraits numériques de casier judiciaire octroyés depuis janvier    Galerie H : lancement de l'exposition « Alwane – Nuances d'espoir » (VIDEO)    Ouverture de 1.154 mosquées endommagées par le séisme d'Al Haouz avant le mois de Ramadan    Le nombre de présumés ivoiriens tentant de rejoindre l'Europe est passé de 14.800 à 1.076 depuis 2023    Plus d'un million d'étudiants dans les universités marocaines au titre de l'année 2024-2025    Viandes rouges : Quand la flambée des prix devient le miroir des failles structurelles du secteur    Foot: Neymar a rejoué après plus d'un an d'absence    Sidi Kacem : La ville célèbre la 12e édition de la saison culturelle    Les températures attendues ce mardi 22 octobre 2024    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Les personnages qui m'intéressent, ce sont des personnages qui ne sont pas loin de nous quitter. »
Publié dans Albayane le 15 - 11 - 2022

Entretien avec la réalisatrice et scénariste française, Julia Ducournau
Propos recueillis par Mohamed Nait Youssef
Talentueuse. Julia Ducournau a eu la Palme d'Or pour son film «Titane». C'était en 2021. Elle est devenue ainsi la deuxième réalisatrice de l'histoire du Festival de Cannes à recevoir cette prestigieuse récompense. Très exigeante dans sa démarche, la réalisatrice et scénariste explore des zones du non-dit dans son cinéma. En effet, le corps occupe une place importante dans son travail. Julia Ducournau est venue rencontrer le public du Festival International du Film de Marrakech pour la première fois. Une occasion pour découvrir son cinéma et sa façon de voir le monde. Les propos.
Al Bayane : C'est votre première participation au Festival International du Film de Marrakech. De prime abord, que représente cette grand-messe cinématographique pour vous ?
Julia Ducournau : Beaucoup d'ébullition, beaucoup de stimulation, beaucoup de jeunesse. C'est une expérience à vivre parce que c'est un festival qui attire les gens qui viennent de différents pays du monde. Ce que je trouve formidable, c'est que cet événement me donne l'occasion de rencontrer les collègues, le public afin de parler de notre métier. C'est aussi une occasion de rencontrer les jeunes talents parce que c'est un festival du premier et du second film. Ça me parle beaucoup parce que j'ai fait deux films. Je trouve ça formidable surtout le fait de mettre les jeunes auteurs et réalisateurs à l'honneur. C'est un énorme tremplin pour eux. J'ai hâte de rencontrer le public lors de la conversation. On m'a dit que c'est un public jeune.
Après votre film « Titane » qui a eu la Palme d'Or en 2021, cette récompense a eu un impact sur votre façon de voir les choses et votre démarche de cinéaste et scénariste ? A votre avis, ce genre de prix servent-ils à quelque chose ?
C'est dur à dire parce que ce n'est pas un prix. C'est difficile d'intégrer le fait qu'on a la Palme d'Or. Moi, je continue mon bout de chemin. Ce n'est pas comme si rien n'était, mais j'essaie de ne pas poser cette question que vous venez de me poser. Là, je suis en train d'écrire mon premier film. C'est un projet que j'ai en tête depuis avant la Palme d'Or. Je continue d'intervenir sur des séries. Au niveau de mon travail, je pense que pour mon bien-être, il vaut mieux que je n'y pense pas.
La question du corps occupe une place centrale dans votre œuvre cinématographique. Vous êtes également influencé par Pasolini, Francis Bacon, Gronenberg dont les œuvres sont hantées par la question du corps et de la chair. Pourquoi cet intérêt si particulier au corps ?
Pour moi, l'univers de Pasolini, Bacon, Gronenberg... est mon panthéon. Ce sont des gens qui m'ont inspirée davantage. En effet, cet intérêt est extrêmement humaniste en premier lieu. Je pense que reconnaitre la fiabilité du corps, c'est lutter contre les injonctions sociales parce que la fiabilité du corps, c'est-à-dire les accidents du corps, la mortalité du corps, le fait qu'il soit toujours imparfait, il est toujours sur le point de nous lâcher, il y a quelque chose de très vulnérable là dedans qui permet la communication avec l'autre, qui permet de ne pas se sentir seul aussi. Je dis ça contre les injonctions sociales permanentes qui nous disent d'avoir une façade, qui nous disent d'avoir l'air sûr de nous, et qui minimisent énormément la communication entre nous, entre les êtres. Par ailleurs, les injonctions qui sont liées au genre minimisent encore plus la communication entre les êtres. Tout ça c'est une réduction de nos rapports et de notre communication. Alors que penser au corps pour ce qu'il est, en dehors de tout genre, en dehors de tout rapport social, mais juste dans notre peur de nous, de nos propres corps, je pense que c'est ça rentrer en contact avec le monde. C'est ainsi que je lis les œuvres des trois artistes que vous avez cités.
Vous dites que vos personnages sont plutôt marginalisés et non à la marge. Pouvez-vous en dire plus, surtout quand vous imaginez ou écrivez vos personnages ? Comment réfléchissez-vous à leur avenir dans l'œuvre ?
C'est une bonne question parce que évidement, ça ne se fait pas d'un coup. Ce n'est pas une idée qu'on a comme ça, et on se dit par la suite : c'est génial ! Ce n'est pas une question facile, mais quand je pense à un personnage, je me dis : comment est-ce qu'on vit comme ça ? Comment mon personnage survit et comment moi je vais pouvoir lui donner vraiment une vie. Les personnages qui m'intéressent, ce sont des personnages qui ne sont pas loin de nous quitter. J'essaie de comprendre comment ils ont su arriver là, et comment dans ma narration faire en sorte qu'ils redeviennent humains.
Vous avez un rapport très particulier avec l'écriture qui était votre passion depuis votre jeune âge. À vrai dire, peut être, il y avait ce rêve de devenir écrivaine à un certain moment de votre vie. Parlez-nous un peu de ce rapport entre l'écriture scénaristique et l'écriture cinématographique. En d'autres termes, porter des mots à l'écran est une tâche qui n'est pas assez facile.
Ce n'est pas assez facile. C'est extrêmement difficile comme travail, notamment l'écriture d'un scénario. Après c'est le même geste parce qu'il n'y a pas le temps de l'écriture et le temps du tournage et de la postproduction. Pour moi, c'est le même geste de raconter la même histoire, mais juste par couche en y allant toujours un peu plus profondément, en essayant de plus en plus d'échapper à la facilité. Il faut toujours questionner, tout le temps. Pour moi, c'est le même geste. Du coup, mes scénarios sont très visuels. L'écriture scénaristique me convient beaucoup mieux parce que je vois la scène exactement dans ma tête, je vois la lumière, les costumes, la musique que je veux, le son. La seule chose que je n'écris pas dans mon scénario, c'est la caméra. Il faut que le scénario soit un document qui nous émeuve et nous fasse sentir quelque chose. Il n'y pas de dissociation, c'est juste raconter une histoire.
En parlant de la lumière, nous sommes dans cette cité ocre et lumineuse. En fait, dans vos films, on trouve cette lumière qui jaillit de la noirceur, ces zones du non-dit où les projecteurs sont braqués. Pourquoi un tel choix ?
Je lutte beaucoup contre mes propres peurs, c'est-à-dire la peur de ne pas y arriver. Il y a toujours ce sentiment de peur de comment on va être perçu par le reste du monde. J'essaie de m'en affranchir. Je ne dis pas que c'est facile, c'est un effort que je fais tout le temps quand j'écris. C'est un vrai travail sur soi.
Vous avez écrit vos deux films à Rome. Et si vous écriviez un autre à Marrakech ?
(Rires) J'aimerai bien ! C'est la raison pour laquelle je vais autant à Rome parce que je connais très bien cette ville et que je me sens chez moi. C'est une ville que je connais très bien. C'est la maison. Si Marrakech devient comme ma maison, alors là j'aimerai bien écrire un film dans cette cité.
Accroches :
« Les injonctions qui sont liées au genre minimisent encore plus la communication entre les êtres. »
« Il faut que le scénario soit un document qui nous émeuve et nous fasse sentir quelque chose. Il n'y pas de dissociation, c'est juste raconter une histoire. »
« Les personnages qui m'intéressent, ce sont des personnages qui ne sont pas loin de nous quitter. »


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.