«Le parquet général de Biélorussie a demandé au parquet général de la Lituanie d'extrader Svetlana Tsikhanovskaïa pour qu'elle puisse être poursuivie pour des crimes contre l'ordre et la sécurité publique (...) Tous ceux qui ont trouvé refuge en Lituanie peuvent se sentir en sécurité et ne seront pas rendus aux régimes [qui les poursuivent], que ce soit pour leur lutte pour la démocratie et la liberté d'expression ou pour leur croyance (...) Nous n'avons qu'une chose à dire au régime biélorusse : il fera froid en enfer avant que nous examinions vos demandes». C'est ce qu'a répondu, dans un communiqué, Gabrielus Landsbergis, le chef de la diplomatie lituanienne, à l'envoi par lequel les autorités biélorusses ont demandé l'extradition de Svetlana Tsikhanovskaïa, l'opposante numéro un au régime d'Alexandre Loukachenko poursuivie, par la justice de son pays, pour «des crimes contre l'ordre du gouvernement, la sécurité publique et l'Etat» et pour son rôle dans le mouvement de contestation post-électoral de 2020. Ainsi, bien que le 21 décembre dernier le Bureau du Procureur Général de Minsk ait ouvert une procédure pénale contre Svetlana Tsikhanovskaïa et d'autres opposants pour la « création d'un groupe extrémiste » – ce que les intéressés nient formellement – et que cette demande d'extradition ait été faite en application des termes de l'accord bilatéral d'assistance juridique qui avait été signé entre les deux pays en 1992, les autorités lituaniennes tiennent à signifier, à la Biélorussie, leur ferme intention de ne jamais extrader des personnes susceptibles d'être persécutées dans leur pays. Pour rappel, à l'issue du scrutin controversé d'Août 2020 qui avait permis au président Alexandre Loukachenko de rempiler pour un sixième mandat, le mouvement de contestation qui s'en était suivi avait été fortement réprimé par les forces de l'ordre et Svetlana Tsikhanovskaïa accusée par les autorités biélorusses d'avoir organisé « des troubles de masse » et appelé à «des actions portant atteinte à la sécurité nationale». Aussi, en s'étant trouvée face à de telles charges et aux menaces des services de sécurité, la jeune candidate et figure de proue de l'opposition biélorusse n'avait pas d'autre solution que celle d'aller chercher refuge en Lituanie voisine dès la fermeture des bureaux de vote. Or, bien que l'intéressée ait toujours insisté sur le caractère pacifique des manifestations post-électorales auxquelles elle avait appelé et dénoncé le recours à la force et la répression orchestrée par les autorités biélorusses, ces dernières ont muselé la contestation à coups d'arrestations massives marquées par des violences policières et emprisonné ou forcé à l'exil les principaux opposants et publié, ce mardi, une vidéo où on la voit inciter ses compatriotes à occuper, après l'élection présidentielle, des bâtiments gouvernementaux situés à Gomel, la deuxième ville du pays. Enfin, bien que l'Union européenne et les Etats-Unis se soient empressés de condamner la répression du mouvement de contestation et que Washington ait pris des sanctions contre certains proches du président Loukachenko, ce dernier qui est soutenu à bouts de bras par le Kremlin, reste sourd aux dénonciations et insensible à toutes sortes de pressions. Jusqu'à quand ? Attendons pour voir... Nabil El Bousaadi