Pour Abdeslam Aboudrar, président de l'Instance centrale de lutte contre la corruption (ICPC), le tableau n'est ni tout à fait noir ni tout à fait rose. Aboudrar affirme qu'une nette régression du fléau de la corruption ne peut se sentir sans l'intervention de toute la société civile, ainsi que les acteurs de la vie politique. C'est ce qu'il appelle une politique du système national d'intégrité. Al Bayane : Comment qualifiez-vous le rapport de 2009 concernant la corruption dans notre pays ? A. Aboudrar : C'est un rapport que l'instance a réalisé en conformité aux textes. Comme vous le savez, l'ICPC est obligée de présenter le rapport au ministre de la justice et au premier ministre. Nous avons essayé dans notre rapport d'être impartiaux et objectifs. Le rapport a souligné aussi les points forts de l'action menée contre la corruption. Bien évidement, le tableau n'est pas tout à fait noir, il existe des inspections régulières dans les différentes instituions publiques afin de faire l'état de la situation. Néanmoins, il faut davantage de dispositifs comme la protection des témoins. Globalement, il est nécessaire d'instaurer un plan global et bien défini pour la lutte contre la corruption et le plus important, c'est l'application des lois en vigueur. - A qui incombe réellement la responsabilité de la lutte contre la corruption ? La responsabilité est partagée. Elle est l'affaire de tous les intervenants et acteurs du pays. La responsabilité principale incombe en premier lieu au parlement et le secteur de la justice, ainsi qu'à tous les autres secteurs toutes catégories confondues. La corruption concerne également le secteur médiatique, à travers la presse. La corruption est un fléau contre lequel tout le monde doit lutter. C'est ce que nous appelons la « politique du système national d'intégrité». Je demande qu'il y est des reformes plus larges au sein de notre société et un plan d'action clair et net. -Selon-vous, quel est l'état des lieux de la corruption en 2010 dans notre pays. Pensez-vous que ce fléau pourrait régresser à l'avenir ? A mon sens, 2010 ne connaîtra pas une grande différence en la matière. En 2009, nous avons mis en place un dispositif constitutionnel à travers la création de l'ICPC et la création du Conseil de la concurrence. L'année 2009 a connu également une avancée notable, relative à la promulgation du texte relatif à la déclaration du patrimoine. Aussi, la cour des comptes a publié la même année, son rapport sur la corruption. Les gens veulent voir des changements sur le terrain. La situation pourrait changer si le gouvernement entame des actions réelles d'ici la rentrée prochaine. A mon avis, les résultats souhaités en matière de lutte contre la corruption ne pourront commencer à se sentir qu'à partir de 2011.