Trois questions à Jaafar Heikel, vice-président de la Fédération nationale de la santé Le Maroc vient de s'engager dans un plan d'assouplissement progressif des mesures de confinement et de relance des activités industrielles et commerciales, après presque trois mois d'isolement sanitaire. Pour cerner les éventuels risques encourus en cette phase cruciale et les critères retenus pour le processus de levée du confinement, la MAP a approché l'épidémiologiste Jaafar Heikel, vice-président de la Fédération nationale de la santé. 1- Un plan d'allègement des mesures du confinement a été mis en place avec l'établissement de deux zones I et II. Selon vous, quels critères sont retenus dans cette démarche? * Effectivement ce n'est pas un déconfinement, mais un allègement du confinement avec comme garde fou la loi de l'urgence sanitaire. A mon sens, ce plan d'allégement a retenu comme critères : – La loi de Pareto binaire ( 2 catégories) en partant du constat selon lequel 20% des régions représentent 80% des cas . Donc on a catégorisé deux zones, celle des 20% la zone 1 et celle des 80% la zone 2; – La probabilité de clusters professionnels ou même familiaux : la majorité des foyers existent dans 4 villes, Casablanca, Rabat, Tanger et Fès; – La capacité du système de santé à gérer un flux de patients le cas échéant. 2- A votre avis, ne faut-il pas craindre une résurgence du virus et éventuellement un reconfinement, après l'assouplissement des restrictions de mouvement notamment dans la zone 2? *. A mon avis l'enjeu majeur n'est pas dans l'augmentation des nouveaux cas qui peuvent exister selon le niveau de dépistage dans une zone. Il s'agit en fait de la possibilité que certains porteurs confinés deviennent des transmetteurs à leur sortie du confinement. Bien que possible, cette probabilité est faible. Nous aurons à vivre avec le virus quelques semaines, voire quelques mois, mais je crois sauf surprise, que le Maroc est préparé à gérer des crises sanitaires qui ont les caractéristiques que nous avons vécues depuis trois mois. 3- Selon vous, quels risques persistent pour les personnes exposées, principalement les personnes âgées et les femmes enceintes? * Il faut évidemment porter une attention particulière aux personnes âgées, aux personnes vulnérables et aux personnes avec des maladies chroniques. Le risque de contamination étant dans ce cas plus élevé (2 a trois fois plus), nous devons concentrer nos efforts envers eux en priorité. Cette action peut se faire à l'aide de la télé-médecine (télésuivi), l'application « Wiqaytna » développée par l'Etat, le dépistage, la sensibilisation, l'éducation à la santé et surtout l'implication des professionnels de la santé publique et privés dans la planification en matière de prise en charge.