Approvisionnement, bavettes, aides aux démunies, endettement… C'est ce vendredi 10 avril que le Parlement ouvre sa session de printemps, dans une conjoncture hautement marquée par la pandémie du covid-19. Ce sont particulièrement le chef du gouvernement et le ministre de la Santé qui seront dans le collimateur des députés. Mais pas qu'eux. D'autres ministres seront également interpellés. Car si le Maroc a énormément anticipé, et de manière proactive, la gestion de la pandémie, grâce notamment à la clairvoyance de SM le Roi, et si l'Exécutif a mis en œuvre les grandes orientations royales, force est de constater que tout cela a été entaché de certains dysfonctionnements, de failles et de relâchements constatés à certains niveaux… Certes, au niveau théorique, les décisions annoncées par le gouvernement et les autorités sanitaires sont positives et d'une importance particulière, au regard des ravages causés par le virus (fermeture des frontières, suspension des liaisons aériennes, terrestres et maritimes pour les passagers, fermeture des établissements scolaires et universitaires, d'entreprises, mise au chômage de pans entiers de travailleurs, interdiction d'ouverture des lieux et espaces de rencontres : stades, cafés, restaurants, marchés informels, etc.). D'ailleurs, les secteurs du tourisme et de l'hôtellerie ont pris de plein fouet la crise provoquée par le coronavirus. L'on peut dire que les mesures prises pour soutenir les secteurs touchés et le tissu productif sont assez correctes. A condition que les procédures soient facilitées et que la transparence soit le maître mot dans la mise en œuvre de ces opérations. Mais, c'est surtout sur le plan de la communication et du social, sur la base des échos que nos honorables députés auront à constater, à travers les 12 régions du pays, et que le gouvernement et son chef seront de pied ferme. Tout particulièrement dans le monde rural. Car, à part la communication quotidienne sur la situation épidémiologique, l'Exécutif a brillé par son absence. Les rares fois que l'on a vu un ministre expliquer didactiquement, sans langue de bois ni démagogie, c'était pour minimiser les risques, affirmer des contre vérités ou avancer des affirmations invérifiées (inutilité du port du masque de protection, pas de pénurie des masques dans tous les magasins et épiceries et pharmacies, la conformité des masques mis en vente, leurs prix pas chers et à portée de tous…). L'Exécutif aurait pu dire, dès le départ, que nous avons un problème d'approvisionnement en masques et inviter les citoyennes et les citoyens à parer au mieux en recourant aux masques artisanaux ou aux écharpes et foulards voire uniquement à des mouchoirs en tissu. Au lieu de dire que cette protection était inutile pour le commun des citoyens et qu'elle n'est indispensable que pour le corps médical et les malades testés positifs, sachant que le danger vient des porteurs sains. Des bavettes en cause Ce genre de comportement, inconscient, contribue à la perte de confiance en un gouvernement qui tient aujourd'hui un discours en contradiction avec son discours de la veille. En plus, le fait de commercialiser, à la va vite, des bavettes, produites en très grande quantité, sans pour autant en assurer une bonne distribution, et dont la qualité reste, selon de nombreuses sources, inférieure, très largement, aux masques médicaux même bas de gamme vendus à 8 DH pièce dans les pharmacies, interpelle plusieurs milieux chez nous. D'aucuns avancent qu'il serait mieux de se mettre quelque chose sur la bouche et le nez que de suffoquer à cause de bavettes qui s'apparentent plus à une fabrication à base de plastique que de tissu. Sans trop débloquer son intelligence, le gouvernement aurait pu recourir à des cache col, des foulards… des mouchoirs improvisés en bavettes. Mais défiler dans les grandes artères de Casablanca sans aucune protection relève du défi, à part la bêtise qu'il faudra sanctionner sévèrement. Des discours éculés Malgré les assurances répétées, ici et là, la suspicion est omniprésente, surtout dans les milieux populaires, et traduit fortement le manque de confiance qui prévaut dans le pays, à cause de pratiques révolues qui manquent de transparence et l'absence de réédition des comptes. Comme c'est le cas de proclamer, haut et fort, que tous les produits alimentaires sont disponibles et que les prix sont stationnaires (sic) ou encore qu'ils ont baissé (re sic). Il est donc clair qu'un tel discours ne marche pas, à moins de vouloir continuer à mépriser les citoyens et l'opinion publique. Ainsi, outre le profit tiré par d'aucuns par le recours à des hausses de prix sur les produits de première nécessité et les pratiques malsaines sur la qualité de certains produits mis en vente, les services de contrôle se sont mis en action. C'est bien, mais de quelle manière ? Il est évident que des contrôleurs, habitués à ne bouger que pour se sucrer, ne vont pas y aller de main molle, fut-il temps de pandémie… Idem pour les aides aux familles démunies, des voix se lèvent, encore par-ci et par-là, pour dénoncer les pratiques électoralistes des élus locaux voire de certaines autorités. Le dernier exemple avéré et honteux est celui d'Ifrane. Le PPS a saisi, localement le pacha de la ville et le gouverneur de la province. Les élus au niveau de la représentation nationale auront, certainement, une idée objective sur la manière avec laquelle l'aide publique est distribuée, surtout dans le monde rural où les pratiques ancrées ont la peau dur au changement. Car, l'on serait naïf de croire que la pandémie a fait changer les habitudes des Marocains et, surtout, de certains agents d'autorité et d'élus locaux qui continueraient à gérer le quotidien comme si de rien n'était. Vivement le changement Un rappel à l'ordre et à la transparence devra secouer ceux qui croient profiter de l'état d'urgence sanitaire et des malheurs qu'elle cause, pour s'enrichir ou fortifier leurs bases électorales, dans l'attente d'un scrutin… En tout cas, nous espérons que le chef du gouvernement et son équipe, impliqués en première ligne dans la gestion de la pandémie, apporteront tous les éclaircissements et dissiperont toutes les craintes formulées implicitement des fois, mais souvent, à haute voix. Le gouvernement devra donner des explications à tous ces manquements, dysfonctionnements et failles constatées par la population et les élus de la Nation. Il s'agit d'un devoir national pour contrôler le gouvernement, apparemment apte à prendre des mesures hâtives ou trop enclin à un manque de suivi des décisions, déçoit les citoyens et la population.