Elle est sur toutes les langues. Elle tourne en boucle sur tous les médias. Elle est devenue le "hashtag" le plus partagé sur les réseaux sociaux. Jamais une phrase n'aura autant unifié les humains, abstraction faite de leurs couleurs ou de leurs confessions. "Rester chez soi". Une phrase qui sera longuement analysée et scrutée par les historiens quand on cherchera à écrire la chronique de la pandémie du nouveau coronavirus, Covid-19 de son nom scientifique. Que ce soit dans les pays riches, émergents ou pauvres, autorités, spécialistes et simples citoyens se sont accordés que le confinement est le seul et unique moyen de briser la chaîne de transmission du terrible virus, qui a chamboulé l'ordre mondial et condamné l'humanité à la quarantaine. Que l'on dispose de milliers de chambres de réanimation ou que l'on en soit dépourvu, cela ne change pas grand-chose, si la pandémie se propage à la vitesse d'un feu de paille. C'est de là que le désormais planétaire "Rester chez soi" tire toute sa splendeur. Donc, les pays qui adoptent les mesures de confinement les plus drastiques sont ceux-là les plus qualifiés pour enrayer la diffusion du virus. Ceux qui ont épousé la théorie de l'immunité collective, une stratégie dite d'atténuation qui est l'antithèse du confinement, se sont vite rétractés en voyant la montée exponentielle des cas d'infection. Des chercheurs de grande renommée ont démontré, de manière méthodique, les périls que recèlent cette démarche. Partout dans le monde, les gouvernement se mettent, les uns après les autres, à serrer un peu plus la vis. Et ceux qui ont marqué un temps de retard veulent s'inspirer de leurs homologues ayant mis en œuvre, très tôt, les mesures les plus rigoureuses. Eux qui sont confrontés à la réalité du terrain, tous les personnels hospitaliers, qu'ils soient médecins et infirmiers, parlent, aujourd'hui, la même langue dans tous les recoins de la Terre. Ils ne voient pas d'autre moyen de stopper le pernicieux virus que d'amener les gens à rester à la maison, pour qu'ils ne se contaminent pas entre eux. Face à tout ce beau monde, il fallait bien une voix dissonante. Et ce n'est pas venu des charlatans ou des cygnes noirs qui pullulent dans l'univers du virtuel. La discorde est bien partie d'un expert de l'OMS, une organisation ayant souvent péché par un flagrant manque de clarté et de visibilité. Dans des propos rapportés dimanche par l'agence Reuters, Mike Ryan a dit, dans une émission de la BBC, que les pays ne peuvent pas se contenter de confiner leurs populations pour enrayer l'épidémie de coronavirus. "Le danger actuellement avec ces confinements (…) si nous ne mettons pas en place des mesures fortes de santé publique maintenant, quand ces mesures de restrictions sur les mouvements et de confinement seront levées, le danger est que la maladie reparte en flèche", a-t-il argué. Or, deux jours plus tôt, son patron à l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a affirmé que l'expérience des pays ayant réussi à repousser le Covid-19 "redonne espoir et courage au reste du monde". Très probablement, il faisait référence à la Chine, où est apparu le premier foyer du nouveau coronavirus. Pour endiguer l'épidémie, les autorités chinoises ont appliqué les mesures de confinement les plus dures au monde. Ce qui fait que "rester chez soi", dont la sonorité n'aurait emballé aucun publiciste au monde, reste le moyen le plus efficace en ces moments, sauf si l'éminence grise de l'OMS est à même d'indiquer un autre chemin à l'humanité.