La zone littorale suscite la convoitise de plus en plus. Interface entre le milieu continental et la mer, elle attire la population. Des loisirs à l'industrie, les activités se concurrencent cet espace limité dont l'équilibre est menacé à tout moment. Depuis la fin du siècle dernier, des actions sont menées dans notre pays et à différents niveaux pour préserver les ressources de l'environnement littoral, limiter l'impact des pressions anthropiques et assurer un développement local durable des façades maritimes du royaume. De nombreuses études ont été commanditées, des projets pilotes ont été réalisés et l'arsenal juridique a été renforcé. Entre autres textes législatifs, et à quelques jours près, la loi 81-12 relative au littoral (16 juillet 2015) et la loi 27-13 relative aux carrières (9 juin 2015) ont été promulguées. Récemment, en octobre 2019, le Maroc vient de présenter récemment à l'ONU une résolution, adoptée à l'unanimité, sur «le renforcement de la coopération internationale pour la gestion intégrée des zones côtières en vue de la réalisation du développement durable». Cela au moment même où l'autorité gouvernementale de tutelle semble, la tête dans le sable, prendre ses aises, au lieu de s'activer face à l'urgence, pour mettre en application les dispositions des dites lois précitées. Interpellé á la Chambre des Représentants sur le monopole accordé à un bureau d'études pour effectuer l'ensemble des «schémas régionaux de gestion des carrières» prévus à l'article 5 de la loi 27-13, le Ministre de l'équipement, du Transport de la Logistique et de l'Eau fit alors état de son ignorance du sujet. Ce n'est que tout dernièrement qu'il s'en est préoccupé à l'occasion d'une réunion de travail avec les directeurs régionaux et autres responsables centraux du ministère. La sérénité recherchée par cette préoccupation médiatisée ne semble pas avoir été réalisée auprès de l'opinion publique. Il faut dire qu'il s'agit d'élaborer «une vision stratégique globale en vue d'assurer une bonne gestion d'exploitation des carrières pour alimenter le marché en matériaux de carrières et de maitriser l'offre et la demande ainsi que le coût des matériaux extraits des carrières» pour les vingt années à venir, pas moins! C'est là une tâche délicate et ardue qui ne peut être confiée «comme cela» sans se prémunir de toutes les garanties nécessaires pour mettre en place une telle stratégie nationale. La «thixotropie» commerciale des sables ne doit pas engloutir les fonds publics dans des études à perte suscitant des confrontations. Déjà que les conséquences désastreuses du dragage des fonds littoraux n'ont pas été évalués à leurs justes impacts aux embouchures du Sebou, de l'Oum er Rbia et du Loukkos! Au Ministre de s'interroger sur «la science sans conscience» qui fait avaler à celles et à ceux qui le veulent bien les couleuvres des bienfaits du dragage dans ces zones, et contrairement à ce que stipule la loi. Du côté du Parlement, des commissions d'enquête ont été constituées pour s'informer sur l'état de certains secteurs du littoral et des conséquences de leur exploitation. Des grains de sable semblent retarder le travail de ces commissions. L'espoir est dans leur activation prochaine afin de disposer de leurs conclusions aussi bien sur les impacts dégradant le littoral que sur les contournements illégaux de la loi 27-13 par lesquels le dragage d'entretien se transforme en dragage d'exploitation. L'espoir aussi est que la police des carrières, (prévue par la loi 27-13, et dont le décret relatif à la création n°2-18-912 a été publié au Bulletin Officiel du 23 septembre 2019) assume au plus vite sa fonction pour arrêter le commerce illicite et frauduleux du sable dragué. Pour information á qui de droit, qui semble ignorer ce que son ministère prépare, d'autres études sont lancées dans le cadre de « la réalisation des investigations techniques des zones de clapage de quelques ports» de «l'étude d'élaboration de la carte de vulnérabilité des côtes marocaines aux risques naturels et à la pollution marine accidentelle». S'ajoute à cela les études qui relèvent de la mise en œuvre du «Plan national et schémas régionaux du littoral» conformément aux dispositions de la loi 81-12 précitée pour adopter une approche de gestion intégrée du littoral et dont des ateliers de présentation ont déjà été organisés avec l'aide de la Banque Mondiale et autres soutiens financiers. L'espoir est que la coordination se fasse au sein d'un même ministère et avec d'autres ministères intéressés pour que l'intégrité territoriale du littoral du royaume soit préservée, que ses ressources vivantes et non vivantes soient exploitées dans le cadre d'un développement durable et dans le cadre d'une politique cohérente encadrée par des compétences certaines.