Alors que la concurrence mondiale continue de croître, la pression pour améliorer devient de plus en plus intense. Les entreprises font face à de nombreux défis : augmenter les ventes, réduire les coûts, réduire les stocks, prévoir avec précision la demande future, trouver la prochaine percée du marché et, surtout, survivre. Tous ces défis ne peuvent être accomplis qu'à travers un management de qualité. C'est cette raison qui a conduit de nombreuses entreprises à investir dans au moins l'une des certifications ou normes de qualité les plus répandues pour pouvoir consolider leurs positions sur le marché. Ammar Hadj-Messaoud: «la qualité est l'aptitude à faire face à un environnement en ébullition» Ammar Hadj-Messaoud, consultant dans l'implantation de processus d'amélioration continue, nous partage sa vision de la qualité et nous explique les phases fondamentales d'une démarche qualité au sein d'une entreprise. Al Bayane: Quelle est votre vision de la qualité? Ammar Hadj-Messaoud: Le terme qualité est avec nous depuis une très longue période. La construction des merveilles antiques, ainsi que la technologie moderne sont toutes basées sur certains des principes de la qualité. Cependant, ma vision de la qualité repose sur mon identité, c'est-à-dire mes croyances systémiques qui considèrent que le «tout est plus grand que la somme de ses parties» contrairement aux croyances basées sur une approche métier qui considèrent que «le tout est la somme de ses parties», ce qui n'est pas de l'ordre de la nature des choses. Pour moi, la qualité c'est l'aptitude à faire face à un environnement en perpétuelle ébullition plutôt que l'aptitude à assurer une quantité de production constante. Cette aptitude à faire face à la compétitivité mondiale c'est constamment offrir de la valeur tout en réduisant les coûts. Cela repose sur une rapidité de réponse, une spécialisation accrue dans son champ d'excellence, un système de production flexible, une concentration sur les clients et une dynamisation de tous les leviers aptes à favoriser l'alignement organisationnel sur l'optimum global pour assurer l'amélioration continue de toute l'entreprise. Quelles sont les normes phares de la qualité? Avons-nous besoin de «normes phares de la qualité» comme vous le dites? Est-ce que les gens ont bien compris ce qu'est la qualité? Beaucoup de définitions ont été données pour la qualité au fil des ans, et la prolifération de la qualité a connu une croissance énorme dans la sensibilisation ainsi que dans la mise en œuvre dans une variété d'activités. Cependant, la question demeure : Pourquoi les entreprises et les institutions ont encore des problèmes avec leurs produits et services? Il y a plusieurs réponses possibles à cette question. Cependant, je crois que les trois plus fondamentales sont : le manque de compréhension de ce qu'est la qualité, la planification de la qualité appropriée et son adéquate exécution. En général, les normes disent le «quoi» et non pas le « comment ». Ainsi, les gens mettent en œuvre le «comment» conformément à leurs paradigmes industriels. Par exemple, la norme ISO 9001 vous exige que votre «véhicule doit allez vite», maintenant la construction de ce véhicule sera basée sur le contexte, les paradigmes et le patrimoine des connaissances des gens. Pour certains, le véhicule sera matérialisé par une charrette, et pour d'autres, par un véhicule à combustion interne ou électrique ou bien par un avion. Ainsi, selon la norme, les 4 types de véhicule sont conformes à la norme dans le contexte des gens, mais en termes de fondements et de vitesse de déplacement, ce n'est pas du tout la même chose. Les normes sont nécessaires mais non suffisantes pour la compétitivité des organisations. Dans mon livre à moi, si l'on me pose la question : quelles sont les approches phares pour la qualité ? Je répondrai : celles qui permettent l'excellence opérationnelle, c'est-à-dire la synergie de l'intégration de la Théorie des Contraintes (TOC), du Lean management et de Six Sigma. Quelle valeur ajoutée apporte la démarche qualité à une entreprise? Toutes les démarches qualité apportent de la valeur ajoutée. La problématique réside dans le taux d'amélioration de cette valeur vue dans son ensemble. Par exemple, ISO 9001 telle qu'elle est perçue actuellement apporte très peu de valeur globalement à cause du paradigme taylorien basé sur les optimisations locales. Le Lean et Six Sigma apportent une meilleure valeur mais elles restent tout de même tayloriennes à cause des optimisations locales où chaque processus est optimisé séparément. Toutes les démarches qualité basées sur le processus d'amélioration continue PDCA (Do, Plan, Check et Act) de Deming ont un taux d'amélioration qui se réduit avec le temps. Par contre, la seule et unique démarche qualité systémique, orientée sur l'optimum global, qui assure un très fort taux d'amélioration à chaque initiative de progrès est la Théorie des Contraintes (TOC) à travers son processus POOGI (Process Of Ongoing Improvement). C'est un processus d'amélioration continue bien singulier et qui n'a pas d'égal au monde. Il se compose de 5 étapes de convergence : 1) identifier la contrainte ou ce qui limite la maximisation de la valeur d'un système ; 2) Exploiter au maximum cette limite ; 3) Subordonner le reste du système à cette limite ; 4) Elever la contrainte ; et 5) Repartir au premier point afin que l'inertie du système ne devienne pas la contrainte. Comment la Qualité est-elle perçue en interne de l'entreprise? Cela dépend de la philosophie de management qui sous-tend la démarche qualité utilisée. Par exemple la perception d'ISO 9001 implantée à travers un paradigme Taylorien basé sur les optimisations locales fait en sorte que l'entreprise soit fragmentée à travers deux systèmes parallèles. C'est-à-dire, on fait les choses pour être conforme à la norme, d'une part, et on fait les choses selon nos véritables fondements, d'autre part. Cette façon de faire pousse les gens à percevoir la qualité négativement, c'est-à-dire, un poids supplémentaire dans leurs pratiques quotidiennes, et globalement, cela génère une mentalité basée sur la « triche ». Preuve en est à la veille d'un audit, c'est le branle-bas de combat au sein de l'entreprise pour rendre conforme à la norme leurs pratiques formelles. Lorsque la démarche qualité est basée sur l'une des trois philosophies de management qui sont la TOC, le Lean ou Six Sigma, la perception de la qualité en interne est positivement bien différente de celle citée précédemment. Le must de la perception positive de la qualité vient de l'intégration de ces trois approches dont la synergie de leurs fondements résulte en l'excellence opérationnelle. La qualité est-elle chère? L'excellence coûte moins chère que la médiocrité. A-t-on évalué ce que coûte la médiocrité? Propos recueillis par Kaoutar Khennach Bio Express Ammar Hadj-Messaoud, est Ingénieur et maître en sciences appliquées. Il dirige les opérations de Sciquom Conseil, firme spécialisée dans l'amélioration des capacités compétitives des entreprises et des institutions. Il dispose d'une longue et riche expérience en gestion des opérations. Il a occupé les plus hauts postes de gestion au sein de plusieurs entreprises multinationales au Canada. Ses principales responsabilités consistent à diriger les orientations et les stratégies en gestion des opérations et à fournir le soutien pour l'application des politiques et directives de gestion des différentes fonctions opérationnelles. Il est consultant auprès de plusieurs entreprises dans l'implantation de processus d'amélioration continue. Ammar est récipiendaire du prix d'excellence qui lui a été décerné en 2006 à New York (USA). *** Ils ont dit : Moulay Hafid Elalamy: «La qualité est la clé de voûte de l'accélération industrielle» Le Maroc a enregistré de réels progrès en matière de la qualité, notamment dans les secteurs industriels. En témoignent les chiffres avancés par Moulay Hafid Elalamy, ministre de l'Industrie, du Commerce, de l'Investissement et de l'Economie numérique, lors du lancement de la semaine nationale de la qualité organisée du 31octobre au 4 novembre 2017. En effet, ce sont 124 organismes qui ont été accrédités et 1524 certifications de qualité qui ont été octroyées. Ce qui place le Maroc au premier rang en termes de normes de qualité au niveau du Maghreb. Toutefois, le ministre aspire à une reconnaissance internationale des normes marocaines de qualité. «L'objectif aujourd'hui est de faire évoluer les normes marocaines afin qu'elles puissent être reconnues au niveau international», a souligné M.H. Elalamy. Ainsi, il a tenu à rappeler aux opérateurs l'importance des normes de qualité dans le positionnement international du Maroc. «La mise en place d'une infrastructure qualité aux normes internationales est la clé de voûte de l'accélération industrielle amorcée au Royaume». Le ministre lancera un lourd chantier législatif et réglementaire concernant les appels d'offre publics, mais également la réforme du système national d'accréditation. L'implication du privé dans le mécanisme de métrologie est également prévue. Ahmed Bouhaouli : «le coût de la non qualité est exorbitant» «La qualité se positionne en tant qu'un avantage concurrentiel et distinctif pour les entreprises. Elle est de plus en plus perçue comme une dimension indispensable à l'évolution de l'activité et de la consolidation de la position sur le marché. La qualité n'engendre pas des coûts pour les entreprises. Car elle permet d'accélérer les processus de production, booster les ventes et améliorer la compétitivité au niveau national et international. Par contre, la non qualité engendre la perte des marchés, le ralentissement du rythme de production, la détérioration de la réputation de la marque et donc un recul de l'activité. Pire encore, souvent, la non qualité a un impact négatif sur la santé du consommateur, ce qui est très dangereux. In fine, le coût de la non qualité est exorbitant», a fait savoir Ahmed Bouhaouli, président de l'Union Marocaine pour la Qualité lors du lancement de la semaine nationale de la qualité organisée du 31 octobre au 4 novembre 2017.