De toutes les maladies connues, l'hypertension artérielle ou élévation de la pression artérielle est celle dont on parle le plus : «Tanssyou». Cet intérêt pour cette maladie n'est pas fortuit. Il résulte d'une préoccupation légitime que nous éprouvons, que nous ressentons chaque jour, et plus particulièrement les habitants des grandes villes comme Casablanca ou Rabat ou le rythme de la vie est trépident. Stress, contraintes quotidiennes, pollution, sédentarité, sont autant de maux de la vie de beaucoup d'entre nous, qui favorisent l'hypertension artérielle. A quoi correspondent les chiffres de la tension ? Comment savoir si on est hypertendu ? Quelles sont les complications ? Quelle prévention ? Pour comprendre ce qu'est l'hypertension artérielle, et cerner ses facettes cachées, nous avons contacté le professeur Ahmed Bennis, spécialiste en cardiologie. Qui concerne 33% de Marocains. Zoom sur une maladie qui gagne du terrain. Quand on parle de maladie, on fait référence a certains signes qui la caractérisent. Ce sont les symptômes qui sont visibles, parlants, des signes qui ne laissent planer aucun doute, sur la nature de la maladie, et qui permettent au médecin de mieux cerner le mal dont souffre son patient, et partant de prescrire un traitement adapté a cette maladie. Mais dans le cas de l'hypertension artérielle, il y a très souvent une absence de signes et les médecins parlent de maladie silencieuse, car sans symptômes. Cette caractéristique de l'hypertension artérielle peut s'avérer dangereuse, voire mortelle. C'est que, insidieuse, l'hypertension n'est pas facile à détecter. La plupart du temps, les personnes hypertendues se sentent bien et ne présentent pas réellement de symptômes. D'après une récente étude, près de 60 % des personnes souffrant d'hypertension n'en sont pas conscientes et donc ne consultent pas, ne sont pas traitées, ce qui fatalement finira tôt ou tard par avoir des répercussions parfois malheureusement dramatiques. Avant de passer en revue toutes les facettes de l'hypertension artérielle, nous allons d'abord définir ce qu'est la pression artérielle. Tout d'abord, il convient de savoir que le cœur est une pompe qui aspire et refoule. Le cœur se contracte en moyenne 70 fois par minute pour propulser le sang vers les artères afin d'irriguer toutes les parties du corps. Chaque battement du cœur pousse le sang à travers les artères. La pression artérielle mesure la force avec laquelle le cœur pousse le sang dans les artères. La pression artérielle mesure à la fois la force avec laquelle le cœur pompe le sang (c'est le 1er chiffre de la pression artérielle ou pression artérielle systolique) et la force de la résistance au passage du sang dans les artères (c'est le 2e chiffre de la pression artérielle ou pression artérielle diastolique). Par exemple une personne peut avoir une pression artérielle de 120/75 millimètres de mercure. Chez certaines personnes, la pression artérielle peut augmenter avec l'âge. En particulier, l'excès de poids, le manque d'activité physique et une alimentation trop riche en sel peut sur de nombreuses années faire augmenter la pression artérielle. Les personnes qui ont une pression trop élevée sont dites hypertendues. Les valeurs sont fixées selon des normes internationales - Une pression systolique (qui est la pression artérielle maximale) anormalement haute est supérieure à 140 mmHg ou millimètres de mercure (le médecin vous donne généralement ce chiffre en centimètres, soit 14). - Une pression diastolique (la minimale) anormale est supérieure à 90 mm Hg ou millimètres de mercure (donc supérieure à 9). Selon les chiffres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), un milliard de personnes souffrent d'hypertension dans le monde. Tous les pays sont concernés, mais on relève que se sont les pays en voie de développement qui sont les plus touchés avec 60 %, alors que les pays occidentaux se sont 40%. Mais les projections des spécialistes montrent qu'en 2025, ces chiffres connaitront une courbe exponentielle à cause du vieillissement de la population et de l'évolution de mode de vie qui favorise l'obésité et la sédentarité et l'humanité comptera 1,5 milliards de malades. Au niveau mondial, la prévalence de l'HTA est de 16,5 % dès 20 ans et plus en France et de 20 % en Espagne. Aux Etats-Unis, elle est autour de 33 % pour la tranche d'âge entre 45 et 54 ans, de 48 % pour celle située entre 55 et 64 ans, et de 60 % pour les personnes âgées de 65 à 74 ans Le Maroc n'est pas épargné par ce phénomène. La prévalence de l'HTA est d'environ 33% dans la population adulte. On estime que six millions de Marocains sont hypertendues. A partir de 45 à 50 ans, un adulte sur deux est hypertendu, et à partir de 65 ans, trois quart des adultes le sont. Ces chiffres ne peuvent pas laisser insensible, ils nous interpellent, car il y va de la santé de nos concitoyens, et pour bien comprendre les réels enjeux que représente aujourd'hui l'hypertension artérielle, il faut s'en remettre aux praticiens, aux médecins généralistes et spécialistes (cardiologues) du secteur public et privé. Tous sont unanimes, pour reconnaitre que le motif de consultation le plus fréquent dans leurs cabinets médicaux, a l'hôpital ou au centre de santé est l'hypertension artérielle, et que ce qui est le plus à craindre se sont les complications inhérentes a l'hypertension artérielle. Quand l'hypertension n'est pas diagnostiquée a temps, elle évolue a bas bruit et entraine des dégâts irréversibles surtout quand les artères sont touchées. L'hypertension artérielle va accélérer le processus d'athérosclérose, qui entraîne l'obstruction partielle ou totale de vaisseaux irriguant le cœur (infarctus), le cerveau (accident vasculaire cérébral) et les jambes (artérite). Une hypertension artérielle, non ou mal contrôlée, aura également d'autres conséquences : Sur le cœur : à long terme, celui-ci a du mal à supporter l'excès de tension artérielle: il se fatigue. Si l'on ne fait rien, une insuffisance cardiaque finit par s'installer : le cœur ne peut plus assurer correctement son rôle de pompe. Sur le cerveau : destruction de tissus cérébraux à l'origine d'une diminution des facultés intellectuelles. Sur les reins : perturbation de la fonction de filtration du rein, pouvant aller jusqu'à l'insuffisance rénale : le rein ne filtre plus correctement le sang et l'organisme s'intoxique. Sur les yeux : lésions pouvant entraîner une baisse de la vision Les facteurs liés aux comportements et aux modes de vie peuvent contribuer à l'apparition de l'hypertension artérielle. Ces facteurs sont notamment le tabagisme, l'alimentation malsaine et la consommation excessive de sel, la sédentarité, le surpoids, l'obésité et la consommation nocive d'alcool. Plus on vieillit, plus la tension artérielle tend à s'élever. C'est pourquoi le risque d'hypertension s'accroît avec l'âge. L'hypertension peut être héréditaire. Le patrimoine génétique dont on hérite peut prédisposer à l'hypertension. Le risque d'hypertension augmente si des mauvais choix concernant le mode de vie viennent s'ajouter aux facteurs héréditaires. L'hypertension peut apparaître à n'importe quel moment de la vie. Malgré les facteurs non modifiables, comme l'âge, le sexe et l'hérédité, il est possible de s'en prémunir par quelques règles d'hygiène de vie. Ci dessous quelques conseils simples pour prévenir l'HTA Trop de sel augmente chez certains individus la tension artérielle. Ainsi, pour maîtriser votre apport, évitez les plats cuisinés qui contiennent souvent beaucoup de sel. Si vous buvez de grandes quantités d'eau minérale, privilégiez celles contenant moins de 150 mg de sodium par litre. Les habitudes alimentaires jouent un rôle important dans les variations de votre tension artérielle. Adopter une alimentation équilibrée permet de réduire les risques d'hypertension. Pour cela il faut opter pour une alimentation pauvre en graisse. Car en limitant l'absorption de lipides (surtout saturés), on réduit le risque de surpoids et d'obésité. Or, l'hypertension artérielle est souvent induite par un excès de poids. Les viandes rouges, sucreries, boissons sucrées et les aliments riches en graisses animales sont à éviter. Il vaut mieux préférer les viandes blanches, le poisson, les fruits et légumes. La surcharge pondérale est un des facteurs aggravants de l'hypertension artérielle Il est important de surveiller l'alimentation des jeunes , de leur inculquer de bonnes habitudes et attitudes, éviter les snacks et autres repas riches en calories , Mac chose et King .....de suivre la courbe de leur poids et de consulter le médecin si nécessaire Nuits écourtées par trop de travail ou trop de sorties nocturnes contribuent à accroître la dette en sommeil et le risque d'hypertension. Les besoins en sommeil sont variables d'une personne à l'autre et d'un âge à l'autre mais globalement, il faut compter au moins 7 à 8 heures de sommeil en moyenne pour couvrir vos besoins en sommeil. Fumer est mauvais pour le système cardiovasculaire. La nicotine favorise l'artériosclérose , elle augmente donc le vieillissement des artères. Il en est de même pour l'alcool. Pratiquer une activité physique L'activité physique régulière est bénéfique pour le contrôle du poids mais aussi sur le plan cardiovasculaire. Elle permet "d'ouvrir les artères" qui apportent plus de sang aux muscles : le cœur travaille plus, les artères s'assouplissent et la pression artérielle baisse Les activités d'endurance sont à privilégier : marche, course, vélo, natation, gymnastique, etc. Il n'est pas nécessaire que l'activité soit intensive mais plutôt régulière et progressive. Voilà des habitudes simples à prendre pour réduire la fréquence de cette maladie et pour vous sentir mieux. Au niveau de la région du grand Casablanca, les services d'urgence des différents hôpitaux (14), sont très sollicités de jour comme de nuit, 24H/ 24. En effet, il est loisible de constater cette réalité, dès lors que l'on est présent au sein de ces services en tant que patient ou accompagnateur ou même simple observateur. Certes, il y a une activité soutenue, mais aussi paradoxale que cela puisse paraitre, tous les patients qui s'adressent aux services d'urgence ne présentent pas de situations de santé graves ou vitales et la grande majorité de ces malades bénéficient d'une consultation médicale, d'un traitement avec retour au domicile et une orientation vers le centre de santé du quartier. Entre vraies et fausses urgences, les professionnels ne savent plus où donner de la tête. Ce qui les détourne de leur mission essentielle. Soulever le problème de la prise en charge des cas urgents, nous invite à plus d'un titre à définir ce qu'est une situation urgente et ce pour éclairer l'opinion publique et partant les citoyens qui s'adressent aux urgences, souvent pour un oui ou pour un non. Une urgence est la défaillance d'une ou plusieurs fonctions vitales qui relève d'une prise en charge médicale immédiate dans une structure adaptée par un personnel qualifié. Ces services d'urgences ont pour mission d'accueillir tout patient arrivant à l'hôpital pour des soins immédiats, qu'il s'agisse d'urgences absolues, à la suite d'un accident de la voie publique, d'une agression avec coups et blessures, d'une perte de conscience, d'une hémorragie, d'un problème cardiaque, de difficultés respiratoires importantes, ou d'urgences ressenties par le patient en fonction de la douleur physique ou psychologique qu'il éprouve. Autant de causes et de situations qui sont à la base d'une demande urgente en soins à laquelle doit répondre normalement, et en toute bonne logique, le service d'accueil des urgences de l'hôpital le plus proche, c'est-à-dire celui dont dépend l'aire géographique où a eu lieu l'accident, le malaise ou le drame. C'est ce service d'urgence qui doit être prioritairement le lieu de convergence par excellence de tous ces cas ou blessés qui sont évacués par les ambulances de la protection civile . Plus d'un million de malades par an Il est utile à ce sujet de rappeler ici que les choses changent en mieux depuis quelques années, et plus précisément depuis 2013 , lorsque sa majesté le roi Mohammed VI avait lancé à Fès. le plan national de prise en charge des urgences médicales. Depuis cette date, nous assistons à la restructuration des services d'urgence. Nous constatons que ces services sont mieux équipés, dotés en matériels de réanimation adéquats, en moyens humains suffisants (médecins - infirmiers), des professionnels bien rodés à la tâche. Entièrement rénovés, certains services d'urgences des différents hôpitaux de Casablanca ne désemplissent pas. L'affluence des malades monte en flèche tout au long des 24 heures. Contacté par nos soins, le docteur Rachid Moulki, directeur régional de la santé a Casablanca, nous a précisé qu'en moyenne se sont 250, voire même 350 patients qui défilent sur les 24 heures, au niveau de chaque service d'urgence des différents hôpitaux et que chaque année, à l'échelon national, ce sont 5 millions de patients qui sont vus aux urgences, et que 1.100.000 malades sont pris en charge par les différentes structures d'urgences (dont celles du CHU Ibn Rochd ) . Mais la question qui se pose est de savoir si tous les patients qui s'adressent aux urgences nécessitent réellement une prise en charge urgente ? La réponse est non. Vraies et fausses urgences Pour répondre a cette question, nous avons contacté monsieur Driss Chamat, infirmier responsable au niveau du service des urgences de l'hôpital Mohamed Baouafi. qui nous a confirmé que sur les 250 malades qui s'adressent quotidiennement aux urgences de jour comme de nuit et qui sont enregistrés, bénéficient de la consultations, de soins, seuls 50 sont de vraies urgences. Pour cet infirmier très expérimenté, les personnels des urgences font face quotidiennement aux fausses urgences : «on se retrouve obligés à prendre en charge des malades qui souffrent d'un petit mal de tête , d'une migraine , d'une courbature , d'une diarrhée , ou d'un fébricule par exemple...» Il ne fait aucun doute que nos services d'urgences sont synonymes d'un sac ou on fourre de tout. Ces fausses urgences, ou bobologie comme les désignent les professionnels de santé, sont autant de tracasseries qui contribuent à la saturation des urgences et ne permettent pas de ce fait aux médecins et infirmiers de s'occuper pleinement des cas urgents qui sont mis dans la salle de déchoquage. Pour le docteur Rachid Moulki , directeur régional de la santé à Casablanca, pour de nombreux citoyens, l'urgence est une perception, c'est le cas de ce père qui rentre à la maison, et qui trouve son enfant avec une fièvre à 38°. Le premier reflexe, il va aller aux urgences. Même chose pour cette jeune fille qui a une dysménorrhée et que la maman va amener aux service des urgences. De telles situations sont vécues au quotidien et les malades ne veulent rien savoir, sauf être pris en charge au niveau des urgences. Comment expliquer, un tel attachement de nos concitoyens à l'adresse des différents services d'urgences ? Il ne fait aucun doute que les citoyens qui s'adressent en nombre au service des urgences, le font d'abord parce qu'ils ont confiance dans les compétences des professionnels de santé (médecins urgentistes et infirmiers) et aussi pour la qualité des soins qui y sont prodigués 24 H/ 24 H, de jour comme de nuit, les week-ends et les jours fériés. Dans ces conditions, il est légitime de se poser des questions, de nous interroger, sur la mission des structures de santé primaires, en particulier les établissements de soins de santé de base (SSB). En principe, ces structures sont censées décharger les hôpitaux, notamment les urgences d'une partie des tâches qu'ils assurent actuellement Il y a tout un travail a entreprendre pour faire prendre conscience a nos concitoyens de la nécessité de respecter le circuit de la filière des soins d'urgence. Il s'agit de sensibiliser les malades sur ce qu'est une vraie urgence et quelles sont les missions d'un service d'urgence . Les malades doivent savoir que les centres de santé sont dotés en moyens humains et matériels destinés a leur assurer la meilleure prise en charge possible. Il ne fait aucun doute qu'une telle approche sera de nature a rehausser et à dynamiser la qualité des soins et que les urgences pourront faire face aux vraies urgences, que nos médecins urgentistes pourront de leur côté, assurer leur travail correctement au lieu de passer leur temps à expliquer et à orienter les faux malades ou ceux ayant des malaises légers. Quelles mesures adopter aujourd'hui pour éduquer les citoyens trop habitué, au moindre pépin, à se tourner vers les services d'urgences ? Comment faire pour permettre aux urgences d'assurer leurs véritables missions ? Comment agir pour que les professionnels de santé puissent accomplir leur tâche dans d'excellentes conditions et se consacrer pleinement à la prise en charge des vraies urgences ? Il s'agit en premier lieu de sensibiliser encore et toujours nos concitoyens, d'informer, et d'éduquer le plus grand nombre aux enjeux réels que représentent les urgences.