Les participants à séminaire scientifique, initié le week-end dernier par la Coalition marocaine contre la peine de mort (CMCPM) en marge de son assemblée générale ( Rabat, 4-5 mai 2013), sous le thème «abolition de la peine de mort et défis», ont souligné la nécessité pour les défenseurs des droits de l'homme dans la région du Moyen Orient et d'Afrique du Nord de s'organiser en un front commun en prévision du lancement d'une vaste campagne pour la défense du droit à la vie et l'abolition de la peine capitale dans la région. Au cours de cette rencontre, le coordinateur de la CMCPM, Abderrahim Jamai a indiqué qu'il est capital pour la défense du droit de tous à la vie d'intensifier le combat pour l'abolition de la peine de mort dans le cadre d'un front commun qui comprend toutes les organisations opérant dans la région MENA et l'Afrique du Nord. Il a rappelé que la CMCPM a à son actif différents acquis et invité à un débat national entre toutes les forces concernées pour exposer leurs argumentations sur le pour et le contre dans le but de parvenir à des résultats concrets sur la question. Il a estimé qu'il est temps de couper court avec la culture de Hammourabi, qui dominait il y a plus de 4000 ans et de se prononcer une fois pour toute pour le respect du droit à la vie de tous, sans refuser à la société de définir d'autres formes de peines à l'encontre de ceux qui violent ses lois. Au Maroc, où aucun condamné à mort n'a été exécuté depuis le commissaire Tabit en 1993, il est paradoxal de constater que le pays continue toutefois d'émettre des réserves et refuse toujours de voter pour le moratoire sur les exécutions de la peine capitale, a-t-il dit. C'est la 4ème fois que le pays décide de ne pas voter pour ce moratoire, a-t-il précisé. Abondant dans le même ordre d'idées, le président de l'Organisation marocaine des droits humains (OMDH), Mohamed Nachnache, a estimé qu'il est temps pour le Maroc de décréter un moratoire sur les exécutions de la peine de mort dans la perspective de son abolition définitive. Selon lui, le maintien de la peine capitale en droit marocain contredit l'esprit de la nouvelle constitution qui consacre dans son article 20 le droit à la vie et va à l'encontre des progrès réalisés par le Royaume en matière des droits humains. Il ne suffit pas de décréter un moratoire mais d'abolir une fois pour toutes cette peine du droit marocain pour réconcilier le pays avec ses ambitions démocratiques modernes, a-t-il ajouté. Pour sa part, le vice-président de la Coalition mondiale contre la peine de mort (WCADP) et directeur général d'Ensemble contre la peine de mort (ECPM), Raphael Chenuil Hazan, a indiqué que la Coalition marocaine contre la peine de mort est devenue un acteur agissant de taille parmi les mouvements mondiaux luttant pour l'abolition de la peine capitale, comme en témoignent aussi les Nations unies. Il a affirmé que son organisation appuie la démarche poursuivie par la Coalition marocaine pour la création d'un front commun dans la région MENA et l'Afrique du nord avec la participation de tous les mouvements concernés dans l'objectif d'unifier leurs efforts et rangs dans leur combat visant l'abolition de la peine de mort. Il a en outre fait savoir que de nouveaux pays ont adopté le moratoire onusien sur les exécutions de la peine de mort et d'autres ont aboli cette peine, émettant l'espoir que le Maroc en fasse de même. Le secrétaire général du Conseil national des droits de l'Homme, Mohamed Sabar s'est arrêté, quant à lui, sur les déclarations, conventions et instruments internationaux qui se sont définitivement prononcés depuis des décennies pour le respect du droit à la vie et l'abolition de la peine capitale des législations nationales. Au Maroc, a-t-il dit, il s'agit pour le législateur, au cas où le gouvernement décide d'abolir la peine de mort, d'abroger les dispositions afférentes au sujet du code pénal, du code de la justice militaire et de la loi relative à la lutte contre le terrorisme. Dans tous les cas, a-t-il dit, le CNDH est pleinement engagé dans ce débat et a organisé pour ce faire un séminaire qui a adopté une série de recommandations et de résolutions sur la question. De son côté, la députée Khadija Rouissi, coordinatrice du Réseau des parlementaires contre la peine de mort (RPCPM) a indiqué que son organisation compte à présent quelque 208 membres issus de différents groupes parlementaires, annonçant que le réseau œuvre inlassablement pour l'adoption d'un texte de loi relatif à l'abolition de la peine de mort. Le réseau s'est fixé aussi pour objectifs la mise en œuvre des dispositions de la Constitution relative au respect du droit à la vie et l'adhésion du Maroc aux conventions internationales relatives aux droits de l'homme dont en premier lieu le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et l'adhésion à la Cour pénale internationale (convention de Rome). Pour l'ambassadeur, chef de la délégation de l'Union européenne au Maroc, Rupert Joy, le débat en cours au Maroc sur la peine capitale a franchi d'importantes étapes, compte tenu du climat général qui prévaut dans le pays et des nouveautés apportées par la nouvelle Constitution de 2011. Il a rappelé dans ce cadre que le rapport final de l'Instance Equité et réconciliation (IER) a recommandé au Maroc l'adoption du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et appelant à l'abolition de la peine de mort. Toutes ces nouvelles données sont très encourageantes, alors que le gouvernement poursuit l'élaboration d'une nouvelle mouture de réforme du code pénal pour réduire au minimum la liste des crimes passibles de la peine de mort. Selon M. Joy, l'abolition de la peine de mort compte parmi les priorités de l'UE, qui entretient des relations privilégiés avec le Royaume. Intervenant dans le débat, l'ambassadeur de France au Maroc, Charles Fries a réaffirmé l'engagement de son pays au profit des organisations luttant pour l'abolition de la peine de mort, estimant que l'abolition de la peine de mort au Maroc requiert une décision politique devant être prise au sommet de l'Etat comme ce fut le cas en France. D'autres ambassadeurs européens (Suède et Norvège) se sont succédé pour appuyer l'appel de la Coalition marocaine pour l'abolition de la peine de mort à l'unification des rangs des coalitions dans la région Mena et en Afrique du nord dans l'espoir d'exercer suffisamment de lobbying dans leurs pays respectifs en vue de mettre fin à l'exécution des peines capitales et à l'abolition d'une telle peine de leurs législations. Ont également pris part à cette rencontre le secrétaire général de la Délégation interministérielle des droits de l'Homme, Abderrazzak Rouan, les représentants de nombre de partis politiques et de syndicats. Y étaient également représentés la Coalition mondiale contre la peine de mort, l'association française Ensemble contre la peine de mort (ECPM) et des Coalitions maghrébines et Penal reform international (PRI).