Consul honoraire : une fonction apolitique et neutre Avocat au barreau de Casablanca, Ahmed Lemzah est un juriste touche à tout. Fiscalité, droit des affaires, du travail, de la propriété intellectuelle... n'ont aucun secret pour lui. Grâce à sa longue expérience dans le milieu entrepreneurial, où il s'est particulièrement illustré dans les domaines de la médiation et de l'arbitrage, il fait aujourd'hui incursion dans le domaine diplomatique, en tant que consulaire honoraire de la Tchéquie au Maroc. Une fonction peu connue sur laquelle il a bien voulu éclairer la lanterne de nos lecteurs. AlBayane : La fonction de consul honoraire est très mal connue du grand public. De quoi s'agit-il au juste? Ahmed Lemzah : La fonction de consul honoraire est une fonction que je pourrais qualifier d'«auxiliaire» qui vient suppléer la fonction «consul de carrière» quand un pays dit «pays d'envoi» ne peut pas ouvrir un consulat de carrière dans une localité d'un pays dit «pays d'accueil» ou pays de résidence du consulat honoraire . C'est la Convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires qui a prévu et instauré la possibilité pour les pays membres de l'ONU signataires d'user de la fonction de consul honoraire. C'est une fonction non rémunérée et le Consul Honoraire exerce ses fonctions en relation directe et sous la responsabilité du chef de poste qu'est l'Ambassadeur accrédité au pays de résidence. Des pays très industrialisés comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la Belgique, ou des pays, qui, avant ou immédiatement après la seconde guerre mondiale, avaient connu d'importants mouvements migratoires provenant surtout d'Europe, mouvements qui ont cessé depuis les années soixante, se sont dotés de consulats honoraires. Et comment expliquer qu'un ressortissant d'un pays donné peut être désigné dans ce même pays pour devenir consul honoraire d'une autre nation ? En cas de conflits d'intérêts entre ces deux Etats ou entre leurs lois, est-ce que ce sont les intérêts du pays d'origine du consul qui doivent primer ou ceux de l'Etat accréditeur ? En vertu des dispositions contenues dans le titre II ,Chapitre III : «Régime applicable aux fonctionnaires consulaires honoraires et aux postes consulaires dirigés par eux» ( Article 58 à 68) de la Convention de Vienne, le pays d'envoi à la faculté de choisir une personnalité résidente dans le pays d'accueil qui peut être soit de la nationalité de ce pays ; de ses propres nationaux ou d'une autre nationalité pour proposer sa candidature aux autorités compétentes (ministère des Affaires étrangères) au poste de consul honoraire ; le pays de résidence restant libre d'accepter ou de refuser un candidat à ce poste. Le consul honoraire doit se considérer apolitique dans l'exercice de ses fonctions et en cas de conflit d'intérêt entre le pays qu'il représente et celui où il fonctionne il doit observer la neutralité à tout égard. Les attributions et compétences du consul honoraire sont-elles, comme celles des autres diplomates, organisées par la Convention de Vienne ou sont-elles régies par des traités bilatéraux entre les deux Etats concernées ? Les attributions et compétences du consul honoraires sont définies dans des statuts s'inspirant essentiellement de la Convention de Vienne sus-citée qui sont élaborés par le pays d'envoi et que le consul honoraire accepte expressément d'appliquer sans que l'exercice de ces attributions ne porte atteinte aux règles et lois du pays de résidence ou qu'elles soient en contradiction avec les dispositions consulaires internationales. Les consuls honoraires ont-ils le même statut que les autres membres du corps consulaire proprement dit, à savoir les immunités et autres privilèges ? L'instar de leurs collègues consul de carrière, des immunités et des privilèges sont également accordés aux consuls honoraires et qui sont intimement liés à la nature consulaire stricte que doit revêtir l'objet de ces immunités ou privilèges, comme l'exonération fiscale de toute rémunération octroyée au consul honoraire par le pays d'envoi en contrepartie de service «consulaire» rendu par celui-ci dans le pays de résidence , de même que «l'Etat de résidence est tenu d'accorder au fonctionnaire consulaire honoraire la protection qui peut être nécessaire en raison de sa position officielle »(Article 64 de la Convention de Vienne). A signaler qu'à ce titre, au Maroc, le consul honoraire est nommé par Dahir Royal, qui confère ce qui est appelé l' «Exequatur» de l'exercice effectif de cette fonction. Qu'en est-il de la coopération entre le Maroc et la république de Tchéquie et quels sont les domaines prioritaires ? La coopération entre le Maroc et la République Tchèque qui date seulement depuis le début des années 1990 se caractérise par un dynamisme de plus en plus croissant et tend vers le raffermissement de rapports d'échanges dans les domaines économiques. En conclusion il est remarquable de signaler à l'attention de vos lecteurs que la fonction de consul honoraire, assez mal connue jusqu'à il y une vingtaine d'années, commence à connaître un engouement et à devenir d'utilisation courante par de nombreux pays accrédités ou non au Maroc à travers les principales villes du Royaume dont le nombre total avoisine actuellement les soixante-dix. Et, à cet égard, une Association des Consuls honoraires accrédités au Maroc dénommée «UCHAM» va très bientôt voir le jour pour rejoindre ses consœurs affiliées à la "Fédération internationale des corps et associations consulaires (FICAC - www.ficacworld.org), dont le siège se trouve à Bruxelles.