Six millions de chômeurs, c'est trop Les résultats de l'Enquête sur la population active (EPA) du quatrième trimestre de 2012 en Espagne, publiés vendredi par l'Institut espagnol de la statistique (INE), a surpris par les données sur le chômage, qui a atteint 5.965.400 sans-emploi. Au vu de ce chiffre, le gouvernement conservateur se retrouve au pied du mur du fait qu'il s'est montré incapable de juguler la crise du marché du travail et stopper le départ des travailleurs au chômage. S'inspirant des expériences néolibérales tentées dans d'autres sociétés, il a échoué dans la tentative de redresser le tissu économique, relancer l'activité de l'entreprise et satisfaire les expectatives des travailleurs qui sont inquiets de perdre du jour au lendemain leurs postes d'emploi. La dernière statistique de l'INE faisant état de 5.965.400 chômeurs représente en outre un record jamais atteint, ce qui démontre que le taux de chômage a atteint le niveau le plus haut avec 26,02 % de la population active. De manière que 2012 peut être considéré comme la pire des cinq années de la crise qui dure depuis 2007. En détail, le chômage a augmenté de 187.300 personnes en termes trimestriels (4e trimestre), un chiffre inférieur à celui de 2011 à cause du recul de la population active qui a perdu 134.600 personnes. Le taux de chômage se situe ainsi à 26,02% à fin décembre dernier, ce qui démontre que depuis le quatrième trimestre de 2007, ce sont 4.037.800 personnes qui ont perdu leur emploi, un chiffre qu'aucun acteur social ou politique n'imaginait il y a quelques années. Au contraire, les prévisions parlaient d'un éventuel grand besoin de la main-d'œuvre, surtout étrangère. Ceci peut amener à dire que les réformes du marché du travail (entamées par le gouvernement socialiste et poursuivies par celui de Rajoy par la suite) ont effroyablement échoué. A la surprise des observateurs et chercheurs, la réforme mise en marche en février 2012 par le gouvernement conservateur (deux mois après sa nomination) est vu comme s'il s'agissait d'une machine de destruction de l'emploi et d'entreprises. D'autre part, l'EPA du quatrième trimestre apporte d'autres éléments qui jettent de la lumière sur la débâcle du marché du travail du fait que l'occupation a enregistré une forte chute trimestrielle de 363.300 personnes, soit une perte de 850.000 postes d'emploi en l'espace d'une année. En termes relatifs, le total des postes d'emploi a diminué de 4,78% alors que le nombre de personnes occupées s'est situé pour la première fois depuis 2003 au-dessous de 17 millions avec exactement 16.957.100 travailleurs qui cotisent à la Sécurité sociale, soit une perte de 3.519.800 emplois depuis le quatrième trimestre de 2007. Il est utile de préciser que l'EPA est une enquête basée sur des entretiens avec des ménages pour faire la radioscopie de la population active, prenant en considération l'ensemble des personnes âgées de 16 à 65 ans, y compris les personnes bénéficiant de prestations de chômage et celles qui sont en quête de leur premier emploi. Par contre, les chiffres fiables sur le chômage sont ceux apportés par le listing actualisé de la Sécurité sociale qui se base sur le total net des cotisations ainsi que ceux des centres de recrutement qui établissent un suivi de la population active. Actuellement, la proportion emploi/chômage en Espagne est de 2,8 à un, une proportion peu commune en Union européenne. Par secteurs, l'emploi descend dans tous les agrégats, particulièrement dans le secteur des services où se concentre 84% de l'emploi perdu au quatrième trimestre et 56,5% de l'emploi détruit en 2012. De même, 404.500 travailleurs à durée indéterminée ont perdu leur emploi, soit le chiffre le plus haut depuis le début de la crise de la destruction de l'emploi de caractère indéfini. L'EPA fait état aussi de la perte de leur emploi de 499.000 travailleurs contractuels (saisonniers). Cette évolution, observe le collectif «Economistes Face à la Crise», met en relief une croissante précarisation de l'emploi théoriquement de durée indéterminée que, après la réforme de 2012, a connu une évidente détérioration. Autre élément de l'EPA qui inquiète la société est celui des ménages dont tous les membres sont en chômage. Au quatrième trimestre de l'année dernière, 95.800 nouveaux ménages espagnols, se trouvant dans cette situation, ont été recensés portant le total à 1.833.700 familles dont aucun des membres n'est occupé, soit 258.700 ménages de plus qu'en 2011. Durant les cinq dernières années de crise, le chiffre des ménages dont tous les membres sont en chômage a quadruplé. En résumé, l'EPA du quatrième trimestre de 2012 invite à tirer certaines conclusions qui ne font qu'inquiéter davantage l'ensemble de la société espagnole. A titre d'exemple, la forte chute de la population active, spécialement la population masculine (les étrangers diminuent de moindre mesure), est la plus élevée depuis le déclenchement de la crise. Elle s'explique par le pourrissement de la situation économique ce qui a conduit à atteindre près de six millions de chômeurs. En 2012, le chômage a augmenté de trois points pour se situer à 26,2%, marquant le taux le plus élevé de l'histoire de l'Espagne. Il y a aussi plus de 1,8 million de ménages dont tous les membres sont sans emploi, ce qui représente une augmentation de 16% par rapport à 2011. La destruction de l'emploi s'est effectuée sans discrimination affectant aussi bien le travail à durée indéterminée que celui dit saisonnier dans l'ensemble des secteurs, ce qui corrobore une forte détérioration des conditions de vie et de travail des citoyens d'Espagne. Ceci a pour corollaire la poursuite, de la part du gouvernement, des politiques d'austérité extrême et de réductions des dépenses publiques, spécialement celles de caractère social.