Le ministre de la santé, le professeur Houssein Louardi, vient d'adresser à tous ses services le 02 Aout 2012 une circulaire sous le N° 99, relative à l'exercice illégale de la médecine à titre privé par les médecins fonctionnaires. Une situation qui n'est plus acceptable et contre laquelle le ministère de la santé entend lutter et ce dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueurs. Les éclaircissements sur une pratique malsaine. Le Professeur Louardi est mécontent, il y a de quoi. Dans la circulaire N° 99 en date du 02 Aout 2012 qu'il a adressé à tous les services de son département, le ministre de la santé ne cache pas sa déception en ce qui concerne l'exercice illégal de la médecine à titre privé par des médecins fonctionnaires. Une pratique qui n'est plus acceptable, puisqu'il est interdit aux fonctionnaires d'exercer à titre professionnel une activité lucrative privée ou relevant du secteur privé, de quelque nature que ce soit. Les fonctionnaires de l'Etat doivent consacrer l'intégralité de leurs activités professionnelles aux tâches qui leurs sont confiées. Cette règle d'interdiction de cumul des activités est inscrite dans l'article 15 du Dahir n° 1.58.008 du 24 Février 1958 formant statut général de la fonction publique. Pae ailleurs, la loi 10.94 relative à l'exercice de la médecine confirme dans son article 55, l'interdiction pour ces médecins de s'adonner à l'exercice de la médecine à titre privé. Ils ne doivent accomplir aucun acte professionnel en dehors de leur service public dans lequel ils sont affectés. La violation des dispositions de l'article 55 expose son auteur à des poursuites pénales. Il est à rappeler que la responsabilité dans l'exercice illégal de la médecine dans le secteur privé incombe à la fois aux professionnels de santé et à la structure ou l'établissement qui permet d'exercer dans ses locaux. C'est en l'occurrence le contenu de la circulaire N° 99 qui est très clair, limpide, sans ombrage aucun et le professeur Louardi dans un souci du respect de la législation en vigueur au sujet de la pratique illégale de la médecine, a tenu à rappeler à tous ses services qu'il est impératif de veiller au strict respect des dispositions de cette circulaire et que chaque responsable doit prendre toutes les mesures en son pouvoir pour assurer sa mise en œuvre. Des inspections périodiques et inopinées seront réalisées au sein des cliniques privées et des hôpitaux publics spécialement pour lutter contre la pratique illégale par des professionnels de santé fonctionnaires. Une médecine à deux vitesses L'exercice illégal de la médecine à titre privé par des médecins fonctionnaires au sein des cliniques privées, des cabinets médicaux, des centres de radiologie et autres établissements sanitaires à but lucratif avait depuis plusieurs années posé un sérieux problème aux différents ministres qui se sont succédé à la tête du département de la santé. Ce fut le cas notamment et entre autres pour le docteur Alami, Thami Al Khiary, le docteur Biadillah et bien entendu Yasmina Badou. Tous avaient en leur temps pris des décisions, élaboré des circulaires, notifié clairement leur désapprobation face aux dépassements, aux dérapages, aux égarements de la pratique illégale de la médecine par des médecins fonctionnaires qui s'adonnaient à cette pratique à outrance dans le secteur privé pour pratiquer des interventions chirurgicales, des accouchements , faire des césariennes ou procéder à des consultations et ce au profit de patients qui ont de quoi payer ou qui ont une assurance maladie. In est clair que les premiers à pâtir de cette pratique illégale sont les malades qui s'adressent à l'hôpital public, aux structures du ministère de la santé, celles et ceux qui n'ont pas de quoi payer et qui n'ont d'autre choix que de venir au centre de santé, ou au centre hospitalier. Mais ces malades sont très souvent contrains de rebrousser chemin, de garder leur mal en patience car bien des médecins sont absents ou désertent carrément leurs services pour aller se faire de l'argent dans le privé et délaissent les malades qui ne savent plus à quel saint se vouer. Par ce comportement irréfléchi, irresponsable, certains médecins ont contribué à creuser davantage le fossé qui existe entre les malades qui ont des moyens et ceux qui sont démunis et par la même occasion une médecine à deux vitesses. Comment en est – on arrivé là ? Il faut dire que la pratique illégale de la médecine à titre privé par des médecins fonctionnaires, c'est-à-dire celles et ceux qui sont payés par l'Etat, ceux qui perçoivent un salaire à la fin de chaque mois trouve son origine dans l'instauration du fameux Temps Plein Aménagé, plus connu sous le nom de T.P.A. C'est à notre humble avis la source de tous les problèmes, quoique dans sa formule initiale, le TPA visait un objectif bien précis et une catégorie de professionnels bien à part. Pour bien comprendre la situation présente , il faut revenir un peu en arrière. Le temps plein aménagé a été initié par feu SM Hassan II en 1995, afin de permettre à certains professeurs agrégés et les professeurs de la Faculté de médecine d'exercer une activité libérale lucrative à raison de deux après-midi par semaine, l'objectif étant de permettre à ces derniers de vivre dignement eu égard à leur statut, à leurs grandes compétences, chose qui a tout de suite séduit. Cette autorisation était limitée à 4 ans, à l'issue desquels l'Etat s'engageait à construire une clinique universitaire au sein de l'hôpital Ibn Sina où devait se dérouler en principe le TPA intra-muros. Tout avait été prévu dans les moindres détails pour éviter les dépassements et les débordements. Les textes d'application élaborés pour l'occasion limitaient cette activité à deux demi-journées par semaine (une pour la consultation, une pour le bloc opératoire) et dans deux cliniques différentes pour ce qui est de Rabat et à quelque chose prés idem pour Casablanca. Tout allait bien au début, les professeurs respectaient à la lettre le contenu des textes d'application du TPA. Les cliniques où se déroulaient ces activités étaient ravies car le nombre de patients augmentait de jour en jour notoriété de certains professeur oblige. L'argent rentrait dans les caisses et dans les poches aussi. Comme chacun le sait, plus on gagne d'argent, plus on en désire. Deux demi-journées ne suffisaient, on est passé a 3, puis à 4 demi-journées, mais cela demeurait encore insuffisant, alors les demi-journées sont devenues des journées entières et plus tard des semaines et des mois entiers à telle enseigne que certains professeurs finissaient par déserter complètement l'hôpital et même la faculté. TPA = Temps Plein d'Absentéisme Le temps plein aménagé (TPA) est une pratique courante dans plusieurs pays, son but vise à retenir dans le service public les meilleures compétences qui, sans cela, seraient tentées d'aller négocier leurs services dans le privé, autrement plus attractif et rémunérateur. Seulement chez nous, ça ne se passe pas toujours comme on le souhaite. Avec le temps, ce fut la déferlante, nombreux furent les professeurs qui commencèrent à déserter leurs services pour se faire de l'argent, toujours plus d'argent dans le privé qui leur ouvre grand les bras. Qui dit argent, dit tentation, et dans le domaine de la santé, de l'argent on peut en gagner beaucoup si on a des compétences. Dans ce registre, le TPA est devenu comme une maladie contagieuse qui a fini par contaminer les autres médecins qui n'ont rien à voir avec les professeurs enseignants des facultés de médecine qui s'adonnent de manière outrancière à cette pratique très lucrative. Tout le monde s'est mis au TPA qui est devenu synonyme de «Temps plein d'absentéisme». Il convient de préciser ici que tous ces praticiens ne sont pas à «mettre dans le même panier» : beaucoup sont d'excellents professionnels, dévoués à leurs malades, et ne recourent pas ou très peu au privé. D'autres, il est vrai, sont davantage attirés par l'appât du gain. Le problème, pour ces derniers, est surtout qu'ils ne sont contrôlés par personne. Dans cette histoire de TPA qui devait durer 5 ans et prendre fin en principe en 2001, une période transitoire mais suffisante qui aurait permis aux cliniques universitaires de voir le jour et, partant, aux professeurs agrégés de continuer à exercer légalement le TPA en intra muros. TPA : Une pratique illégale Rien de tout cela ne fut. Les choses, à ce jour, n'ont toujours pas évolué. Le TPA a pris fin légalement en 2001, mais comme on dit chez nous, c'est le temporaire qui dure, une situation jugée aujourd'hui illégale et donc contraire aux lois en vigueurs. Le temps plein aménagé est devenu au fil des ans le temps plein d'absentéisme de ceux censés encadrer les futurs médecins qui parfois sont livrés à eux-mêmes, chose que l'on peut aisément relever au niveau de certains services. Il faut rappeler que depuis 2001, la question du TPA a toujours été posée, les ministres qui se sont succédé à la tête du département de la santé ont tenté chacun avec ses moyens, ses connaissances, ses compétences de trouver une solution à cet épineux problème, mais force est de constater que les choses n'ont pas évoluées. C'est pourquoi le ministre de la Santé, le professeur Houcine Louardi, avait entrepris une concertation avec toutes les parties concernées par la pratique du TPA (professeurs agrégés, l'ANCP, les syndicats, le CNOM, la SMSM...) il entend remettre de l'ordre et remédier à tout ce qui légalement devrait avoir été fait par ses prédécesseurs qui, malheureusement, ont laissé les choses pourrir. On peut autoriser le TPA, mais à condition d'en respecter les bases fondatrices et mettre en place des garde-fous, une nouvelle réglementation qui soit en phase avec la période actuelle et le nouveau concept de la santé. Les nouvelles règles qui régiront le TPA, si elles venaient à voir le jour, devraient avoir pour but non pas d'entraver la pratique du TPA, mais permettre d'exercer la profession dans les règles de l'art, dans le respect de l'éthique et de la déontologie, c'est à mon sens ce qui est le plus important. Ceci étant , on peut espérer que la question du TPA puisse faire partie des sujets qui seront débattus en long et en large lors du prochain colloque national de la santé au mois de Juillet , un événement dont l'importance n'échappe à personne et plus particulièrement les professionnels de la santé des secteurs public et privé ainsi que tous les autres intervenants du système de santé . Il ne fait aucun doute que des solutions seront trouvées afin de permettre aux uns et aux autres d'exceller dans la pratique du noble art pour le plus grand bien de nos concitoyens conformément aux hautes directives de sa majesté le roi Mohammed VI qui entoure de sa sollicitude sans cesse renouvelée le secteur de la santé . Il appartient à tous les professionnels de sante qui travaillent dans le secteur public (professeurs - médecins - infirmiers ...) de se montrer digne de la confiance qui est placée en eux. Pratiquer la médecine dans des structures privées de manière outrancière pat certains professeurs a tel point d'oublier le service public est inacceptable. Il ne faut pas oublier que les professeurs des facultés de médecine sont parmi les fonctionnaires qui ont un salaire respectable, très respectable même et qu'à ce titre ils devraient savoir raison garder et surtout être aux cotés de leurs étudiants et de leurs patients plus souvent D'ici là, portez-vous bien Que peut – on retenir de la circulaire du ministère de la Santé ? Exercice illégal de la médecine à titre privé par des médecins fonctionnaires: circulaire du ministère de la Santé N° 99 du 02 Aout 2012 La présente circulaire a pour objet de rappeler aux médecins du secteur public les obligations découlant de leur statut de fonctionnaires de l'Etat ainsi que les règles auxquelles ils sont soumis en vertu de la loi n°10-94 relative à l'exercice de la médecine. En leur qualité de fonctionnaires, il leur est en effet interdit d'exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Cette règle d'interdiction est inscrite dans l'article 15 du dahir n°1.58.008 du 24 février 1958 formant statut général de la fonction publique. Son inobservation constitue un manquement aux obligations professionnelles. En tant que faute grave, elle est de nature à justifier la mise en œuvre de la procédure de suspension immédiate prévue par l'article 73 du statut précité et la traduction du fonctionnaire fautif devant le conseil de discipline. Par ailleurs, la loi N°10.94, relative à l'exercice de la médecine a prévu des règles particulières à l'exercice de la médecine à titre privé par des médecins fonctionnaires. En son article 55, cette loi confirme l'interdiction pour ces médecins de s'adonner à l'exercice de la médecine à titre privé. Ils ne doivent accomplir aucun acte de leur profession en dehors du service public auprès duquel ils sont affectés.