La hausse plus ou moins significative des recettes fiscales suffirait-elle à couvrir les charges ordinaires de l'argentier du royaume ? La réponse est négative. Parmi les éléments d'informations publiés par la Trésorerie générale du royaume, on retiendra en particulier l'envolée des dépenses ordinaires et la hausse inquiétante des charges du service de la dette. Le bulletin mensuel de statistiques des finances publiques de la TGR a l'avantage de rendre compte de l'évolution de l'exécution du budget général de l'Etat durant les quatre premiers mois de l'année 2012. A fin avril, les recettes ordinaires s'inscrivent en hausse de 7,2% à 63,9 milliards DH. L'essentiel de ces recettes provient de la fiscalité domestique (IS, IR et TVA), qui a rapporté près de 39 milliards DH. De leur part, les recettes douanières se sont bien comportées, assurant quelque 18 milliards DH, grâce à la TVA à l'importation et à la TIC sur les produits énergétiques. En regard, les dépenses ordinaires totalisent, à fin avril 2012, 69 milliards DH, en hausse de 20,3%. Cette envolée des dépenses provient, explique-t-on dans le bulletin, de l'augmentation des charges de la compensation de 65%, des salaires de 16,7% et des charges en intérêts de la dette de 22,7%, Les dépenses de fonctionnement ont absorbé 61,3 milliards DH, dont 32,3 milliards pour les traitements et salaires. Les charges de compensation, en forte augmentation, ont englouti plus de 16,5 milliards durant les quatre premiers mois. Ce dérapage s'est fait sentir en l'occurrence au niveau des dépenses d'investissement, qui ont baissé de 33,2% à seulement 10,9 milliards DH au lieu de 16,3 milliards en avril 2011. Selon la TGR, l'évolution de la structure des dépenses du budget général entre avril 2011 et avril 2012 fait ressortir une augmentation de la part du personnel et de la compensation au détriment de celles de l'investissement et du matériel. Les salaires servis par la TGR à fin avril 2012 ont atteint 32,3 MMDH contre 27,7 MMDH une année auparavant, soit une augmentation de 16,7% en raison notamment de l'impact des recrutements et promotions opérés ainsi que de la hausse des salaires de 600 DH décidée dans le cadre du dialogue social, avec effet à partir de mai 2011. Ainsi, le déficit budgétaire s'est établi à 5,2 milliards DH contre un solde positif de 2,2 milliards DH un an auparavant. Compte tenu d'un besoin de financement de 15,6 milliards DH et d'un flux net négatif du financement extérieur de 2 milliards DH, le Trésor a eu recours au financement intérieur pour un montant de 17,5 milliards DH. Par ailleurs, les charges en intérêts de la dette ont atteint de 8,3 milliards DH à fin avril 2012, en augmentation de 22,7%. Cette évolution s'explique par l'accroissement des charges en intérêts de la dette intérieure de 21% et celles de la dette extérieure de 45,8%. S'établissant à 333,5 milliards DH à fin avril 2012, l'encours de la dette intérieure est en augmentation de 6,1% par rapport à son niveau à fin décembre 2011. Ceci s'explique par le recours du Trésor au marché des adjudications pour un montant net de 19 MMDH. Pour nombre d'observateurs, l'évolution des dépenses ordinaires a de quoi susciter des inquiétudes quant à la croissance de l'économie nationale. Les espoirs d'une reprise économique risquent de céder la place à la désillusion. Les dernières prévisions de croissance ont été revues à la baisse. Pour la première fois depuis les années de sécheresse, le Maroc enregistre une baisse de plus de 40% de sa production céréalière. Quant à la production industrielle, elle est plus ou moins impactée par la hausse des prix et le tassement de la demande étrangère adressée au pays. Par rapport au service de la dette, la montée fulgurante des charges en intérêts de la dette tant intérieure qu'extérieure signifie que la dette devient plus lourde et la croissance économique atone.