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Caisse de compensation : L'inévitable réforme d'un gouffre à subventions
Publié dans Albayane le 11 - 04 - 2012

De l'avis même des décideurs, la réforme de la Caisse de compensation est devenue une nécessité, dans un contexte marqué par l'aggravation du déficit budgétaire mais aussi dans le souci de la réorienter vers la réalisation de plus d'équité sociale. Il existe une quasi-unanimité autour de cette réforme tant chez les officiels, les partenaires sociaux que les experts. Car, en dépit de l'évolution erratique des sommes injectées au cours des dernières années, le système de compensation, tel que pratiqué actuellement, a montré ses limites et n'a que marginalement répondu à la mission de filet social, face à la flambée des coûts de l'énergie et le renchérissement des prix.
En déviant fortement de ses orientations, le présent système de compensation subventionne les classes aisées au détriment des couches les plus défavorisées, soit 20 pc des classes riches bénéficient de 75 pc des subventions, tandis que 20 pc des couches défavorisées ne profitent que de 1 pc d'aide, selon des statistiques avancées par El Hassane Bousselmame, Directeur de la Concurrence et des Prix lors d'une présentation récemment sur la réforme du système de compensation +La caisse de compensation : des chiffres révélateurs+
Durant les 5 dernières années, la caisse de compensation a su maintenir le taux d'inflation sous la barre de 2 pc, un constat certes favorable mais qui a dû engloutir une enveloppe lourde de 150 milliards de Dirhams (MMDH) depuis 2002.
Lors de l'exercice précédent, la charge de la compensation a environné 51 MMDH, s'approchant d'une manière non hasardeuse du déficit réalisé au cours de la même année qui s'est établi à 56 MMDH. Par conséquent, une forte relation de cause à effet se dresse clairement entre le déficit budgétaire et la compensation, prise comme première cause de son creusement.
Par ailleurs, la réforme de la caisse de compensation constitue un énorme manque à gagner pour le PIB marocain. Représentant 6,1 pc du PIB en 2011, la caisse absorbe une grande partie des ressources étatiques qui peuvent servir au financement de projets d'investissements, catalyseurs de grande valeur ajoutée et d'emplois, d'où l'impératif d'établir un plafond aux dites charges, soit 3 pc du PIB, selon le gouvernement marocain. +Le système de compensation : aubaine ou gangrène ?+
La Restructuration des secteurs subventionnés s'impose ainsi en force comme un premier pas vers une caisse aussi efficace qu'efficiente. Cette approche implique ainsi une synchronisation avec les intervenants des secteurs concernés.
Le ministre délégué chargé du Budget, Idriss Azami Al Idrissi qualifie ainsi d' insupportables les charges de la compensation, ajoutant que la caisse engendre un essoufflement du budget de l'Etat, qui se trouve dans l'incapacité de soutenir davantage une charge dépensant les 50 MMDH, appelant par la même occasion, les différents agents économiques à une collaboration pour l'instauration de la bonne gouvernance.
En guise d'orientation générale de la caisse, le ministre délégué chargé des affaires générales et de la gouvernance, Mohamed Najib Boulif a souligné l'obligation de couper cours avec tout type d'économie de rente, en précisant que la nouvelle réforme doit être axée sur une vue d'ensemble mettant à profit des acteurs économiques consommateurs ou participant à la chaîne de production, dans l'objectif d'améliorer la productivité et la rentabilité tout en préservant la paix sociale.
Afin d'épargner les conséquences qui peuvent découler d'un saut suicidaire et qui peuvent secouer les équilibres socio-économiques du pays, le ministre de la gouvernance soutient fortement un scénario graduel, basé sur la libéralisation progressive des prix.
Il encourage également des actions de création de fonds similaires à celui de la compensation afin d'alléger le fardeau étatique en matière de charges, tout en renforçant un minimum de bien-être social. Pour la CGEM (Confédération générale des entreprises au Maroc), le système de compensation, dont l'urgence de la réforme fait l'unanimité, devrait se réaliser autour d'un double plan, à savoir un ré-engineering du système de compensation avec, en trame de fond, un ciblage optimal des catégories éligibles (les pauvres et les vulnérables).
Il s'agit aussi, selon le patronat marocain, de la redéfinition de la politique sociale sur une base conjuguant protection contre les insécurités et les vulnérabilités, d'une part, et le renforcement par l'investissement social des capacités des populations défavorisées, d'autre part.
M. Mohamed Bouzahzah, professeur d'économie à l'Université Mohammed V-Souissi de Rabat, stipule, quant à lui, qu'une réforme graduelle en profondeur de la caisse de compensation (s'étalant sur 5 ans jusqu'à 10 ans) devrait porter sur la suppression progressive des subventions allouées aux produits énergétiques, en premier lieu, et qui seront compensées par des réformes fiscales plus rigoureuses, notamment la baisse de la TVA. Il a exprimé la nécessaire révision des mesures fiscales nationales, qualifiée de non équitables.
M. Bouzahzah a également estimé que la subvention des produits énergétiques n'encourage pas seulement la création d'externalités négatives, telle que la pollution, mais entraine également une balance commerciale déficitaire, ébranlée par le soutien des produits étrangers.
Pour sa part, l'Office National Interprofessionnel des Céréales et des Légumineuses juge difficile de maintenir le prix du pain stable, dans un contexte d'équilibre fragile du marché, préconisant ainsi une adoption progressive d'un programme de réformes, s'étalant sur plusieurs années.
Quant au Groupement des Pétroliers au Maroc, il juge que la compensation introduit des dysfonctionnent qui doivent être revus dans l'immédiat, appelant à une réforme de ciblage avec exactitude, qui fera parvenir la subvention aux personnes les plus démunies.
Le directeur de la caisse de compensation, Najib Benamour, estime, quant à lui, nécessaire de conserver la subvention octroyée aux produits de première nécessité notamment le sucre, le blé et le gaz, afin de préserver le pouvoir d'achat du citoyen.
Il a recommandé par la même occasion un système de traitement des dossiers électroniques des bénéficiaires afin de réduire la durée de traitement tout en garantissant la transparence et l'équité de l'action.


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