Comment lutter contre les problématiques rencontrées au niveau de l'éducation non formelle ? Quelles sont les approches que le Maroc peut adopter pour prévenir la déscolarisation ? Quelle évaluation peut-on faire pour garantir l'efficacité des programmes ? Ce sont là les interrogations auxquelles doivent répondre les participants à la deuxième rencontre nationale sur l'éducation non formelle, organisée par le secrétariat d'Etat chargé du dossier en collaboration avec l'Unicef, l'Unesco, l'IPEC-Maroc et la communauté francophone de Belgique (CFWB/APEFE). «Cette rencontre vient après cinq ans de la tenue de la première édition en février 2001. Après ce séminaire, le secteur a connu un changement palpable au niveau de la stratégie et de l'accueil des enfants», explique Anis Birou, secrétaire d'Etat chargé de l'Alphabétisation et de l'Education non formelle. Il s'agit maintenant d'une étape d'évaluation et d'échanges d'expériences. Il est essentiel d'adopter de nouvelles approches pour lutter contre l'analphabétisme des racines. En fait, malgré les efforts consentis depuis le lancement du programme en 1997, il reste encore beaucoup à faire. Des milliers d'enfants demeurent encore en dehors du système scolaire. Le rythme actuel des programmes d'intervention pour les enfants jamais scolarisés ou déscolarisés ne permettra pas d'atteindre les objectifs de la décennie de l'éducation. Le phénomène de l'abandon scolaire ne cesse de prendre de l'ampleur particulièrement en milieu rural. L'analphabétisme est lié directement à la pauvreté. Il a une incidence non seulement sur les couches sociales les plus démunies. Mais, ses conséquences nuisent à l'économie du pays. «non scolarisation au Maroc a un coût très cher. Celui-ci est estimé à 1 % du PIB. L'analphabétisme hypothèque l'avenir du pays. Les plus démunis restent encore les plus exclus de leurs droits», tient à signaler Maie Ayoub Von Khol, représentante de l'Unicef au Maroc. Le même constat est partagé par le représentant de l'Unesco : «Que l'offre éducative soit formelle ou non formelle, l'objectif est l'autonomisation des individus. L'école était et reste le lieu où la grande majorité acquiert une grande connaissance de base. Encore faut-il que les enfants restent plus longtemps dans l'école.»Et c'est là où le problème existe. La déperdition scolaire au Maroc est très importante. On a déployé des efforts au niveau de l'éducation non formelle, en vain. En effet, des milliers d'enfants quittent chaque année l'école à un âge très précoce. Ainsi, on ne peut pas contrôler le nombre des bénéficiaires. Mais depuis 2006, le secrétariat d'Etat a compris la plus haute importance de la prévention contre la déperdition scolaire. Au démarrage de ce programme, on enregistrait trois millions d'élèves non scolarisés. Actuellement, nous sommes à un million d'enfants. Ils sont dispersés et l'on n'arrive pas à constituer des classes de 15 ou 20 élèves. La stratégie a été tournée vers la prévention. La lutte contre l'abandon scolaire est un programme qu'on a entamé cette année : 150.000 enfants. C'est trois fois ce qu'on fait au niveau de l'éducation non formelle pour les non scolarisés. La démarche préventive est moins coûteuse et plus efficace. On apporte le soutien aux enfants les plus pauvres qui n'arrivent pas à suivre dans l'école leurs cours. Des cellules de veille ont été créées au niveau de tous les établissements scolaires pour le soutien pédagogique ou le soutien social. Le parrainage est également l'un des axes de la stratégie de l'éducation non formelle. Il consiste en la prise en charge des frais d'encadrement éducatif d'enfants privés d'école. Tous les intervenants lors de cette rencontre se disent optimistes malgré les obstacles. On veut asseoir les fondements d'un véritable saut stratégique. Rachid Belmokhtar, ancien ministre qui a lancé le programme de l'éducation non formelle en 1997, a tenu, lui aussi, à être présent lors de l'ouverture du séminaire. «C'est un projet qui me tient énormément à cœur. Il faut donner à tous une chance d'étudier «, dit-il avec une grande émotion en se rappelant avec nostalgie le temps passé. Reste à souligner qu'il ne faut plus toujours prétendre manquer de moyens car l'investissement dans l'éducation est, on ne peut plus, nécessaire. Seul cet investissement peut contribuer au développement de la société. Sit-in des animateurs : L'intégration dans la fonction publique, principale doléance Au moment où la deuxième rencontre nationale sur l'éducation non formelle ouvrait ses travaux, des dizaines d'anciens animateurs sont venus en masse manifester leur colère et leurs doléances. Des cris se levaient de part et d'autre, empêchant parfois de bien suivre les intervenants. Ils sont au total 730 éducateurs, tous ont commencé leur travail en 1997, date du démarrage du programme de l'éducation non formelle. Leur principale requête : intégrer la fonction publique. «Quatre ministres se sont succédés depuis 1997. Au début, M. Belmokhtar nous a demandé de faire deux ans de service civil et après notre situation sera régularisée. Mais, il est parti avant ces deux années. Ensuite, Ismaïl Alaoui, nous a proposé l'intégration par étape ; chose que nous avons refusée. Puis, est venu M. Sâaf qui nous a fait une autre proposition…», explique Zehhari Abderrahim, vice-coordonnateur national du Comité national des animateurs pédagogiques. En 2003, les éducateurs ont observé une grève de faim d'une durée de 45 jours. Mourants, ils ont reçu une promesse de la part du ministère. Il s'agissait de passer les examens des écoles de la formation des cadres sans prendre en compte ni l'âge ni la présélection. «C'est une promesse qui n'a jamais été honorée». Depuis mai 2005, ils ne travaillent plus. Ils ont été remplacés par d'autres animateurs. Aujourd'hui, le dialogue est interrompu. Des sit-in sont toujours organisés devant le ministère de l'Education nationale et le secrétariat d'Etat chargé de l'Alphabétisation et de l'Education non formelle. Pour eux, ils sont des éducateurs, on ne peut plus compétents. Ils ont reçu cinq sessions de formation dans toutes les disciplines pédagogiques. A l'heure actuelle, ils continuent de menacer de se suicider si leurs requêtes ne sont pas prises en considération.