La France a-t-elle parvenu à écarter l'Espagne de la course à construire des sous-marins pour le Maroc ? C'est du moins ce que laisse entendre la sortie par voie de presse de la société publique Navantia. Le 21 janvier, le quotidien La Tribune affirmait que le Maroc «souhaite à terme acquérir des sous-marins et ont déjà consulté les principaux constructeurs comme TKMS, Navantia et Naval Group». Après trois semaines de silence, la société espagnole apporte un démenti aux révélations de la publication française. «Navantia n'a reçu aucune demande de la part du Maroc portant sur une éventuelle construction de sous-marins pour sa marine», précise un porte-parole de la société publique espagnole au média ECD. Et d'ajouter que l'entreprise «insiste que ses services n'ont aucune trace qu'une telle requête a eu lieu». ECD estime pour sa part «qu'il y ait eu ou non contact avec Navantia, le projet marocain d'étendre sa force navale à l'arme sous-marine serait un élément très important à prendre en compte dans l'équilibre naval autour du détroit de Gibraltar, en Méditerranée occidentale et aux alentours les Iles Canaries». Pourquoi ce démenti maintenant ? Le timing du démenti de Navantia n'est pas sans soulever des interrogations. D'abord, il intervient moins d'une semaine après l'adoption, mardi 3 février par la Chambre des conseillers, de deux projets de loi délimitant les frontières maritimes du Maroc. Un dossier qui fait face au rejet de partis de l'opposition en Espagne. Les formations de la majorité gouvernementale sont sur la même longueur d'onde mais sont contraintes d'observer le silence pour ne pas contrarier Rabat. La hiérarchie militaire ne serait guère enthousiaste à offrir au Maroc le moyen à même de lui assurer de rompre cet «équilibre» avancé par ECD. Par ailleurs, il est lieu de faire le parallèle entre la sortie du porte-parole de Navantia et la visite qu'a effectuée, les 5 et 6 février, la ministre française des Armées au Maroc. Un déplacement au cours duquel Florence Parly a eu des entretiens séparés avec le ministre délégué à l'Administration de défense nationale, Abdellatif Loudiyi, et le général de corps d'Armée, inspecteur général des FAR, Abdelfattah Louarak. L'article de La Tribune du 21 janvier a annoncé que Naval Group «travaille sur un projet de reprise d'infrastructures dans le port de Casablanca, le deuxième du Maroc, afin de réaliser la maintenance des navires militaires marocains (trois corvettes Sigma vendues par le néerlandais Schelde en 2011 et 2012 et la frégate multimissions FREMM vendue en 2008) ainsi que de navires étrangers». Pour l'instant Navantia n'a pas encore apporté un «démenti» à l'offre qu'elle avait présenté au Maroc de commander deux de ses patrouilleurs pour 260 millions euros. Visiblement, pour les Espagnols, ce projet ne serait pas de nature à rompre l'équilibre en Gibraltar, en Méditerranée et aux Iles Canaries. Article modifié le 2020/02/10 à 15h01