Les attaques terroristes commises au nom de l'islam sur le sol français ont contribué à susciter une méfiance accrue envers les fidèles musulmans. Les Français sont certes plus tolérants avec les musulmans, mais aussi plus méfiants à l'égard de l'islam. C'est ce qui ressort de l'indice de tolérance à l'altérité mesuré par la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), relayée par Le Monde. Cette dernière, présidée par Christine Lazerges, professeure de droit et ancienne députée socialiste, note effectivement une plus large tolérance des Français avec les fidèles de confession musulmane mais, parallèlement, une «méfiance grandissante» envers la deuxième religion de France. Ce rapport annuel, remis mercredi 21 mars au Premier ministre Edouard Philippe, mesure la «perméabilité de la société aux opinions racistes, antisémites et xénophobes», grâce à un panel de questions posées par sondage. «Il en ressort notamment que l'évolution récente de l'opinion à l'égard des musulmans va dans le sens d'un moindre rejet», précise le quotidien français. Nouvelles générations Ainsi, 81% des personnes interrogées jugent que «les Français musulmans sont des Français comme les autres», et 82% estiment qu'«il faut permettre aux musulmans de France d'exercer leur religion dans de bonnes conditions». De plus, les actes racistes, antisémites et antimusulmans ont globalement baissé en 2017 en France, a annoncé début février le ministère de l'Intérieur. Cette plus grande tolérance à l'égard des musulmans s'explique d'abord par le «renouvellement des générations, chaque nouvelle cohorte interrogée ayant grandi dans un environnement plus éduqué et mondialisé que la précédente». Le prisme à travers lequel certaines actualités sont abordées par les responsables politiques et les médias est également un facteur d'influence. L'indice de tolérance à l'altérité avait chuté en 2004 et 2005 lors des émeutes dans les banlieues, dont la couverture médiatique avait parfois été jugée «caricaturale». L'une des minorités les moins acceptées Si l'heure semble plutôt à un regain de tolérance, les musulmans «restent cependant l'une des minorités les moins acceptées, le rejet s'étendant souvent de l'islam à l'ensemble de ses fidèles», relève la Commission, allant même jusqu'à évoquer le terme de «cristallisation». Dernier exemple en date, la tribune signée par 100 intellectuels sur le site du Figaro, publiée lundi 19 mars, mettant en garde contre un prétendu «séparatisme islamiste» et dénonçant un «nouveau totalitarisme». Des expressions lourdes de sens qui trahissent le malaise de la société française face à l'islam. Ce dernier se traduit, dans le baromètre de la CNCDH, par la prédominance d'opinions comme : «L'islam est une menace pour l'identité de la France» (44% des sondés). Plus précisément, 61% estiment que le port du voile (non intégral) peut «poser problème pour vivre en société», et à moindre titre que le sacrifice du mouton lors de l'Aïd El-Kébir (33%) et les prières (30%) ne sont pas compatibles avec la société française. «L'essor de l'islamisme radical, la multiplication des attentats commis en son nom, les débats autour des signes religieux dans l'espace public ont progressivement mis l'islam au cœur du débat politique, en contribuant à créer, au sein de la société, un malaise général», reconnaît la Commission.