La poire cactus, plus communément appelée la figue de barbarie est ce fruit très convoité et consommé en ces temps chauds au Maroc. Produit sur tout le pourtour méditerranéen, la figue de barbarie est aujourd'hui très menacée par un insecte ravageur, la cochenille à carmin. Explications. Souvent réticents à l'idée de devoir l'éplucher compte tenu des épines qui la recouvre, la figue de barbarie fait malgré tout le bonheur des consommateurs. Au Maroc, le fruit est de saison en ces temps estivaux où culmine la vague de chaleur. En effet, c'est lorsque le mercure grimpe que la culture de la plante et du fruit se fait. Cultivée à grande échelle au Mexique d'où la plante est originaire, le Maroc n'est pas en reste. Et pour cause, la figue de barbarie constitue une ressource importante dans plusieurs régions du royaume ainsi que d'Afrique du nord et du pourtour méditerranéen. Selon le ministère de l'Agriculture marocain, «la culture du cactus couvre actuellement une superficie de 160 000 hectares, notamment dans les régions de Marrakech-Safi, Casablanca-Settat et Guelmim Oued Noun.» Cela dit, depuis 2015 «un nouveau danger a été signalé pour la première fois dans la région de Sidi Bennour sur cette culture. Il s'agit de la cochenille à carmin, un ravageur spécifique au cactus qui ne constitue aucun risque ni pour l'homme ni pour les animaux», ajoute le département de Aziz Akhannouch. En effet, dans un communiqué datant du 15 juin dernier, le ministre de tutelle avait mis en place des dispositions d'urgence pour remédier à ce fléau qui cause de grands dégâts de manière rapide. La menace de la cochenille à carmin en Méditerranée A cette époque, les infestations concernaient une large superficie, plus particulièrement «les régions de Sidi Bennour, Rhamna, Settat, El Jadida et Safi.» C'est dans ce sens que depuis l'avènement du Plan Maroc Vert, lancé en 2008, «près de 500 millions de Dh ont été investis dans le développement de la filière du cactus, notamment pour la plantation de plus de 40 000 hectares, l'aménagement des pistes, la construction et l'équipement de 8 unités de valorisation», précise le ministère de l'Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts. Début juin le plan d'urgence avait été enclenché lors d'une rencontre réunissant Aziz Akhannouch, «des directeurs centraux et régionaux concernés du département de l'agriculture ainsi que l'Agence de Développement Agricole, l'Office National de Sécurité Sanitaire et Alimentaire (ONSSA), de l'Institut National de Recherche Agronomique (INRA) et l'Office National du Conseil Agricole (ONCA).» Principale menace qui guette l'Opuntia ficus-indica, ou le figuier de barbarie, la cochenille à carmin qui ravage la plante de manière rapide, et est nocive pour le fruit. Une problématique que le minsitère a mis en ligne de mire grâce aux actions entreprises ces dernières semaines. Contacté par Yabiladi, le département de Aziz Akhannouch assure que «le plan est actuellement en application.» «Les régions les plus productrices n'ont pas été touchées [par la maladie]. Le plan porte sur la destruction des foyers touchés et vise essentiellement à brûler et enterrer les plantes malades. Nous avons également commencé à developper un programme scientifique pour essayer de lutter grâce aux médicaments et nous avons mis des ceintures de sécurité autour des zones saines et qui sont les plus productrices comme le sud à Sidi Ifni.» Ces mesures d'urgence ont nécessité une enveloppe budgétaire de 80 millions de dirhams et viennent compléter le programme lancé en juillet 2016 pour lutter contre la cochenille. La cochenille à carmin. / Ph. DR La figue de barbarie amenée à disparaitre ? Ce phénomène révolte non seulement les agriculteurs mais également les écologistes tels que Michel Tarrier. En effet, c'est dans un post Facebook que le Français explique qu'en Espagne, «le Chumbo (nom espagnol du fruit de ce Cactus) n'était pas très commercial et toutes les énergies sont désormais concentrées sur un fruit tropical comme la Mangue dont la culture industrielle démolit les sols et rend les paysages d'une rare laideur.» Il assure plus loin dans son écrit qu'aujourd'hui «l'heure est à la désertification concertée et encouragée (quoi qu'on en dise...) et faut faire un max de pognon pour en terminer vite, vite, vite.» Contacté par Yabiladi, l'écologiste affirme : «Autour de chez moi (Grenade) des pans entiers sont blanchis par la cochenille et moribonds, sans aucune exception.» Effectivement, il pointe du doigt : «Outre mille et uns usages comestibles, cosmétiques et thérapeutiques, tous plus ou moins tombés en désuétude, le Figuier de Barbarie était cultivé pour l'élevage de la cochenille du Mexique, Dactylopius coccus. (...) En cas de forte infestation, la cochenille provoque le dépérissement de la plante. On ne sait rien de cette "pandémie" dont les premiers indices en Méditerranée remontent à plus de 10 ans. Il n'existe aucun traitement ni manuel, ni chimique pour en limiter les dégâts. Il se peut que le réchauffement climatique ait encore son mot à dire sur cette nouvelle modification du paysage botanique.» Concernant le métier, les agriculteurs estiment que cette maladie est ravageuse. Mhamed, agriculteur à Douda, douar dans la province de Chtouka-Ait Baha, nuance cependant et souhaite rassurer : «ici nous n'avons jamais eu à faire à cet insecte heureusement, mais nous en avons entendu parler dans les autres régions comme Rhamna et Doukkala où les cultures ont été ravagées.» Le professionnel du secteur précise également qu' «il existe un bureau local émanant du ministère de l'Agriculture où les professionnels dont les plantes ont été touchées par la maladie peuvent aller s'approvisionner en médicament.» Début d'infestation. / Ph. DR Voilà de quoi conforter sur l'avenir de la figue de barbarie au Maroc. Mais Michel Tarrier se veut plus pessimiste : «Ce qu'on peut déjà dire, c'est que c'en est bel et bien finit pour le Figuier de Barbarie, tant dans le Sud de l'Espagne que dans les Pays du Maghreb. Le temps que les haies et les pans d'Opuntia ne disparaissent, l'aspect maladif rend bien moche le paysage qui n'avait pas besoin de cela, déjà partout enlaidi par la désertification, les incendies, une agriculture dégradante et la bétonisation des littoraux.» Et le Français de conclure :«Le Palmier-dattier, attaqué par des parasites de plus en plus "efficaces" viendra aussi à disparaitre de la Méditerranée occidentale où on s'acharne erronément à en faire une plante ornementale emblématique de nos avenues et littoraux "touristiques".»