Après avoir reçu Martin Kobler, émissaire de l'ONU en Libye, fin avril, le Maroc déroule le tapis rouge pour Aguila Salah Issa, le président du parlement de Toubrouk. Auparavant Rabat avait parié sur le gouvernement Sarraj, reconnu par la communauté internationale alors qu'Aguila avait joué la carte de l'Algérie. Le Maroc est-il entrain de réviser sa politique libyenne ? La réunion d'hier après-midi, entre le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, et le président du parlement libyen (siégeant à Toubrouk et proche du maréchal Khalifa Haftar), Aguila Salah, le laisse penser. En effet, il y a quelques semaines cette réunion était de l'ordre de l'impossible ; Aguila n'ayant jamais caché son opposition à l'accord de Skhirat. En février dernier, il n'avait pas hésité à le qualifier de «mensonge». En mars, et sous l'impulsion du même Aguila, le parlement de Toubrouk avait déclaré l'entente signée le 17 décembre 2015 nulle et non avenue, abrogeant ainsi son vote du 25 janvier 2016 en faveur du texte. Le temps est désormais à la convergence des points de vue. Un communiqué du département des Affaires étrangères, publié à l'issue des entretiens entre les deux parties, affirme que le responsable libyen a exprimé son «appui» à l'accord de Skhirat. Néanmoins, il a émis le souhait d'y apporter des «modifications sur certains points» en vue de son «adoption par le parlement (de Toubrouk)». Par ailleurs, le Libyen a eu des entretiens avec le président de la Chambre des représentants, Habib El Malki. Les deux hommes ont même convenu de mettre en place une commission parlementaire conjointe. Aguila s'est-détourné de l'Algérie Auparavant, Salah Aguila soutenait activement un rôle plus important del'Algérie pour un règlement de la crise libyenne. En témoigne, ces multiples réunions avec des responsables du voisin de l'Est (Abdekader Messahel et Abdelmalek Sellal). En novembre 2016, Aguila, en visite à Alger, avait demandé à ses interlocuteurs d'armer les forces du maréchal Khalifa Haftar. Mais depuis le jeu des alliances a changé. L'ancien «allié» algérien s'est rapproché du chef du gouvernement d' «entente nationale», Faïez Sarraj. La lune de miel fut interrompue brutalement avec les amis d'Aguila. Dimanche 7 mai la Commission de Défense au parlement libyen a vivement dénoncé la visite du n°2 de la diplomatie algérienne dans la ville de Baida et sa réunion avec des opposants de Salah Aguila. En accueillant le président du parlement libyen, le Maroc ne fait que s'aligner sur la politique de son principal partenaire au Conseil de coopération du Golfe : les Emirats arabes unis.