Mohamed Hassad, nouveau ministre de l'Education nationale a annoncé, il y a une semaine aux représentants du secteur de l'enseignement privé, son intention de revenir sur la décision d'interdire aux enseignants de la fonction publique de faire des heures supplémentaires dans le privé. Explications. Le nouveau ministre de l'Education nationale, de la formation professionnelle, de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique et précèdent ministre de l'Intérieur, Mohamed Hassad, défait ce que son prédécesseur avait fait. Le ministre a assuré aux représentants du secteur privé, lors d'une rencontre vendredi 28 avril 2017, qu'il voulait annuler la décision prise par le gouvernement précèdent d'interdire aux enseignants du public d'enseigner dans le privé, selon le quotidien Assabah. Souhaitée depuis longtemps, annoncée puis annulée en catastrophe quelques jours à peine avant la rentrée des classes 2012 par Mohamed Louafa, ministre de l'Education nationale sous le premier gouvernement Benkirane, la suspension de l'autorisation donnée aux enseignants du secteur public d'effectuer des heures supplémentaires dans les établissements privés avait finalement été actée le 4 février 2015 par l'arrêté 0001-15 de Rachid Belmokhtar, alors ministre de l'Education nationale sous le second gouvernement Benkirane. Cet arrêté donnait trois ans aux établissements privés qui employaient des enseignants issus du public pour acquérir leur propre personnel enseignant. Il aurait dû entrer en application effective la rentrée prochaine, pour l'année scolaire 2017-2018. Il ne le sera pas. 40% des enseignants des lycées privés appartiennent à la fonction publique La décision du précèdent ministre répondait à un constat : une large part des enseignants des établissements privés sont en fait titulaires d'un poste de la fonction publique dans un établissement public. Ils effectuent des heures supplémentaires dans les établissements privés en tant que vacataires. «Pour le primaire, les écoles privées ont 100% d'enseignants permanents. Pour le collégial, ces établissements disposent à 80% d'enseignants permanents. Pour le lycée, ce pourcentage est de 60%. Ils ont recours à des professeurs vacataires pour certaines matières, dont les profils sont rares aussi bien pour le public que pour le privé, comme les mathématiques, la physique, la philosophie, le français», a expliqué aux Inspirations éco Bendaoud Merzaki, directeur chargé de la promotion de l'enseignement scolaire privé et du préscolaire au ministère de l'Education nationale. Pour le ministère, cette situation est problématique pour l'enseignement public qui souffre du désengagement de ses professeurs, voire de leur absence. L'absentéisme des enseignants est un problème bien connu au Maroc. Selon un rapport intitulé «La génération d'apprenants : Investir dans l'éducation pour un monde en pleine évolution», publié en septembre 2016 par la Commission internationale sur le financement des opportunités éducatives dans le monde de l'Institut international pour la planification de l'éducation des Nations unies, le Maroc souffre d'un taux d'absentéisme de ses enseignants de 7,5%, soit une perte sèche pour les comptes publics de 1,2 milliard de dirhams. En termes d'enseignement, les 636 400 jours d'absence enregistrées en 2014 «équivalent à l'absence de près de 4 000 enseignants tout au long de l'année scolaire», soit plus de 2% du nombre total d'enseignants de l'Education nationale, a fait observer Driss Jettou, président de la Cour des comptes, devant le Parlement. Fin de la période transitoire de trois ans Dans ce contexte, pour permettre au secteur privé de recruter ses propres enseignants et lui permettre de se développer davantage afin de réunir 20% des élèves scolarisés, le précèdent ministre de l'Education nationale avait lancé en novembre 2013, pendant la période transitoire de trois ans, un «programme de formation de 10 000 cadres pédagogiques» destinés particulièrement au secteur privé, mais sans qu'il soit signataire de la convention moyennant une dépense publique de 160 millions de dirhams. Au total, en 2016, plus de 7 400 avaient été formés, révèle l'Economiste, mais le secteur privé n'en aurait embauché que 120. Inadéquation des profils aux besoins du privé, trop petits salaires, attrait persistant de la fonction publique… Les nouveaux licenciés du programmes se sont tournés vers le concours d'entrée des Centre régionaux des métiers de l'éducation et de la formation (CREMF), qui offraient jusqu'en juillet 2015 un accès direct à l'enseignement public. S'ajoute à l'échec du programme des 10 000 cadres pédagogiques destinés au privé, l'embauche en catastrophe à la rentrée dernière de 7 000 à 11 000 enseignants par l'Education nationale. Même s'ils ont été embauchés pour des contrats limités à deux ans par les Académies régionales, la perspective d'entrer in fine dans la fonction publique aurait créé un appel d'air, soufflant aux établissements privés quelque 2 000 enseignants, selon le président de la Ligue de l'enseignement privé Abdelhadi Zouiten. Les cours de soutien payants toujours interdits Au terme de la période transitoire de trois ans, les lycées privés n'ont donc finalement pas embauché leurs propres enseignants. Se priver de leurs enseignants actuels les mettrait vraisemblablement en grande difficulté. Cette situation explique certainement en partie la décision de Mohamed Hassad. Ancien ministre de l'Intérieur rompu aux opérations de maintien de l'ordre et de la paix sociale, il a également vu dans ce revirement le moyen de désamorcer le conflit qui s'annonçait avec le secteur de l'Enseignement privé. Mohamed Hassad n'est cependant pas revenu sur la décision du gouvernement précèdent d'interdire, aux instituteurs cette fois, de donner des cours de soutiens payant.