Pour tenter de rattraper le terrain perdu au Mali au profit de l'Algérie, Rabat a dépêché, dans l'urgence, son ministre des Affaires étrangères. Une visite tardive alors que les signaux en provenance de Bamako, notamment depuis la nomination, le 9 avril, d'un nouveau premier ministre, étaient très clairs et annonçaient un rapprochement entre le Mali et l'Algérie. Visiblement, le Maroc n'a pas l'intention de laisser l'Algérie revenir en force au Mali. Mardi 20 mai, le ministre des Affaires étrangères s'est rendu à Bamako, porteur d'un message du roi Mohammed VI adressé au président malien. La visite qui n'était pas prévue a été décidée dans les dernières minutes. Le regain de l'escalade militaire dans la région de Kidal entre les troupes du Mouvement national de libération d'Azawad, qualifié de proche du royaume, et les forces maliennes a précipité, sans aucun doute, l'envoi de Salaheddine Mezouar. Dans la soirée, il a eu des entretiens avec le président Ibrahim Boubacar Keïta. Lune de miel entre le Mali et l'Algérie Depuis quelques semaines, Algériens et Maliens vivent une parfaite lune de miel. Samedi 17 mai, le président malien déclarait au terme de l'audience qu'il avait accordé à Ramtane Lamamra, ministre algérien des Affaires étrangères, que «ce qui a été scellé entre le Mali et l'Algérie a été tellement profond qu'aucune conjoncture ne pourrait remettre en cause. Il y a entre les deux pays des liens de fraternité et de confiance, trempés dans le sang». Même son de cloche auprès de son chef de la diplomatie. Abdoulaye Diop a en effet loué la contribution «très positive» de l'Algérie dans la pacification de son pays. «L'engagement de l'Algérie est le bienvenu et souhaité. Nous sommes certains qu'il va contribuer très positivement à un dialogue constructif et franc entre les parties maliennes». Rabat aurait dû capter les signaux en provenance du Mali Dans ce contexte la visite de Salaheddine Mezouar à Bamako ne serait-elle pas un peu tardive ? Pourtant, les signaux en provenance de ce pays annonçant un rapprochement l'Algérie et le Mali étaient très clairs. Tout a commencé le 9 avril dernier avec le remaniement ministériel malien. Le président Keïta avait alors nommé Moussa Mara nouveau premier ministre, en lieu et place de Oumar Tatam Ly. Trois jours plus tard, la composition du nouveau gouvernement malien était présentée. Et le principal changement pour le Maroc concernait le portefeuille des Affaires étrangères. Zahabi Ould Sidi Mohamed, connu pour être un pro-marocain, a en effet dû quitter le ministère pour le département moins prestigieux de la Réconciliation nationale. Tout cela allait être confirmé par la suite. Le 21 avril, le nouveau chef de la diplomatie malienne effectue son premier déplacement à l'étranger, et c'est tout naturellement qu'il le réserva à l'Algérie. Dans la capitale du voisin de l'Est, Abdoulaye Diop, n'a pas tari d'éloges sur le passé «révolutionnaire» du président Abdelaziz Bouteflika. Reste maintenant à savoir si le pompier Mezouar réussira à inverser la tendance en l'espace d'un voyage de dernière minute.