En décembre dernier, Madrid décidait d'accorder la nationalité espagnole aux juifs séfarades victimes de la Reconquista. Les descendants des musulmans expulsés d'Espagne n'étaient par contre pas concernés. Aujourd'hui, les Morisques réclament eux aussi réparation, dénonçant une mesure sélective, voire raciste de la part du gouvernement Rajoy. «L'Etat espagnol a accordé aux juifs séfarades le droit de jouir de la nationalité espagnole. Il devrait reconnaitre ce même droit pour le reste des expulsés, les Morisques. Sinon, sa décision serait sélective, pour ne pas dire raciste», a déclaré Najib Loubaris, président de l'Association La Mémoire des Andalous, rapporte l'agence de presse espagnole EFE. En effet, le gouvernement espagnol a décidé en décembre dernier d'octroyer la nationalité aux juifs séfarades, dont de nombreux Marocains, expulsés du royaume ibérique, pour avoir refusé de se convertir au christianisme après la Reconquista. Le 7 février dernier, Madrid a approuvé la modification du Code Civil permettant la mise en œuvre de cette mesure. Cependant, les juifs n'ont pas été les seules victimes. De nombreux musulmans, aussi victimes de l'Inquisition, avaient été chassés d'Espagne en 1610, trouvant refuge au Maroc en grande majorité, mais aussi en Algérie et en Tunisie. Aujourd'hui, d'après M. Loubaris, près de 600 familles vivent dans différentes villes du royaume chérifien, mais principalement à Tétouan, Rabat et Fès où elles avaient été reçues après leur expulsion. Reconnaissance de la mémoire historique Pour l'Association La Mémoire des Andalous, la décision de l'Espagne de naturaliser certaines victimes de la Reconquista est «très positive», dans la mesure où le pouvoir ibérique reconnait avoir mal agis envers ses citoyens, il y a de ça plusieurs siècles. Mais, l'exclusion des musulmans biaise cette bonne initiative selon l'association. D'après M. Loubaris, certains morisques ont récemment entrepris des démarches individuelles pour réclamer leur droit à la nationalité espagnole. Ils ont même écrit, à ce sujet, au roi Juan Carlos. Ce qui importe aujourd'hui à l'association, indique son responsable, n'est pas la naturalisation pour la naturalisation, mais plutôt la reconnaissance de la mémoire historique des morisques. Bien que n'ayant plus l'espagnol comme langue usuelle, précise-t-il, les morisques ont gardé le style de vie, les traditions culinaires et vestimentaires d'origine. Les autorités espagnoles n'ont pas encore réagi à cette réclamation, tout à fait légitime. Il faut noter que le roi Juan Carlos s'était déjà excusé auprès des juifs sépharades, sans le faire auprès des musulmans. En octroyant le droit à la nationalité aux juifs séfarades, Madrid poursuit aussi des intérêts économiques, dans la mesure où cela lui permettrait d'attirer plus de touristes en provenance d'Israël. Mais dans une affaire aussi historique, la justice et l'équité dans le traitement des victimes devraient être une priorité.