L'actualité maroco-algérienne est bouillonnante. Hier au consulat algérien de Casablanca, un individu a arraché le drapeau algérien de son mât. Un geste aux lourdes conséquences : Alger convoque, immédiatement, le chargé d'affaire à l'ambassade du royaume. Quelques heures plus tard est annoncé le retour, peut-être demain dimanche, de l'ambassadeur à son poste. Mauvais début pour Mezouar à la tête de la diplomatie. Alors que mercredi Rabat rappelle son ambassadeur à Alger pour «consultation», il devrait retourner dès ce dimanche à son poste. La nouvelle est brusque, voire même inattendue. Et pour cause, le jeudi, le ministre des Affaires étrangères avait réuni tous les chefs de partis pour leur énoncer les raisons de la première décision marocaine. Bien entendu, devant les micros des télévisions officielles, les «leaders» se sont tous alignés sur la même partition. Le lendemain, c'est autour d'un minuscule parti d'organiser devant le consulat d'Algérie à Casablanca une «manifestation».Mais elle tourne au vinaigre. Cette manifestation qui n'a réuni qu'une trentaine de participants va très vite tourner au vinaigre. Faute d'encadrement et surtout en l'absence d'un dispositif sécuritaire adéquat en ce genre de circonstance, un «illuminé» croyant servir les intérêts du Maroc a escaladé le toit de la bâtisse de la représentation diplomatique, considérée un territoire algérien, et arracha le drapeau algérien de son mât. Une erreur gravissime. Manipulation ou gêne, le JT arabophone de la soirée de 2M a consacré des séquences au sit-in mais sans nullement évoquer cet incident diplomatique. Mezoaur obligé de présenter des excuses à Lamamra Immédiatement, c'est la colère en Algérie. Vendredi soir, le chargé d'affaire de l'ambassade du royaume est convoqué d'urgence au siège du ministère des Affaires étrangères. «Des explications circonstanciées lui ont été demandées», indique une dépêche de l'APS. Le porte-parole des AEA s'est même délecté en rappelant aux Marocains quelques règles élémentaires de diplomatie, estimant que «le ministère des Affaires étrangères souligne l'obligation pesant sur le pays hôte en matière de protection des personnels et locaux diplomatiques et consulaires algériens en vertu du droit international». Voilà ce qui est des conséquences d'un acte irresponsable. En vue de contenir la colère des Algériens, Salaheddine Mezouar et le secrétaire général du ministère des AE «ont présenté des excuses officielles à notre ambassadeur à Rabat et ils lui ont indiqué que l'individu qui a commis ce forfait inadmissible a été arrêté et sera déféré en urgence devant le procureur du Roi», affirme le site TSA, citant une source diplomatique. Alger a marqué des points sur Rabat Une fois de plus, l'Algérie a réussi à renverser la vapeur en sa faveur. Sa décision de maintenir son ambassadeur à Rabat a été interprétée comme un gage de sa bonne volonté de ne pas envenimer davantage les relations, déjà tendues, entre les deux pays. Le rappel et le retour annoncé de Abdellah Belkzize sont deux décisions qui fragilisent la diplomatie marocaine dans la confrontation avec celle du voisin de l'Est. En outre, cette crise est un mauvais début pour Salaheddine Mezaour à la tête du ministère des Affaires étrangères. Sa gestion du dossier, s'il en est réellement le seul responsable, est un premier camouflet. Alors que son prédécesseur Saâdeddine El Otmani jouait la carte de l'apaisement, le président du RNI a opté pour la manière dure. Avec ce retour annoncé de l'ambassadeur, le département de Mezouar organisera-t-il une autre réunion avec les responsables des formations politiques afin de leur expliquer les causes d'un tel revirement ? Le Maroc a-t-il subi des pressions de la part de ses amis arabes ou occidentaux afin d'assouplir sa position initiale contre l'Algérie ? Ou bien la carte de l'escalade politique a été jugée hasardeuse à la veille de la visite du secrétaire d'Etat, John Kerry, à Alger et Rabat?