Si l'année 2020 avait été marquée par une très légère baisse des infractions à caractères raciste, du moins rapportées aux autorités, l'année 2021 à connu une forte hausse des infractions, des victimes et des mis en cause pour des crimes ou délits racistes, dépassant même les chiffres de 2019. Dans son analyse «Les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux en 2021» publiée ce vendredi, le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) relevant du ministère de l'Intérieur français a déploré en 2021 une hausse de 16% des crimes ou délits «à caractère raciste» par rapport à 2020. Se basant sur les plaintes déposées auprès des services de police et de gendarmerie nationales, 12 500 infractions à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux ont été déposées sur l'ensemble du territoire national, dont 6 300 crimes ou délits (+16%) et 6 200 contraventions (+14%). Dans le détail, les chiffres des «crimes et délits à caractère raciste» sont accablants pour la quasi-totalité des infractions enregistrées par les forces de sécurité. Ainsi, les atteintes «à l'intégrité du cadavre, violation de sépulture» ont connu la plus forte hausse (+33%), pour atteindre 8 en 2021. À noter cependant que le chiffre reste bien inférieur à celui de 2019, ou 18 infractions avaient été constatées. Les «atteintes aux biens» en revanche représentent une très légère baisse de 3% (185 infractions). Aussi, rapporte l'analyse, «4 crimes, délits ou contraventions 'à caractère raciste' sur 5 enregistrés par les forces de sécurité sont des injures, provocations ou diffamations publiques», soit 4 051 infractions, en hausse de 16% par rapport à 2020. En numéraire, les «menaces et chantages» arrivent en 2e place, avec 1 425 infractions (+23%). Si les discriminations ne représentent que 4% des crimes ou délits à caractère raciste, les chiffres sont à relativiser en ce sens qu'il n'est question que des faits qui sont remontés aux autorités policières et de gendarmerie. Cependant, de nombreuses études en France ont démontré que les personnes continuent d'être discriminées selon leurs origines, notamment dans leur accès à l'emploi ou aux études supérieures. Aussi, l'enquête Cadre de vie et sécurité de 2019 avait déterminé qu'entre 2013 et 2018, seul 2% des victimes d'injures à caractère raciste avaient porté plainte, contre 14% des victimes de menaces ou violences racistes. La même étude faisait ressortir que 2,2 % des 14 et plus en France métropolitaine avaient subi, en 2018, au moins une atteinte à caractère raciste. Le profil des victimes de racisme en France Concernant les victimes de ces crimes et délits racistes, les données de la police et de la gendarmerie nationale font état de 5 720 victimes enregistrées en 2021, soit une nette hausse de 14% par rapport à 2020. Si la répartition des atteintes correspond globalement à la répartition des victimes, on constate que le nombre de victimes augmente moins que les infractions signalées (+14% de victimes contre +16% d'infractions) alors qu'à l'inverse, les victimes de menaces et chantages augmentent de 6 points de plus que les infractions. Dans les faits, les «hommes, les personnes âgées de 25 à 54 ans et les étrangers ressortissants d'un pays d'Afrique sont surreprésentés parmi les victimes de crimes ou délits» racistes, ajoute l'analyse. En effet, 59% des victimes sont des hommes, alors qu'ils ne représentent que 48% de la population et qu'ils ne sont que 52% à être victimes de tous les crimes et délits sur le territoire national. La même surreprésentation se constate dans la répartition d'âge concernant les 25-54 ans, qui représentent 71% des victimes de crimes et délits racistes. Encore une fois cependant, l'étude est limitée par la plus faible propension à porter plainte pour les jeunes. Dans le détail, il s'agit d'abord des 35-44 ans (28%), suivi par les 25-34 (24%) et enfin les 45-54 (19%). Quant aux étrangers, ils représentent 18% des plaintes déposées, dont 14% originaires d'Afrique alors qu'ils ne représentent que 4% de l'ensemble de la population. Seulement 6% des victimes sont des personnes morales, notamment des associations, sociétés, lieux de culte et même parfois des mairies. Les données font ressortir que les personnes morales sont plus victimes d'injures et diffamations par le biais des médias (16%) que les personnes physiques (5%). Portrait robot du mis en cause pour crime ou délit à caractère raciste Si malheureusement, «pour une part non négligeable des faits, les auteurs d'infractions ne sont pas identifiés», les données disponibles font état d'une surreprésentation des femmes chez les mis en causes. En effet, 28% d'entre eux sont des femmes, contre 16% pour l'ensemble des mis en cause en 2021. Aussi, les jeunes sont sous-représentés dans les mis en cause, ce qui résulte probablement de l'absence de plaintes de jeunes victimes, les personnes de 55 ans et plus représentent 25% des mis en cause, contre 7% pour l'ensemble des mis en cause. Les étrangers à l'inverse sont moins représentés que sur l'ensemble des mis en cause à l'échelle nationale, avec 10% contre 19% respectivement en 2021. Dans l'ensemble, souligne cependant l'étude, les mis en causes «ont des caractéristiques sociodémographiques beaucoup plus proches de la population générale que les mis en cause pour crimes ou délits pris dans leur ensemble», souligne-t-on encore. Répartition géographique des infractions racistes en France Nombre de contraventions à caractère raciste enregistrées, pour 1 000 habitants par région. / SSMSI Dans leur répartition sur le territoire, les infractions racistes sont très inégales, souligne-t-on, avec un nombre d'infractions par habitant plus élevé dans l'est de la France que dans l'ouest. En ce sens, les 4 régions que constituent l'est de la France métropolitaine ont un taux de contravention enregistrée allant de 0,09 à 0,11 pour 1 000 habitants, tout comme la Corse et la Guadeloupe. À l'inverse, la Bretagne et les Pays-de-la-Loire, tout comme les autres DOM-TOM ont enregistré de 0,04 à 0,06 contravention pour 1 000 habitant, sous la moyenne nationale établie à 0,08. Pour les départements, Paris, la Seine-Saint-Denis et le Bas-Rhin ont enregistré le plus haut niveau de plainte pour 1 000 habitants, allant de 0,13 à 0,24.