Nous sommes déjà le 18 octobre, près du tiers de ce qui était supposé être l'automne est passé et la pluviométrie n'est toujours pas au rendez-vous, hormis quelques précipitations/averses ici et là et même des prévisions quasi caniculaires pour les jours qui viennent ! Le royaume sort d'une année catastrophique sur le plan pluviométrique et entre dans une période de grande incertitude. Le roi a explicitement tiré la sonnette d'alarme. Il reste l'action, urgente. Ce qui a fait le succès du Maroc lors de la période Covid est son sens de l'anticipation et son action rapide et résolue, et la même chose s'est produite pour la stratégie de l'eau, avec Plans et actions, décisions et constantes réévaluations. Or, aujourd'hui que la situation pluviométrique ne semble pas s'améliorer, le Maroc a encore et plus que jamais besoin d'actions concrètes, urgentes. Le gouvernement l'a compris, ou du moins paraît l'avoir compris, en annonçant des mesures contre les cultures hydrophages. Le problème est dans les demi-mesures… on sent bien le problème, on ressent même l'urgence de le traiter et d'y apporter des solutions mais, étrangement, inexplicablement, on prend des demi-mesures ! La raison semble être dans le fait même que ces cultures ne font pas unanimité sur leur côté hydrophage. En effet, le débat est ouvert entre les tenants de la thèse économique et ceux de la logique hydrique. Les premiers défendent les cultures dites hydrophages en recommandant la régulation, la gestion, la balance de l'eau entre avantages économiques et inconvénients hydriques ; quant aux seconds, ils se placent dans l'approche environnementale et dans la nécessité de la sobriété de la consommation. Tous ont raison car tous développent leurs arguments en déroulant des chiffres plus convaincants les uns que les autres, pertinents et appuyés sur des arguments rationnels. Mais tous peuvent également avoir tort, au vu de l'évolution de la situation hydrique. Et donc, dans ce pays, ce qui manque encore une fois, une fois de plus, c'est le débat national, public, médiatique et médiatisé, pour que l'opinion publique puisse se faire son idée et que les responsables politiques puissent élaborer des stratégies durables, lucratives, rentables et économes. Réunir des agronomes et des agro-industriels, des universitaires et des spécialistes de l'environnement, des associations de la société civile et autres militants écologistes, des engagés et des enragés… le Maroc ne peut faire l'économie d'un tel débat pour éviter les pénuries et les assèchements. Dans l'attente, revenons aux chiffres… avec un potentiel de ressources d'eau évaluées à quelques 22 milliards de m3 par an, l'agriculture consomme environ 87% de l'eau, pour un apport de 14% au PIB et une population rurale représentant un peu moins de 40% de la population totale. Il semblerait qu'il y ait un déséquilibre, sur la base duquel il faut penser les futures politiques publiques. Le point positif en ce qui concerne la politique hydrique du royaume est que les différents responsables en ont parfaitement pris la mesure. Le politique est en ordre de marche, au niveau du ministère (barrages, interconnexions hydrauliques, dessalement…) et l'aspect exécutif, à travers l'ONEE, entre autres acteurs, enclenche ses différentes politiques multidirectionnelles pour prolonger les politiques publiques arrêtées. Mais pour la réussite de tout cet attelage, un débat devient incontournable, tant pour définir une nouvelle politique agricole qui serait, qui devrait être différente de ce qu'elle a été jusqu'à aujourd'hui, mais aussi pour orienter les investissements agricoles, industriels et agroindustriels et enfin pour la sensibilisation et la conscientisation de la population vers une consommation plus rationnelle, plus économe. Un débat qui pourrait et gagnerait même à être initié par le ministère de l'Eau, un débat comme celui que l'ONEE vient d'organiser récemment à Salé, mais en plus large, plus régionalisé, plus régulier, plus... national. Face à une classe politique qui, tous les automnes, lève encore et toujours les yeux au ciel (pour la pluviométrie et la spiritualité) en vue de guetter ou pour espérer une « bonne année », il est temps d'impliquer la société, dans toutes ses composantes, pour devenir plus terre à terre, voire même plus souterrain pour trouver l'eau là où elle est, et l'utiliser au mieux.