Par Hassan Alaoui Pierre Brisson, Alain Peyrefitte ou Raymond Aron, pour ne citer que ces trois figures, se retourneraient dans leur tombe. Voilà que le grand quotidien du « Rond-Point des Champs Elysées » tourne casaque et se convertit en soutien scandaleux des extrêmes. Mais, des extrêmes opposés que ses lecteurs traditionnels auront de la peine à comprendre. Il vient de commettre deux impairs qui le discréditent à coup sûr, et dont la caractéristique malhonnête pour ainsi dire est l'amalgame , pêché grave pour un journal de son genre. Il apporte une caution injustifiée à un ramassis de signataires d'une pétition d'artistes apocryphes et faux intellectuels contre le Maroc, contestée d'ailleurs par certains d'entre eux qui se sont sentis floués. Ensuite il accorde dans la foulée un entretien plutôt pathétique de Pierre Vermeren sur la situation au Maroc. Ce dernier, s'est autoproclamé historien du Maghreb, connu surtout pour avoir passé son service « civil » au titre de coopérant au Lycée Descartes de Rabat dans les premières années du siècle. Professeur du secondaire et préparant alors sa thèse en histoire, ayant commis quelques livres, l'un sur l'histoire du Maroc – opuscule réducteur qui prétendait résumer 14 siècles de notre immémoriale histoire -, un autre sur « Le Maroc de Mohammed VI », un descriptif hâtif des dix premières années du règne où se mêlent une triste passion personnelle et un rédhibitoire désir d'émerger. L'enseignant de Descartes pouvait-il être autre chose qu'un racoleur de dépêches, l'œil tendu pendant ses années « rbaties » sur les titres de presse de l'opposition, les activités des groupuscules , les communiqués des ONG et les comités « droitdel'hommistes » surgis parce que justement le règne de Mohammed VI a d'emblée inscrit les libertés et leur respect sur son fronton ? Et que la créativité et la parole ont bourgeonné dans un élan sans précédent Un professeur dans la tourmente Pierre Vermeren n'est ni historien, ni spécialiste du Maghreb. Je dirais plutôt un histrion, à la limite un « professeur dans la tourmente ». Le quotidien « Le Figaro » aura beau nous raconter des cagailles , rien n'est moins sûr que cette insulte au métier et au titre d'historien dont il l'affuble. Il n'est ni Fernand Braudel, ni Jacques Berque, ni même l'humble et grandiose Benjamin Stora. Pierre Vermeren est un imposteur, qui nous fait prendre des vessies pour des lanternes, un escroc du titre qui n'en démord pas de haïr et le Maroc et ses institutions, prisonnier de ses préjugés, dépité et cultivant la haine de soi. Son livre sur « Le Maroc de Mohammed VI » est un fatras d'incohérences, ramassis décontextualisé de faits choisis pour corroborer une et une seule thèse : le Maroc est un Etat qui viole les droits de l'Homme. Si nous n'étions pas habitués à cette liturgie depuis des années maintenant, on serait tenté d'y adhérer. D'autant que le prétendu historien n'en est pas à sa première et dernière. Et du coup, il nous fait penser à ce cher John Waterbury, auteur du célèbre « Le Commander des Croyants » qui, venu lui aussi de ses lointaines terres américaines comme « chercheur » universitaire au Maroc, s'impatientait de voir éclater un soulèvement qui illustrerait sa thèse. Tant et si bien qu'un dimanche, s'ennuyant sur son esquif rbati, voyant sortir du stade de football du FUS une foule immense, croyait y voir une « révolution » populaire. Mais ce n'était que les supporters du club de Rabat... Comparaison n'étant pas raison, Pierre Vermeren nous égrène que la « situation au Maghreb est potentiellement explosive » ! Que voilà la prophétie du siècle, elle tombe comme un couperet. Le Figaro la reprend à son compte comme l'annonce messianique et en fait une sorte de manchette . Tout ça pour ça, dira-t-on. Car il faut bien illustrer la parution de son nouvel opuscule : « Le Maroc en 100 questions » , un tissu de banalités rédigé sur un fauteuil ( parisien) dont on imagine que l'auteur est tout de même loin, très loin même du contexte qu'il décrit et qui n'est en aucun cas original. Comment peut-on écrire un livre sur le Maroc, alors que l'on n'y vit plus, comment fabrique-t-on un scénario fondé sur les fake-news et les ragots colportés des petits copains connus pour leur opposition aux institutions, instrumentalisés et payés même par des services étrangers ? M. Vermerin, poussant le culot jusqu'à critiquer l'institution sécuritaire du Maroc s'est fendu d'un propos en 2015 qui frise le ridicule et suscite l'indignation. On tombe à la renverse en le lisant : « «Même s'il n'y a pas eu d'attentat récemment dans leur pays, les Marocains ont très peur. Ils préfèrent rester chez eux et regarder un DVD plutôt que de risquer leur vie en allant au cinéma ». Nous sommes en 2015 ...Et le messager de l'Apocalypse a vite rengainé son arrogance... L'histrion prévisionniste est tombé si bas que personne n'a pris la peine de le croire, notamment les Marocains. Ce qu'il affirme dans « Le Figaro » est de la même veine haineuse et crapuleuse. Il y a longtemps que le Maroc – puisqu'il ne s'agit essentiellement que de notre pays dans cet entretien – est décrit de cette manière, unilatérale, impérieusement subjective et digne du contempteur qu'il a toujours été. De surcroît, tout le propos déclaré au journal dirigé autrefois par une forte figure de la presse française, Pierre Brisson, est essentiellement à charge contre le Maroc, alors même que le titre de l'interview est décliné ainsi : « La situation au Maghreb est potentiellement explosive »... Hormis quelques allusions furtives , il n'est nullement question du Maghreb , tant s'en faut. Mais d'un réquisitoire que les questions d'une jeune débutante, Aziliz Le Corre, issue du Centre de formation et de perfectionnement des journalistes (CFPJ) appuie à sa manière. La technique racoleuse du « Figaro »... Le quotidien parisien a procédé par ce qu'on appelle la technique de l'amalgame, propre à créer la confusion chez ses lecteurs, pourtant considérés comme conservateurs, à tout le moins libéraux. C'est une violence qui leur est faite, parce que le journal entretenait jusque-là des rapports sereins avec le Maroc, soutenant son indépendance dans les années cinquante grâce entre autres à François Mauriac, son développement et la question du Sahara. Qu'il relaye cet appel criminel à une sortie médiatique d'un soudard dénommé Pierre Vermeren, participe – c'est le moins que l'on puisse dire – davantage du complot digne d'un « cabinet noir » que de l'exigence de l'information. Pierre Vermeren concentre ses critiques sur le Maroc mais passe sous silence les violations des droits de l'Homme flagrantes en Algérie, où les emprisonnements de journalistes, d'artistes et de créateurs vont bon train, où les militants du Hirak sont déférés régulièrement devant le parquet et leurs droits bafoués...Un étrange principe de « deux poids, deux mesures », une pratique condamnable et méprisable de la part d'un chercheur... Qu'ensuite il tombe dans le piège d'une association mafieuse de prétendus artistes et intellectuels et publie leur appel à la désobéissance et à l'insurrection – il n'y a pas d'autre mot -, nous laisse ahuris. Les authentiques artistes de renom et aussi les intellectuels dignes de ce nom, on les compte sur les bouts des doigts au Maroc, le champ culturel national les intègre en tant que tels mais non comme des contestataires ou insurgés. De toute évidence, l'opération de médiatisation par Le Figaro des auteurs troubles du non moins trouble « Manifeste des 400 », confiée à une jeune journaliste qui, c'est le moins comme l'on puisse dire, n'a pas pris soin d'assurer son exercice en recoupant et en vérifiant ses sources, a constitué en soi un flop. La manipulation est tout de suite apparue aux uns et autres des signataires que certains d'entre eux, et non des moindres, ont exigé le retrait de leur signature ou, à défaut, ont publié des post sur leur compte pour dénoncer la forfaiture. L'autre « ombre » Cette « Ombre-là » ! Tel est le titre de la pétition que les signataires ont accordé à leur texte, qualifié par ailleurs de Manifeste. On eût cru aisément à un vers de poésie qui ne déplairait pas à un Abdellatif Lâabi, poète de son état et signataire en tête de la pétition. De la même manière, on y voit la comparaison caricaturale avec Marx et Engels et de leur « Manifeste » publié il y a un siècle et demi et en appelant au soulèvement des « travailleurs », des vrais et non des « artistes » capitonnés derrière leurs subventions et leur statut privilégié, trop habitués à pomper les deniers de l'Etat et à insulter impunément ce dernier... De graves fissures se sont ouvertes dans la liste des signataires, qui y dénonçant l'usurpation de leurs noms, qui exigeant que leur adhésion soit retirée, ou encore ne décolérant pas devant la méthode stalinienne qui caractérise la démarche des obscurs mafieux ayant monté le scénario catastrophe et jouant sur la peur... Or, stalinisme et dictature de la pensée aidant, les auteurs du pseudo Manifeste – intellectuels en chaise longue – n'ont pas dérogé à la tradition d'inquisiteurs : le même langage, le même vocabulaire, la même pression et, ce qui ne gâte rien dans leur culture de faussaire, une propension à la victimisation. Depuis quand le Maroc incrimine ou viole les droits et la liberté des artistes, qu'il n'a de cesse de protéger, de soutenir, de promouvoir et d'élever au rang de fierté nationale ? A contrario, depuis quand des artistes – je veux dire les authentiques – ont-ils une seule fois rendu hommage à l'Etat dans une langue franche et directe ? Etre artiste est une chose, mais usurper le titre et se faire le complice avoué de la 5éme Colonne qui s'échine à fomenter les coups bas contre le peuple et le pays, quitte à cautionner un pacte faustien avec les services étrangers hostiles, il n' y a qu'un pas que les apprentis sorciers de la déstabilisation ont vite franchi... On est en droit de s'interroger sur la « main noire étrangère » qui trace le sinueux et étrange chemin à une poignée de soudards, exécuteurs d'agendas criminels qui n'en démordent pas et en même temps désespèrent de voir le Royaume se transformer en un champ de ruines ! Qu'a Dieu ne plaise...On soupçonne à peine un semblant de rhétorique : « Quel est le rôle des médias et de la culture dans notre société ? » , se demandent les folliculaires du Manifeste. « Est-ce que chercher, discuter, analyser, critiquer , contredire, investiguer, déconstruire, penser, transgresser, imaginer et créer ? Ou est-ce de diffamer, criminaliser, blâmer, distraire, insulter, intimider et harceler ? Aujourd'hui, plus que jamais, les médias de diffamation appartiennent à cette dernière catégorie »... Quand on mimétise le discours étranger On croirait lire la prose structuraliste des années soixante, mieux et plutôt Jacques Derrida, les sémioticiens Kristeva et Barthes, voire Deleuze et Foucault , mais plus proche de nous Edwy Plenel ... La liberté de la presse serait-elle à sens unique ? Consisterait-elle à incarner l'unilatéralité exaltée pour les contempteurs et les comploteurs, et l'excommunication des journalistes libres et indépendants, campant sur la marge qui rejettent la pensée unique, le dogmatisme, le sectarisme. Au nom des idéaux basiques de rigueur professionnelle et d'éthique du métier que pourtant, perdant le Nord, « Le Figaro » viole de plain-pied, nous dénonçons cette propension à un journalisme à sens unique, et cette pensée stalinienne sortie des Loubianka et autres fachosphères...déguisées en plateformes « révolutionnaires » ! En effet, « l'Ombre » brune rôde, instaurant d'ores et déjà son système d'enfermement, ses miradors, son inquisition, ses pressions sur des citoyens pour signer ses breuvages, ses Kolyma et cet avant-goût mortifère de ce que sera l'avenir de nos enfants, encadrés par une police politique comme seules les dictatures de la pensée en savent mobiliser.