Il serait fort erroné d'imputer la dégradation des relations entre les Etats-Unis et la Chine à la pandémie de coronavirus qui agit plutôt comme un élément révélateur et un facteur accélérateur, estime Jamal Machrouh, Senior fellow au Policy Center for the New South (PCNS). Elément révélateur en ce sens que la pandémie dévoile au grand jour les tensions géopolitiques existentielles entre l'Oncle Sam et l'Empire du milieu et facteur accélérateur dans la mesure où, par sa dynamique propre et ses conséquences planétaires, la pandémie accentue les contradictions profondes entre les deux puissances et les enferme dans une spirale de tensions et de provocations, explique M. Machrouh dans un récent article publié par le think-tank marocain PCNS sous le titre « Vers une seconde guerre froide mondiale ». En effet, dans presque tous les domaines, la Chine a « réalisé cette dernière décennie un rattrapage stratégique accéléré de la première puissance mondiale qui concerne aussi bien les échanges commerciaux internationaux que la technologie (cinq) 5G, l'intelligence artificielle ou encore la puissance navale », fait-il savoir. Au vu de ces éléments, il importe d'inscrire les tensions qui traversent aujourd'hui les relations sino-américaines dans le temps long, plutôt que de les considérer comme le résultat de facteur conjoncturel ou de calcul électoral, affirme M. Machrouh, notant que les fractures des plaques géopolitiques sino-américaines atteignent, ces derniers temps, une amplitude dangereuse qui risque fort de propulser le monde dans une « seconde guerre froide mondiale ». L'impact d'une « seconde guerre froide mondiale » serait lourd sur un système multilatéral déjà au seuil de la déconfiture c'est pourquoi il est vital que des voies médianes naissent et prennent de la place dans le débat stratégique international aujourd'hui, réduit, hélas, en une table de ping-pong autour de laquelle s'affrontent Américain et Chinois, relève l'auteur. Il s'agit pour l'Europe et l'Afrique d'œuvrer en faveur de l'émergence au niveau mondial d'un leadership collectif, inclusif, constructif et dont les moyens d'action ne seraient ni le hard power, ni le soft power, ni le smart power mais un human-power », indique l'auteur. L'enjeu est, d'une part, d'éviter au monde les dégâts d'une nouvelle guerre dite-froide et, d'autre part, de concentrer les ressources et les énergies pour faire face aux défis globaux qui se dessinent dans les horizons guère lointains, et dont le coronavirus et le changement climatique constituent des exemples non exhaustifs, conclut-il.