L'entreprise publique algérienne d'hydrocarbures « Sonatrach » vient d'être éclaboussée dans un « énorme scandale lié à la livraison du carburant défectueux au Liban, selon des médias algériens. Ce nouveau scandale vient écorner une nouvelle fois la « Sonatrach » dont le représentant au Liban, Tarek Faoual, fait l'objet d'un mandat d'arrêt au pays du Cèdre, précise-t-on de même source. Cette affaire dans laquelle la filiale londonienne, « Sonatrach Pétrolier Corporation » (PSC BVI) a été largement citée, a été étalée au grand jour en avril dernier quand l'établissement public d'Electricité au Liban a signalé à la justice que la compagnie algérienne lui avait livré du carburant défectueux un mois plus tôt et après la découverte d'un deuxième chargement de carburant défectueux la semaine dernière. Citée par la presse algérienne, la députée libanaise Paula Yacoubian a dénoncé des tentatives d'enterrer le « scandale » du fuel défectueux, dans le cadre duquel d'anciens ministres de l'Energie ont été entendus mercredi par la justice, déplorant « le secret » entourant le contrat passé entre l'Etat libanais et l'entreprise publique algérienne, d'où provient le carburant. Mme. Yacoubian a émis des soupçons sur la nature du contrat classé « secret » depuis 2005, entre la Sonatrach et l'Etat libanais en mentionnant ce fameux contrat renouvelable chaque 3 ans. « Le dossier du carburant défectueux est un énorme scandale, documenté par de nombreux rapports », a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse au Parlement, déplorant que certains « commencent à œuvrer pour l'enterrer ». « Pourquoi le contrat avec Sonatrach est-il secret ? », s'est-elle encore interrogée, ajoutant qu'une des personnes qui étaient actuellement poursuivies dans le cadre de cette affaire avait été naturalisée libanaise dans le décret de naturalisation polémique publié en 2018, faisant explicitement référence à Farid Bedjaoui, impliqué dans plusieurs dossiers de corruption du groupe pétrolier public notamment dans le scandale « Sonatrach–Saipem ». Et d'ajouter que « des déchets pétroliers sont envoyés au Liban et il faut que l'enquête à ce sujet englobe la société qui fait fonctionner les navires-centrales » qui utilisent une partie du fuel controversé. « En 2002 et 2003, il (Farid Bedjaoui NDRL) était ici au Liban avec l'ancien ministre algérien de l'Energie Chakib Khelil. En 2005, le contrat avec Sonatrach a été signé mais il est resté secret », a précisé Mme Yacoubian. Le premier juge d'instruction du Mont-Liban, Nicolas Mansour avait délivré des mandats d'arrêt visant le représentant de la Sonatrach au Liban, Tarek Faoual et plusieurs employés de la société libanaise d'inspection PST, ainsi que d'autres personnes pour corruption, versement de pots-de-vin, escroquerie et abus de confiance. Mercredi, le magistrat a entendu les deux anciens ministres de l'Energie, Nada Boustani et Mohammad Fneich, le directeur général d'EDL Kamal Hayek et l'ingénieur Yehya Maouloud, dans le cadre de ce dossier. Sur la base d'une note d'informations présentée par l'avocat libanais Wadih Akl, la procureure générale près la cour d'appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, avait lancé lundi une enquête concernant un navire de transport de carburant qui serait chargé de fuel non-conforme, destiné à être livré aux centrales électriques libanaises. Le carburant a été jugé défectueux après des tests menés par des laboratoires libanais, a fait savoir pour sa part la chaîne locale d'informations « LBCI ». Ce scandale n'est pourtant pas le premier du genre à éclabousser la Sonatrach, qui assure 95% des recettes en devises de l'Algérie. Depuis une dizaine d'années, de nombreux procès ont eu lieu contre des dirigeants et cadres de la Sonatrach. Plusieurs d'entre eux ont été condamnés pour corruption, passation de marchés illégaux, surfacturation, dilapidation de deniers publics sans jamais révéler l'ampleur du pillage dont est victime l'entreprise nationale algérienne. L'actuel PDG, Toufik Hakkar, porté à la tête de la Sonatrach en février dernier, est le 12ème responsable à diriger l'entreprise en 20 ans, illustration de l'instabilité qui mine l'entreprise publique algérienne. Avant lui, Kamel-Eddine Chikhi a été renvoyé après moins de trois mois, après avoir été lui-même le troisième PDG en moins d'un an à diriger l'entreprise. Pour rappel, la filiale londonienne, Sonatrach Pétrolier Corporation (PSC BVI) a été largement citée dans l'affaire Sonatrach II, avec notamment l'implication de Mohamed Bayou puis celle de Chawki Rahal. En mars 2019, « eBourse » avait publié un reportage sur ce réseau et l'implication de plusieurs responsables et intermédiaires, dont des anciens dirigeants de « Sonatrach » dans un vaste trafic des produits raffinés. Tous ces limogeages et disgrâces se sont déroulés sur fond de scandales de corruption, de détournements et de malversations qui touchent tous les aspects de la vie publique en Algérie.