La prudence doit être de mise chez la femme enceinte ou qui allaite, appelées à prendre des médicaments dont il faudrait évaluer auparavant les risques sur leur état respectif, ont indiqué les participants à une journée sur le médicament à Fès. Selon des spécialistes marocains et étrangers, réunis récemment dans le cadre de cette rencontre, initiée par la Commission de Pharmacovigilance et de Pharmaco-épidémiologie de Fès, sous le thème: "la pharmacovigilance et la reproduction", il est nécessaire de créer un " Réseau Mère-Enfant" dans la ville en vue de mettre en commun les données sur la grossesse recueillies par les différents partenaires au niveau de la région. Ils ont également estimé indispensable de travailler en collaboration avec les autres centres à l'échelle nationale pour mieux gérer l'alerte sur les risques médicamenteux, de manière plus précoce, mais aussi anticiper l'alerte. Interrogé sur la portée de cette journée, Dr. Youssef Khabbal, spécialiste en pharmacologie médicale, a rappelé que depuis le drame du thalidomide, l'exposition d'une grossesse à des agents exogènes suscite de vives inquiétudes partagées par le grand public et le corps médical, soulignant qu'au cours d'une grossesse connue (ou prévue), des thérapeutiques peuvent toutefois être nécessaires, voire indispensables au bon équilibre de la mère. Le thalidomide est un médicament utilisé durant les années 1950 et 1960 comme sédatif et anti-nauséeux, notamment chez les femmes enceintes. Or, on découvrit qu'il provoquait de graves malformations congénitales. D'abord occultés ou niés par le fabricant, ces effets tératogènes furent au coeur d'un scandale sanitaire qui aboutit au retrait du médicament du marché mondial en 1961. Aujourd'hui, le thalidomide est de nouveau utilisé de façon contrôlée pour ses propriétés immunomodulatrices et antitumorales. Selon Dr Khabbal, le prescripteur du médicament devra donc faire l'exercice d'évaluer correctement le bénéfice attendu d'une thérapeutique, au regard des risques connus (ou potentiels) pour le futur enfant, en fonction de son âge gestationnel au moment du traitement. Le risque de l'exposition foetale aux médicaments est lié essentiellement au moment de cette exposition et au médicament lui-même, affirme-t-il. Ce risque est rare mais très anxiogène nécessitant parfois un avis spécialisé auprès des services de la pharmacologie clinique. Selon ce spécialiste, la prise de médicaments reste constante au cours de la grossesse, sachant que la plupart des médicaments pris par la mère passent dans la circulation foetale à l'exception des molécules de poids moléculaire élevé comme l'insuline ou l'héparine. Le risque foetal de tout médicament, qui suscite une vive inquiétude du corps médical et des patientes, est donc possible mais doit être évalué à l'aune des données actuelles de la science, souligne-t-il, estimant par ailleurs nécessaire d'organiser la diffusion de l'information pour les professionnels de santé et les patientes pour gérer le risque à l'échelon individuel