À l'instar des communautés musulmanes de Montréal, l'immigration maghrébine vit au rythme exaltant du Ramadan de cette fin de siècle. Le mois sacré trouve, ici, l'expression de sa plus profonde et pure signification. Algériens, Marocains et Tunisiens ont appris, que loin des contingences politiques, la cohabitation sereine ne relève pas du miracle. Cette communauté qui avoisine actuellement les quelque 50 000 personnes au Canada s'organise à travers les quartiers ou elle est présente. Sur l'île de Montréal, elle est numériquement plus importante à Côte-des-Neiges (plus de 6000) qu'aux quartiers de St-Michel ou St-Léonard (à prédominance italienne). La prolifération de commerces tenus par des maghrébins contribue, on ne peut mieux, à raffermir des liens culturels, historiques et religieux qui unissent les gens de la communauté. Il va sans dire que ces commerces, tenus dans la pure tradition de nos régions d'origine, favorisent le rapprochement entre les familles en provenance du Maghreb. Par contre, du côté des mouvements associatifs et culturels beaucoup de travail reste à faire. Grande faiblesse du moment: les associations à but non lucratif qui militent en faveur du bien-être de leurs communautés respectives préfèrent "naviguer" en solo que de promouvoir des échanges d'expériences qui ne sauraient être que bénéfiques pour "la famille maghrébine" dans sa globalité. Comparativement à d'autres communautés plus anciennes (juive, grecque, italienne, libanaise...) l'immigration maghrébine est loin d'être soudée. Lobbying? Leadership? Enjeux politiques?... pas si sûr. La preuve en est que la volonté d'aller de l'avant existe. La communauté maghrébine de Montréal regorge d'éléments qui plaident pour la concrétisation pratico-pratique, ici même, de cette "unité maghrébine" qui "vacille" encore, sournoisement entre les textes et leur matérialisation effective. A Montréal, un travail herculéen se fait. Vite et bien. Le Montréalais d'origine maghrébine, en plus des facilités d'accès aux abondantes sources d'information, de savoir et à Internet, se reconnaît aujourd'hui à travers des journaux maghrébins édités au Québec. Des émissions de radio et de télévision destinés aux maghrébins et animées par des " professionnels " desservent la grande région métropolitaine de Montréal. Après "Maghreb Observateur", le premier journal maghrébin d'expression française au Québec. Avec une présence timide mais néanmoins remarquée, quelques émissions de radio et de télévision "s'improvisent" des programmes qui ne répondent qu'en partie aux besoins "gargantuesques", la nostalgie aidant, de la clientèle maghrébine. Radio Centre-Ville, la radio communautaire multilingue de Montréal (102.3 FM), se prépare à fêter son 25ième anniversaire en janvier, accorde, dans le cadre de son équipe francophone, un temps d'antenne (très insuffisant selon les auditeurs) aux émissions maghrébine. Animées par des professionnels algériens, deux émissions "Taxi Maghreb" et "Montréal Labess" s'alternent les Samedis de 22 heures 30 à minuit. " Salam Bagdad" réalisée par le marocain Lahcène Abbassi occupe les ondes les dimanches 23 heures à minuit. Une autre émission, "La voix du Maroc à Montréal" réalisée par la direction du journal "Maghreb Observateur" est diffusée les samedis de 16 à 17 heures sur les ondes de la radio CFMB 1280 sur la bande AM. Ces émissions constituent de véritables espaces de divertissement et d'évasion qui permettent aux auditeurs francophones de Montréal , de "sentir du pays" pour les uns et "l'y découvrir" pour les autres. Côté télévision, grâce à la volonté de fer de Tarik Mihoubi, le producteur de l'émission privée "Algérie Magazine", les Algériens ont "conquis" 30 minutes d'espace d'expression libre à travers lequel la possibilité de mettre tout leur génie créateur au profit de la communauté leur est offerte sur un plateau d'argent sur CJNT câble 14. Une autre émission pour la communauté maghrébine réalisée par l'animateur tunisien Hamadi Aguerbi Tounsi est diffusée sur la même chaîne. Les artistes font preuve d'ingéniosité remarquable et de profond dévouement pour l'art et pour le public. Surtout pendant ce mois sacré. La communauté maghrébine n'a jamais été mieux servie. La programmation de galas, de dîners-bénéfices et d'autres soirées, cette fois encore, promet beaucoup de joies et de bonne humeur. Ce sera également, pour les Maghrébins, l'occasion de se connaître davantage et de sceller des relations fraternelles durables. Arrivé à Montréal via la Tunisie en novembre dernier, Djamel Eddine Besmi alias "Blond Blond" est de ces artistes algériens qui ne jouent pas au poker avec leur carrière. Djamel, qui a débuté très jeune dans le milieu artistique s'est propulsé, à 18 ans, au rang d'une super-vedette de la chanson RAI. Il a produit six cassettes dont deux en Tunisie. Sa chanson-fétiche "Viva Tunisia " dédiée à l'equipe nationale tunisienne de football lui a valu le respect et la fidélité d'un public tunisien qui l'a suivi un peu partout dans ses déplacements. Djamel Blond Blond
Cheb Faycal
Djamel Blond Blond, en compagnie de Cheb Faycal (un autre raiman algérien arrivé à Montréal au début de l'année) et de l'homme orchestre marocain Rachid animeront une grande soirée maghrébine le 26 décembre au Medley, là ou les mordus de la musique châabie sont allés, le 31 octobre dernier, rencontrer le maître El Hadj El Hachemi Guerrouabi. Le 18 décembre, une soirée est organisée dans une autre salle de Montréal. Le public aura encore le plaisir de redécouvrir le ballet Beni ameur de Montréal (une formation créée par des "ex" du ballet algérien de Sidi-Belabbes), le jeune Benaissa du petit théâtre de Québec et de rencontrer le romancier algérien Rachid Tridi qui parlera de son dernier né " À l'ouest d'Alger" paru aux éditions des Glanures. Yamina Mouhoub, poétesse algérienne établie au Québec depuis 1991,vient de signer son premier recueil " Qu'importe le moment" aux éditions Teichtner. D'autres artistes maghrébins établis au Québec depuis plusieurs années (Cheb Dino, Cheb Abdesslam, Tofiq...) sillonnent quant à eux les villes de "la belle province" pour apporter gaieté et bonheur à leurs compatriotes. La communauté en "exil " se porte bien.