Horst Kohler, Envoyé Personnel du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahara marocain, a présenté sa démission de ses fonctions, selon un communiqué des Nations unies publié mercredi. L'ancien président allemand, âgé de 76 ans, aurait pris cette décision « pour raison de santé », indique ledit communiqué. Le ministère marocain des affaires étrangères a indiqué avoir pris note, « avec regret », du départ de Kohler, auquel le Maroc a rendu « hommage » pour les efforts qu'il a déployés depuis sa nomination, en août 2017, et salué « la constance, la disponibilité et le professionnalisme avec lesquels M. Köhler s'est acquitté de ses fonctions ». Le Maroc a, par ailleurs, réitéré son soutien aux efforts du Secrétaire général des Nations Unies en vue d'apporter un règlement politique au différend autour du Sahara marocain, et réaffirmé son engagement à parvenir à « une solution politique réaliste, pragmatique et durable, basée sur le compromis, dans le cadre de l'Initiative d'autonomie », selon la même source citée par l'agence de presse MAP. Convenances diplomatiques obligent, le polisario s'est également empressé de publier un communiqué ou il s'est dit « profondément attristé » par la démission de Kohler, qu'il a remercié pour « ses efforts dynamiques afin de relancer le processus de paix de l'ONU ». Une troisième table ronde de moins en moins probable Il est à rappeler que depuis que le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a fait de Kohler son émissaire pour le Sahara marocain, ce dernier n'a pas épargné sa peine pour promouvoir une solution politique au différend du Sahara. A sa prise de fonction, cela faisait déjà six années que toute négociation avaient été rompue entre les parties en conflit. En décembre 2018, Kohler a réussi la gageure de réunir le Maroc, l'Algérie, le polisario et la Mauritanie autour d'une table ronde, à Genève. Exercice qui fut répété, au même endroit, en mars de l'année en cours. Il était question d'une troisième table ronde à tenir au cours des mois suivants, sans toutefois en avoir spécifié la date exacte. Au vu de la récente décision de Kohler, il est fort à parier que cette rencontre n'aura pas lieu de sitôt. L'un des traits caractéristiques de la personnalité de Horst Kohler est son pragmatisme. Conscient du gouffre qui sépare les positions des uns et des autres, il n'a pas réuni les parties en conflit pour des négociations, mais juste pour rétablir les contacts. Il ne cherchait pas obtenir de ces tables rondes un résultat spectaculaire et ne se pavanait pas devant les médias, il agissait sobrement et discrètement pour faire « glisser » les positions des antagonistes vers une solution politique mutuellement acceptable. Une perte pour le processus de paix En l'absence d'autres explications concernant cette démission émanant de sources crédibles, l'ONU n'ayant donné aucune précision à propos des problèmes de santé de Kohler, il serait erroné de se lancer dans des spéculations hasardeuses. Il est, toutefois, d'ores et déjà possible d'affirmer que le règlement de l'affaire du Sahara en sera grandement retardé. Il faudrait à Antonio Guterres trouver un remplaçant à Horst Kohler, une démarche beaucoup moins évidente qu'il n'y paraît. Non seulement il n'est pas aisé de trouver le profil adéquat, mais les candidats ne se bousculent pas, non plus, au portillon. Quel homme politique ou diplomate de carrière risquerait sa notoriété dans une affaire qui traîne depuis plus de quatre décennies et qu'aucun émissaire du SG des Nations Unies n'a, jusqu'à présent, réussi à résoudre ? D'autre part, une fois déniché « l'oiseau rare », les démarches et tractations auprès des pays membres du Conseil de sécurité pour soutenir sa nomination devrait également prendre quelques mois. Enfin, une fois nommé, l'« heureux élu » aura à s'initier à la complexité du sujet et approcher les différents protagonistes pour en sonder les intentions. A la fin du mois écoulé, le Conseil de sécurité des Nations Unies a prolongé de six mois seulement au lieu d'une année le mandat de la MINURSO, et ce sous la pression des Etats-Unis, qui veulent ainsi forcer les parties antagonistes à trouver une solution au conflit. Sauf que John Bolton, le conseiller étasunien à la sécurité nationale qui a pesé de tout son poids pour réduire les mandats de la MINURSO à six mois, a peu de chances d'être encore là quand le nouvel émissaire du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahara sera nommé. C'est que le ratage monumental de l'opération de changement de régime au Venezuela exige que quelqu'un en paye les pots cassés. Et Bolton, dit « moustache » à Washington, semble tout désigné pour assumer ce rôle, ces méthodes à la hussarde ayant fait l'unanimité contre lui. Ahmed NAJI