Les déficiences visuelles, la vision bionique et les troubles d'apprentissage chez l'enfant, malgré une intelligence normale voire supérieure à la moyenne, peuvent être la cause d'échec scolaire. De ce fait, les déficiences visuelles et les troubles d'apprentissage doivent être une des préoccupations majeures du monde médical spécialisé en ophtalmologie et du monde scolaire. Cela passe essentiellement par une prise de conscience et un engagement des parents, des responsables scolaires et de médecins spécialistes voués à cette cause. Entretien avec Pr Jaâfar Daoudi. L'Opinion : La vision bionique est un des moments forts du 7ème congrès National de Strabologie et ophtalmologie pédiatrique, qui aura lieu à Casablanca les 4 et 5 novembre 2017. De quoi s'agit-il exactement ? Pr Jaâfar DAOUDI : Ce sera une véritable première au Maroc. La présentation d'une expérience française en matière de vison bionique. L'équipe du Dr Dupeyron du CHU de Nîmes présentera aux ophtalmologues Marocains son expérience de la greffe de la rétine. Elle constitue une avancée médicale pour l'ophtalmologie Française et mondiale. Cet implant rétinien permet d'améliorer la vison chez des personnes aveugles L'Opinion : Quelles sont les principales thématiques du 7ème Congrès scientifique national de strabologie et d'ophtalmolgie pédiatrique qui se tient à Casablanca les 4 et 5 novembre 2017 ? Pr Jaâfar DAOUDI : Le comité scientifique de l'Association Marocaine de Strabologie et Ophtalmologie pédiatrique veut attaquer de front des thématiques qui constituent un problème de santé méconnu dans notre pays. En l'occurrence, les déficiences visuelles et les difficultés d'apprentissage. La déficience visuelle ou le syndrome "malvoyance basse vision" constitue un problème d'importance majeur, particulièrement avec l'augmentation de l'espérance de vie. Dans le monde, il y'a environ 314 millions de personnes atteintes d'une déficience visuelle dont 45 millions sont atteintes de cécité, selon l'OMS. C'est un véritable problème de santé publique, dont la prise en charge doit être précoce, adaptée et bien codifiée. La deuxième thématique porte sur les difficultés et troubles d'apprentissage, caractérisés par des difficultés passagères ou persistantes touchant le language, la lecture, l'attention, l'écriture, l'automatisation du geste et la pensée mathématique. Ces troubles sont un frein dans l'acquisition des bases fondamentales et nécessaires aux apprentissages et ce malgré une intelligence normale voire supérieure à la moyenne. Ainsi, à cause d'un problème d'apprentissage et non d'intelligence on aboutit malheureusement à un échec scolaire. De ce fait, les troubles d'apprentissage doivent être une des préoccupations du monde scolaire. Leurs prises en charge nécessitent l'engagement des parents, des responsables scolaires et de médecins spécialistes voués à cette cause L'Opinion : Quelles sont les principales causes pouvant entrainer une déficience visuelle? Pr Jaâfar DAOUDI : Il existe plusieurs pathologies chez l'adulte et chez l'enfant pouvant entrainer une basse vision, voir une malvoyance. Chez l'adulte, cette basse vision peut être en rapport avec la rétinopathie diabétique, qui est une conséquence d'un diabète mal suivi et mal traité. Elle concerne près de la moitié des personnes diabétiques type 2 (diabète des adultes). Deuxième principale cause de basse vision voir de cécité, le glaucome. Ceci est liée à la détection souvent tardive du glaucome après installation de lésions irréversibles. La cataracte, la dégénérescence maculaire, l'uvéite, la rétinite, sont les autres causes de basse vision chez l'adulte. Par contre, chez l'enfant, cette basse vision peut être en rapport avec des atteintes rétiniennes, des atteintes des nerfs optiques, notamment les atrophies, des malformations congénitales ou des séquelles de prématurité et de souffrances néo-natales. L'Opinion : Quels sont les différents spécialistes pouvant intervenir dans la prise en charge de la malvoyance? Pr Jaâfar DAOUDI : La déficience visuelle nécessite une prise en charge multidisciplinaire, avec plusieurs intervenants. Et chacun d'entre eux a un rôle spécifique pour soigner, rééduquer, utiliser la vision conservée, ou adapter l'environnement. Le premier maillon de la chaine est le médecin ophtalmologiste, qui a un rôle essentiel dans la boucle. Il permet la détection de la maladie, son suivi et la mise en place des différents traitements. L'orthoptiste spécialisé dans la basse vision, permet une rééducation visuelle suivant la pathologie détectée. L'opticien, donne accès à des solutions d'aide à la vision, sans oublier, bien sur le rôle du psychologue et du psychomotricien. L'Opinion : Quelles sont les principales nouveautés qui seront développées lors de ce 7ème congrès national de strabologie et ophtalmologie pédiatrique ? Pr Jaâfar DAOUDI : Les projecteurs seront braqués sur les différents moyens thérapeutiques, disponibles au MAROC et maitrisés par les praticiens marocains en fonction de la pathologie incriminée. Notamment les principaux moyens d'aide visuelle aussi bien les systèmes microscopiques que télescopiques, l'éclairage pour malvoyants, la loupe de lecture, la loupe électronique, les verres filtrants, ainsi que les différents moyens informatiques et les cameras haute définition. L'Opinion : Quelle est la principale particularité des difficultés d'apprentissage chez l'enfant ? Pr Jaâfar DAOUDI : Les difficultés d'apprentissage de l'enfant nécessitent une prise en charge multidisciplinaire. Chacun des intervenants, représente un maillon de la chaine thérapeutique, afin d'aider l'enfant à surmonter ses difficultés. L'orthophoniste, le psychomotricien, le psychologue, ainsi que les posturologues (ophtalmologue, podologue et dentiste), disposent d'un rôle bien déterminé dans la prise en charge de ces enfants. L'Opinion : Quelle est l'erreur flagrante à ne pas commettre devant les difficultés d'apprentissage chez l'enfant ? Pr Jaâfar DAOUDI : Les troubles d'apprentissage peuvent être interprétés à tort comme une paresse ou un manque d'intérêt. Il faut donc se rappeler que les demandes des adultes (parents ou instituteurs) peuvent parfois être aussi exigeantes que de demander à une personne en fauteuil roulant de monter un escalier, d'où le slogan de la table ronde, « Nos enfants sont des anges, aidons les ! », programmée dimanche 5 novembre 2017 à partir de 9h à l'hôtel Farah de Casablanca et qui est ouverte au grand public. L'enfant qui présente un trouble d'apprentissage à type de dyslexie par exemple, doit être compris, aidé, et non marginalisé, aussi bien à l'école qu'à la maison. Et ces difficultés d'apprentissage peuvent bénéficier aujourd'hui de techniques thérapeutiques reconnues par les instances internationales Entretien réalisé par Dr Anwar CHERKAOUI