Le président turc Recep Tayyip Erdogan a estimé dimanche que le groupe Etat islamique était «probablement» l'auteur d'un attentat qui a fait au moins 30 morts lors d'un mariage à Gaziantep, ville du sud-est de la Turquie proche de la frontière syrienne. Sur la chaîne de télévision CNN-Turk, le gouverneur de la province Ali Yerlikaya a indiqué que le bilan de cet «attentat terroriste», peut-être commis par un kamikaze, qui s'est produit samedi soir s'élevait à au moins 30 morts et 94 blessés. Dimanche matin, Recep Tayyip Erdogan a pointé du doigt l'EI. Dans un communiqué, le chef de l'Etat a dit ne faire «aucune différence» entre le prédicateur en exil Fethullah Gülen, qu'il accuse d'avoir ourdi le coup d'Etat raté du 15 juillet, les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et le groupe jihadiste EI, «probable auteur de l'attentat de Gaziantep». «Notre pays, notre nation ne peuvent que réitérer un seul et même message à ceux qui nous attaquent: vous échouerez!», a-t-il encore écrit. Un responsable turc a indiqué que le mariage «se déroulait en plein air» et dans un quartier du centre de Gaziantep à forte concentration kurde, ce qui renforçait les spéculations sur un attentat jihadiste. Selon l'agence de presse Dogan, le mariés étaient originaires de la région majoritairement kurde de Siirt, plus à l'est, et avaient été déplacés en raison des violences entre les rebelles kurdes et les forces gouvernementales. D'après l'agence, un kamikaze s'est mêlé aux invités --dont un grand nombre de femmes et d'enfants-- avant d'actionner sa charge. «Beaucoup de Kurdes ont perdu la vie», a déploré le parti pro-kurde HDP, condamnant l'attentat dans un email. Le quotidien Hurriyet a indiqué que les mariés avaient été blessés et hospitalisés mais que leurs vies n'étaient pas en danger. M. Erdogan a jugé que les auteurs de l'attaque avaient pour objectif de semer la division entre les différents groupes ethniques vivant en Turquie. Nombre de jihadistes perçoivent les Kurdes comme des ennemis; en Syrie voisine, les milices kurdes sont en première ligne dans les combats contre l'EI. Ballet d'ambulances Les télévisions ont montré des ballets d'ambulances arrivant sur les lieux où des corps gisant au sol étaient recouverts de draps blancs. Des personnes sont arrivées sur place en brandissant le drapeau turc et criant «Le pays ne peut pas être divisé», mais d'autres ont tenté de leur arracher leurs drapeaux et la police a tiré en l'air pour les disperser. Comme pour chaque attentat majeur, les autorités turques ont interdit la diffusion d'images en direct par les télévisions et réseaux sociaux. Le vice-Premier ministre Mehmet Sismek, également député de Gaziantep, a jugé «barbare d'attaquer un mariage». «L'objectif de la terreur est d'effrayer les gens, mais nous n'accepterons pas cela», a-t-il dit à la télévision. Il a lui aussi évoqué la possibilité d'un attentat-suicide. Le sud-est et l'est de la Turquie ont été secoués en milieu de semaine par trois attentats qui ont fait 14 morts et ont été attribués par Ankara au PKK. La guérilla kurde semble, après une relative trêve à la suite du coup d'Etat manqué du 15 juillet, avoir repris une campagne intense d'attentats contre des cibles des forces de sécurité. Série d'attentats Gaziantep est devenue le point de passage de très nombreux réfugiés syriens fuyant la guerre qui dure depuis plus de 5 ans et demi dans leur pays. Mais la zone abriterait en dehors des réfugiés et des militants de l'opposition un nombre significatif de jihadistes. La Turquie est secouée depuis plus d'un an par une série d'attentats très meurtriers attribués à l'EI ou au PKK, notamment à Ankara et à Istanbul, où l'aéroport Atatürk a été visé fin juin. L'explosion de Gaziantep survient alors que le Premier ministre Binali Yildirim a annoncé samedi que la Turquie souhaitait jouer un rôle «plus actif» dans la solution de la crise en Syrie afin de «faire cesser le bain de sang». «Que nous l'aimions ou pas, Assad est aujourd'hui l'un des acteurs» de la guerre dans ce pays et il est possible de «lui parler pour la transition», a dit M. Yildirim, tout en excluant que ce soit la Turquie qui le fasse. «Nous pensons que le PKK, Daech et Assad ne devraient pas faire partie de l'avenir de la Syrie», a-t-il dit, ajoutant que la Turquie, l'Iran, la Russie et les Etats-Unis devaient oeuvrer ensemble à une solution.