Les forces kurdes ont lancé une offensive sur trois fronts contre les djihadistes après que le groupe État islamique a atteint, mercredi matin, les portes d'Aïn al-Arab. Le groupe État islamique (EI) avait atteint mercredi matin les portes d'Aïn al-Arab (Kobané en kurde) dans le nord de la Syrie, tandis que les forces kurdes ont lancé une offensive sur trois fronts contre les djihadistes. En Irak, la Grande-Bretagne a de son côté lancé ses premières frappes depuis qu'elle s'est ralliée, vendredi, à la coalition internationale menée par les États-Unis qui vise à détruire l'EI, qui s'est emparé de larges pans des territoires syrien et irakien. Deux chasseurs-bombardiers Tornado sont venus appuyer les troupes kurdes prises pour cible par l'EI dans le nord-ouest, selon le ministère britannique de la Défense, précisant que les frappes avaient détruit un poste d'artillerie et un véhicule équipé d'une mitrailleuse lourde. Les responsables peshmergas, les combattants kurdes, ont indiqué que les opérations kurdes se déroulaient au nord de Mossoul, contrôlée par l'EI, au sud de la ville pétrolière de Kirkouk et contre une ville à la frontière syrienne. «Les soldats sont en train de se battre dans le centre de Rabia», à une centaine de kilomètres au nord de Bagdad, après avoir pris deux villages, a indiqué un haut gradé. Soutenus par des frappes aériennes, les peshmergas ont également attaqué Zoumar, à environ 60 km de Mossoul, et repris des villages au sud de Kirkouk. À Washington, le Pentagone a annoncé envisager le déploiement d'une force d'intervention rapide de quelque 2 300 hommes au Moyen-Orient. «Patience stratégique» Cette unité d'intervention ne sera cependant pas liée aux «opérations menées en Irak en ce moment», a indiqué un porte-parole du ministère américain de la Défense, le contre-amiral John Kirby. Selon un officier des Marines la semaine passée, ces hommes seraient basés au Koweït. Face à l'avancée des djihadistes, le Pentagone a par ailleurs appelé à faire preuve de «patience stratégique» et a estimé que l'armée américaine ne pouvait pas bombarder l'EI «à l'aveuglette». À Bagdad, au moins 13 personnes ont été tuées et 41 blessées par l'explosion de trois voitures piégées mardi soir dans des quartiers chiites, a-t-on appris de sources policières et hospitalières. En Syrie, les djihadistes se trouvaient désormais à «deux ou trois kilomètres» d'Aïn al-Arab, dont ils cherchent à s'emparer pour contrôler sans discontinuité une longue bande de territoire le long de la frontière turque, selon une ONG syrienne. «Il y a juste une vallée qui sépare les djihadistes de la ville», a affirmé Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Face à cette avancée, les États-Unis, qui ont commencé leurs raids en Syrie le 23 septembre avec la coalition, ont mené trois frappes à Mazra al-Dawoud, à l'est d'Aïn al-Arab, sur un total de 11 frappes en Syrie lundi et mardi. L'offensive des djihadistes dans cette région, engagée mi-septembre, avait poussé plus de 160 000 personnes à trouver refuge en Turquie. Lundi, 15 000 habitants ont encore passé la frontière en raison des affrontements. La Turquie dans la coalition Ankara a renforcé lundi son dispositif militaire autour du poste-frontière de Mursitpinar (sud), après la chute sur son territoire de trois obus de mortier venant de la zone des combats. Le gouvernement turc a par ailleurs affirmé mardi que l'EI s'était rapproché de la petite enclave turque abritant le tombeau de Souleimane Shah, située à une vingtaine de kilomètres à l'intérieur du territoire syrien et une trentaine au sud d'Aïn al-Arab. Alors qu'Ankara se montrait jusqu'ici réticent à participer à une intervention militaire contre les djihadistes, le gouvernement islamo-conservateur a finalement déposé un projet de mandat autorisant l'intervention de son armée en Irak et en Syrie, aux côtés de la coalition. Si le Parlement - qui doit en débattre à partir de jeudi - l'approuve, la Turquie rejoindra ainsi la coalition initiée par les États-Unis et à laquelle participent à différents degrés une cinquantaine de pays. L'EI a en outre relâché plus de 70 élèves kurdes qui avaient été enlevés en mai, pas très loin d'Aïn al-Arab, selon l'OSDH. Le conflit en Syrie, qui a commencé en 2011 par un mouvement de contestation contre le président Bachar el-Assad avant de se transformer en guerre entre forces du régime et rebelles, s'est compliqué avec la montée en force de l'EI dans le pays, qui combat à la fois Damas et les insurgés. Le régime n'a pas particulièrement réagi au lancement des frappes de la coalition contre l'EI, mais Bachar el-Assad a dénoncé mardi ceux qui ont «propagé le terrorisme» - en apparente allusion aux États-Unis et à d'autres membres de la coalition qui soutiennent l'opposition syrienne -, estimant qu'ils ne pouvaient pas vaincre les extrémistes. Au total, l'armée américaine a procédé à plus de 4 000 sorties aériennes depuis le 8 août en Irak et Syrie en comptant les vols de surveillance, le ravitaillement en carburant et les frappes. La campagne de frappes en Syrie a fait en une semaine au moins 211 morts parmi les djihadistes et 22 parmi les civils, selon l'OSDH. Premier raid britannique La Grande-Bretagne a mené, mardi 30 septembre, ses premiers raids aériens en Irak contre les positions du groupe Etat islamique (EI). Ils ont détruit un poste d'artillerie et un véhicule équipé d'une mitrailleuse lourde. Les deux avions de combat étaient en mission de reconnaissance lorsqu'on leur a demandé de venir appuyer des soldats kurdes pris pour cibles par les djihadistes de l'EI dans le nord-ouest de l'Irak. « Ils ont identifié et attaqué une position d'artillerie qui menaçait les forces kurdes et ont par la suite attaqué un pick-up armé de l'EI à proximité », a souligné le ministre de la défense britannique, Michael Fallon, ajoutant que les deux Tornado étaient « regagnés sans dommage leur base ». Ces frappes sont les premières depuis que le Royaume-Uni a rallié vendredi la coalition militaire internationale après l'adoption par le Parlement d'une motion du gouvernement autorisant le recours aux raids aériens en Irak. Six Tornado de la Royal Air Force (RAF), basés à Chypre, étaient engagés depuis plusieurs semaines déjà en Irak pour des missions de surveillance. Depuis vendredi, ils ont effectué cinq sorties, équipés de bombes à guidage laser et de missiles, mais sans ouvrir le feu. Avant l'annonce des premières frappes, le ministre des affaires étrangères britannique, Philip Hammond, a insisté sur le fait que le Royaume-Uni n'allait pas se précipiter et « lâcher un tapis de bombes juste parce que quelqu'un a fait état d'un mouvement » djihadiste. Il a également assuré que la RAF n'avait rien à envier à personne et surtout pas à l'armée de l'air française, qui a effectuée deux frappes les 19 et 25 septembre en Irak.